dimanche 9 juillet 2017

809 Dresser un bilan tactile

Qu'est-ce qu'un « bilan tactile » ? C'est le relevé de quand et comment un individu est touché au sens le plus basique du terme : avec les mains, la bouche, la langue, etc. L'épiderme et les muqueuses représentant le plus vaste système de communication humaine, quand bien-même est-il souvent négligé, dénigré, interprété de manière étroite, réductrice et erronée, oublié, maltraité.

J'ai connu une jeune étudiante qui avait une horreur absolu de tous contacts « physiques ». Même être simplement bisée la dégoûtait. Elle s'est pendue. A présent que je repense à elle, qui avait apparemment « tout pour être heureuse » : études à l'université, copain, logement, je me dis que par delà les apparences positives de l'organisation de sa vie elle avait très certainement été violée. D'où son horreur du toucher auquel personne n'avait accordé plus d'importance que comme une simple bizarrerie.

C'est en lisant l'interview d'une actrice de cinéma qui parlait de son vécu difficile, du viol qu'elle avait subi, que j'ai relevé une précision. Elle disait que suite à son agression le moindre contact « physique » la faisait sursauter, y compris de la part de sa meilleure amie.

J'ai rencontré une jolie femme bizarre et désagréable, agressive sans raisons. Je ne comprenais pas le motif de son comportement, jusqu'au jour où j'ai légèrement touché son épaule pour lui signaler mon arrivée et lui dire bonjour. Elle a sursauté et eu très peur. Cette réaction m'a donné l'explication de l'origine de son agressivité bizarre.

Une fois violée, la victime, qui peut être féminine mais aussi masculine, développe un rapport conflictuel au toucher. Et quand et comment adulte est-elle touchée ?

Si c'est par exemple une femme mariée, son mari pourra la toucher. Mais ce toucher sera systématiquement ressenti plus ou moins comme une « entrée en matière » pour le coït.. Et par là se reliera à tout le vécu désagréable lié à cet acte. Le toucher serait ainsi soi-disant « sexuel ».

Comme le croyait une respectable grand mère mise mal à l'aise par son petit fils de quatre ans qui mettait à son avis trop les mains sur elle. Elle lui disait : « seul grand père a le droit de me toucher ainsi. » Je synthétise son propos. Et pourquoi grand père a le droit de toucher ainsi grand mère ? Parce qu'il « dort » avec grand mère !

On voit ici que quand on parle du toucher, même à des très petits, est évoqué au moins indirectement le lien avec la sexualité. Lien auquel on donne un caractère systématique qui conduit souvent à l'absence de toucher entre adultes. Caresser un chat inconnu aperçu dans la rue est chose simple et aisée. Toucher un humain est en revanche très souvent considéré comme « une avance » ou une agression.

Dans notre société le toucher neutre entre adultes brille le plus souvent par son inexistence. Le créer ou recréer nécessite la mise au point d'un protocole particulier. C'est ce que je me suis efforcé d'esquisser dans ma dernière contribution à ce blog avant celle-ci.

Il faut réintroduire la paix dans le toucher ainsi recadré exprès selon des conventions simples. Ceci afin de pouvoir rendre à nombre de personnes la sérénité perdue des fois depuis des dizaines d'années. Combien de personnes choquées physiquement n'ont jamais été traitées « physiquement » ? Très certainement la plupart. Il est grand temps de remédier à cette situation qui empêche nombre d'entre nous d'apprécier positivement la vie. D'être heureux tout simplement.

Basile, philosophe naïf, Paris le 9 juillet 2017

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