Dernièrement je parlais
avec une jolie fille que j'avais déjà très brièvement rencontré
auparavant, et celle-ci, pour se définir m'a dit : « je
suis la petite amie de untel. » Avant-hier, une autre personne
la voyant passer m'a commenté son passage en me disant :
« c'est la petite amie de untel. » Ce genre de propos de
nos jours est courant, banal. Mais réalise-t-on vraiment sa
signification impliquée ? Je ne crois pas.
Cette jolie fille me dit
pour se présenter : « je suis la petite amie de untel. »
Elle va ainsi se définir à partir de sa « définition »
« sexuelle »... Mais en quoi ça me concerne que cette
jolie fille se considère hétérosexuelle, homosexuelle, bisexuelle,
transgenre ou asexuelle ? Qu'elle ait ou n'ait pas un ou
plusieurs amants ou amantes, et leurs identités précises
éventuelles ? Qu'elle se considère comme libertine, fidèle à
un homme, ou une femme, ou plusieurs, ou ai fait vœu de chasteté
absolue ? Ça m'est parfaitement égal. Ça ne me concerne pas.
« Oui, mais, me
diront certains, comme ça, si vous auriez des intentions éventuelles
d'y mettre les mains, vous voilà prévenu. » Mais je n'ai
aucune intentions éventuelles de ce genre ! Malotru ! Ce
n'est pas parce qu'une fille est jolie que je dois m'imaginer tout de
suite je ne sais quelle « aventure ». Et puis, si je
comprends bien, je suis prévenu de ne pas devoir y mettre les mains,
parce que... la jolie fille appartient à untel ?
Tiens ! Tiens !
Comme c'est intéressant, cette façon de considérer une femme !
Le patriarcat montre son nez à travers un propos apparemment anodin.
Je remarque qu'il m'est arrivé d'entendre définir une femme comme
la copine ou la petite amie d'un homme donné. En revanche, je ne me
souviens pas avoir entendu définir un homme comme « le petit
copain » ou « l'amie » de unetelle...
Une femme n'existerait
donc que par rapport à un homme, à condition qu'il y en ait un et
qui ait « des droits » sur son ventre... Là on vit où
et à quelle époque ? J'entends ça à Paris dans un milieu
apparemment civilisé. On me dira peut-être que je pinaille. Après
tout pour cette jolie fille se présenter comme « la petite
amie de untel » c'est indiquer un élément important de sa
vie. Mais, si je la revois, pas besoin d'une telle précision, je
m'apercevrais bien si untel est souvent en sa compagnie. Quant à
savoir s'ils dorment voire habitent ensemble, c'est leur affaire. Et
des « couples » se font ou se défont tous les jours. Se
présenter ainsi peut être aussi une manière de déclarer d'emblée
de façon indirecte qu'elle n'est pas intéressée sexuellement par
vous.
Une chanson très
machiste chantée par Édith Piaf dresse un tableau totalement
démagogique de ce que serait l'amour d'elle pour un homme qu'elle
définit comme : « l'homme auquel j'appartiens. » Se
présenter comme « la petite amie de untel » revient
strictement au même. Sans s'en rendre compte, tant notre culture
dominante est imprégnée par le patriarcat. Pour moi, cette jolie
fille dont je parlais ici n'appartient à personne. Elle est d'une
compagnie agréable et a une conversation agréable. Quant à ce
qu'elle fait de sa « sexualité », présentement je m'en
fiche. Je revendique le droit à l'indifférence sexuelle et l'amour
sans précisions. Pas d'intentions ou d'idées de quelque chose à
venir ou pas. Je préfère rester au contact de la réalité et de
l'instant présent, le seul qui existe.
La prétention à définir
une femme comme « la petite amie de untel » relève aussi
d'une façon générale de la frénésie casière. Assigner chaque
personne à une case précise au lieu de l'observer et apprécier
chez elle toute la richesse de la diversité humaine. Résumer une
femme à sa « qualité » de « petite amie de
untel » est une très pauvre définition. Elle me parle autant
que si on cherchait à la définir comme une personne qui ne boit pas
de café ou s'habille en rose. Il serait important que certains en
prennent conscience et modifient leur manière de se présenter ou
présenter les autres.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 10 juillet 2017
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire