Soit la rencontre entre
deux jeunes gens qui s'apprécient. Le jeune homme souhaiterait
prendre la jeune fille dans ses bras. La jeune fille aimerait bien
que le jeune homme la prenne dans ses bras. Mais ils ne le feront
pas, pourquoi ? Parce que le jeune homme se dit que son geste
implique dans de brefs délais de passer « aux choses
sérieuses », entendez par là très prosaïquement au coït.
Et il sent bien que cet acte n'est pas à l'ordre du jour. La jeune
fille se dit que si elle accueille favorablement les bras du jeune
homme, elle sera sensée dans de brefs délais passer au coït. Et,
dans le fond, elle n'en a pas envie. Alors il ne se passera rien.
Faire des câlins à un humain ami apparaît moins évident pour un
humain que caresser un chat, un chien ou un cheval qu'il ne connaît
pas.
Quelle est l'origine, la
source de cette mésentente homme-femme ? Il est dans l'homme.
Et il commence très jeune. Pour l'illustrer, prenons un cas vécu.
Un jeune homme, vers l'âge de douze-treize ans découvre la
masturbation masculine adulte, c'est à dire comprenant
l'éjaculation. Il se retrouve la pratiquant au moins une fois par
jour. Et remarque que certains jours qu'ils passent particulièrement
agréablement avec des amis à bavarder, rire, rien de
particulièrement « sexuel », il oublie carrément et
tout simplement son activité quotidienne. Il ressort deux faits
intéressants de cette expérience. D'une part cette activité ne
compense pas une relation sexuelle partagée. Aucun animal n'éprouve
le besoin de s’accoupler ainsi trois cent soixante cinq fois par an.
D'autre part, l'oubli de cette activité à l'occasion de journées
affectivement bien remplies indique une piste.
La masturbation masculine
adulte, la plupart du temps, ne compense pas un manque « sexuel »,
mais un manque affectif. Et quel manque ? Le manque tactile,
produit du sevrage tactile subi vers l'âge de trois-quatre ans.
Revenons à nos deux jeunes gens hésitants qui n'osent pas
finalement se prendre dans les bras. En fait, ils souffrent du manque
tactile. Leur désir d'étreinte est tactile et n'est pas
l’expression d'un besoin sexuel de coït. Mais dans leurs têtes il
y a confusion. Ils en restent désemparés et renoncent à suivre
leur envie. Cette confusion vient d'abord du côté masculin.
Et cette confusion est
générale. Vers l'âge de douze-treize ans, les garçons découvrent
et commencent à pratiquer régulièrement la masturbation masculine
adulte. Ils compensent ainsi leur faim tactile. Mais ils vivent
également le shoot endorphinien survenant lors de leur éjaculation
comme une drogue. D'où par exemple la pratique quotidienne de la
« prise » de cette drogue. Abusés par la mal éducation
et l'analphabétisme tactile régnants, les garçons s'imagineront
manquer de « sexe ». Divers éléments leur donneront
cette illusion. Ils manquent aussi de sexe, mais beaucoup moins
proportionnellement que de tactilité. Mais ça, personne ne va le
leur expliquer.
Ils vont étendre leur
pratique masturbationnelle en remplaçant à l'occasion leur main par
un orifice naturel d'un tiers. Ce faisant ils croiront « faire
l'amour » et vont ennuyer le tiers en question. Ils vont très
souvent le harceler et même quelquefois hélas le violer.
Toute la source du
malentendu est là. Privés de tactilité les garçons souffrent de
faim tactile. La compensent avec la masturbation. Confondent celle-ci
avec un besoin de « faire l'amour », qui n'est finalement
très souvent qu'une masturbation à l'intérieur de quelqu'un
d'autre.
Quand après une rupture
j'analysais les bons moments vécus, il m'est arrivé plus d'une fois
de regretter plus les câlins que les pseudo actes sexuels qui n'en
étaient pas. Ce que j'ai mis bien longtemps à comprendre et
réaliser. L'amour est une chose simple, à condition de le respecter
et ne pas faire n'importe quoi comme à peu près tout le monde. Il y
en a qui ont compris, qui comprennent, qui agissent intelligemment et
s'en ressentent agréablement. Mais ils ne sont pas, loin de là, les
plus nombreux. Ça dépend de nous, de nos efforts si nous voulons en
faire partie.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 17 juillet 2017
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