dimanche 30 juillet 2017

836 Explication du mécanisme du féminicide

Un jour, un policier m'a dit que parmi les individus dangereux il ne craignait rien plus physiquement que les drogués en manque. « Ce sont les plus dangereux », m'a-t-il dit.

Chaque année des centaines de femmes meurent assassinées par leur conjoint ou ex conjoint ou homme qui les courtisait. Les assassins ont les profils les plus divers et se suicident souvent une fois leur crime accompli. Quelle est l'origine précise de cette hécatombe ? Mieux la connaître permettrait de prévenir et éviter au moins une partie de ces meurtres.

Il y a quelques années la femme qui était ma compagne me quitte. Quelques temps plus tard je suis chez elle pour récupérer des affaires à moi. Je suis ravagé intérieurement mais accepte cette situation. Après tout, mon ex compagne a parfaitement le droit de me quitter et choisir de faire sa vie autrement qu'avec moi. Je ne cherche pas à contester son choix, dont je souffre.

Il s'est passé alors un très bref incident très troublant et bizarre. J'étais pas loin de mon ex. J'étais triste. Elle, pour un motif que j'ai oublié, mais qui n'avait pas d'importance particulière, s'est trouvée à un moment joyeuse et franchement très gaie. J'étais debout et tenais dans ma main droite un objet assez lourd et dur. Et soudain l'envie claire, nette, ouverte et précise m'a traversé l'esprit de fracasser la tête de mon ex avec cet objet. J'ai été surpris d'avoir une pareille pensée, un tel désir même une fraction de temps extrêmement bref, mais largement suffisante pour mettre cette folie à exécution. J'ajoute que je suis absolument non violent et n'ai jamais de ma vie frappé ou insulté quelqu'un. Une telle impulsion criminelle est vraiment aux antipodes de ce que je suis et ai toujours été. J'ai aussitôt contré cette pensée par une autre, apaisante : « je ne suis pas quelqu'un qui se conduit comme ça. » La pensée méchante est partie et n'est pas revenue. Mais elle m'a donné une vision précise des auteurs de crimes passionnels, qu'on nomme à présent « féminicides ». Cet incident m'a tellement troublé que jusqu'à aujourd'hui je n'avais pas osé en parler. J'en avais même honte. Quand cet incident est arrivé, si j'avais été violent, alcoolique, drogué, aurais-je hésité à suivre cette impulsion criminelle ? Peut-être pas et je serais devenu un criminel. Comme je suis quelqu'un de très pacifique qui a néanmoins eu cette pensée folle, ça signifie à mon avis certainement une chose. Un tel comportement criminel subit peut affecter à l'occasion des personnes habituellement très pacifiques.

Très souvent, après avoir commis leur crime, les auteurs de féminicides se donnent la mort. Je n'avais pas commis ce crime. Mais par la suite, et durant des mois, j'ai été harcelé par l'idée suicidaire. J'ai résisté à cette autre folie. Mon médecin traitant m'a aidé par son écoute. Et puis, au bout d'une année entière, la tentation suicidaire s'est évaporée, comme si elle n'avait jamais été là.

Ces conséquences vécues d'une rupture m'interpellent. Il ne s'agit pas d'un état conscient, mais d'autre chose. Je ne prétends pas ici pour autant excuser ou justifier les assassins, mais analyser leurs motivations. En connaissant mieux la forme et le fonctionnement exact de leur démarche criminelle, on trouvera peut-être des éléments permettant de réduire le nombre de victimes. On appelle cette démarche en langage scientifique « profilage ». On profile les criminels.

La base de la démarche criminelle serait ici le manque d'endorphines. Cette drogue naturelle est auto-produite chez un homme au contact d'une femme. Il en est subitement privé. Alors sa réaction devient sanguinaire. Rappelons la pensée du policier citée au commencement de cette page. Le drogué en manque est le plus dangereux de tous les individus dangereux. Il est ici dangereux pour la femme au contact de laquelle il s’auto-droguait et pour lui-même. Cette constatation concernant la réaction au manque subit d'endorphines aidera-t-elle à limiter demain le nombre de victimes ? Je l'espère. Une campagne de prévention des féminicides devrait en tous cas en tenir compte.

Basile, philosophe naïf, Paris le 30 juillet 2017

samedi 29 juillet 2017

835 Éveil, sommeil, addiction, éveil ou sommeil

Une dame bouddhiste m'expliquait l'autre jour que depuis des années elle pratiquait la méditation et rêvait de « parvenir à l'éveil » sans trop savoir ce que c'était.

L'éveil, nous le connaissons tous, quand, avant notre naissance nous acquérons progressivement nos différents sens. Cet état se prolonge un peu durant nos débuts post nataux. Ainsi, le nouveau-né ne découvre pas tout de suite que les choses qui s'agitent devant ses yeux quand il est allongé sur le dos sont ses propres membres, bras et jambes.

Et puis on commencera à nous stériliser. Sevrage tactile et répression de la créativité vont faire de nous des petits humains « civilisés et à part entière ». Fini, les jolies couleurs, les contacts chaleureux, faciles, fréquents et tactiles, on devient des humains refroidis.

Quand des années après survient le moment de notre vie où la reproduction devient possible, cette nouvelle fonction surgit dans un paysage de désolation. Depuis des années nous ne peignons plus avec de jolies couleurs, et le reste de notre vie a pris la couleur franche du gris civilisé. Nous avons appris à obéir et nous ennuyer.

Quand la sexualité adulte touche les garçons, vers l'âge de douze-treize ans, ils découvrent la masturbation masculine adulte. Et deviennent tout de suite ou presque accrocs au shoot endorphinien de l'éjaculation.. C'est une drogue pour eux, qu'ils consomment très régulièrement.

Ils vont étendre leur pratique masturbatoire à la recherche de partenaires dans lesquels ils chercheront à se masturber, pas à faire l'amour. Tout en étant convaincu de le faire. Préjugés et idées diverses conforteront leur démarche. Les garçons peuvent-ils s'éveiller un jour ? Certainement pas en continuant à se soumettre au sommeil de la raison avec la pensée unique patriarcale régnante.

Éviter de réfléchir devient un sport à pratiquer tous les jours. J'entendais hier raconter une histoire survenue à un Français habitant durant quelques années en Égypte. Une villa voisine de la sienne est habitée par une famille de Norvégiens. Il réalise un jour que ses voisins quand ils sont chez eux sont tous nus en permanence. Au lieu de se dire : « tiens ! Avec la terrible chaleur ambiante, ils ont raison, ces Norvégiens. Je vais faire comme eux ! » il se dit : « ce sont des Norvégiens, des mœurs norvégiennes ». Et comme il n'est pas Norvégien il se dit n'être pas concerné. Il évite de réfléchir et remettre ses habitudes en question. Il fait comme si les Norvégiens étaient des êtres à part.

C'est aussi là qu'on réalise le poids du conditionnement qu'on a subi. En 2013, j'ai décidé de rompre avec les vêtements. C'est à dire être nu le plus souvent possible seul chez moi sans choquer, ni déranger personne. Je m'élève intellectuellement contre la prétention de faire de l'état naturel baptisé « nudité » un état qui serait lié à « la sexualité ». Pour ne plus ressentir du tout ce lien, il m'a fallu trois années de pratique. C'est dire que je comprends que des personnes n'ayant ni cette démarche, ni cette manière de penser, ne puisse s'empêcher de suivre l'idée erronée que l'absence de vêtements est une situation « sexuelle ». Le conditionnement pèse sur les gens au moins autant sinon plus que les idées. Il est l'équivalent dans notre culture du dressage chez les animaux. Sauf qu'ici ce sont les humains eux-mêmes qui dressent d'autres humains.

Quand ce conditionnement ne prête pas à des conséquences douloureuses il est sans gravité. Mais c'est loin d'être malheureusement toujours le cas. Il en est ainsi de nombre de pratiques barbares souvent perpétuées par des victimes elles-mêmes, comme par exemple l'excision dans certains pays ou le viol rituel des très jeunes filles par les « hyènes » au Malawi.

Basile, philosophe naïf, Paris le 29 juillet 2017

834 L'art de grimper aux rideaux à l'orientale

Une dame de culture orientale a horreur des caresses et s'éclate comme une bête en faisant juste la chose. Explication : sa culture orientale l'a ouverte sur la méditation. Cet exercice mental, ou plutôt cet état mental auquel on adhère, vous place en situation psychique d'être pleinement présent sans le parasitage de pensées ayant trait à autre chose que la situation, le moment vécu. Ainsi est donné liberté totale au shoot d'endorphines lié à l'acte sexuel. Ce qui explique que la dame avec un acte sexuel sommaire grimpe systématiquement aux rideaux.

L'orgasme et la méditation se confondent. La plupart des gens l'ignorent. Probablement environ 99,99 % de la population...

Ce rapport entre les deux phénomènes explique que généralement on grimpe aux rideaux peu de fois dans sa vie. Ensuite, on sort de la méditation très simplement : on cherche à retrouver ce qu'on a vécu. Et plus on cherche, moins on trouve. Il suffit de chercher pour ne pas trouver.

Alors, on imagine des scénarios, des recettes, des règles, toutes généralement plus inefficaces les unes que les autres. Et surtout on tourne systématiquement le dos à la seule voie qui mène à grimper aux rideaux si cette voie veut bien aller ce jour-là dans cette direction.

Les propos sur le fait de se connaître l'un l'autre pour grimper plus aisément aux rideaux, etc. relèvent de l'aberration. On grimpe un jour aux rideaux et plus après. Et si on analyse la situation où on a grimpé aux rideaux, elle était apparemment des plus quelconques. Qu'est-ce qui s'est passé alors de différent ? Pour des raisons particulières on ne s'est pas embarrassé de pensées qui annihilaient l'état méditatif. Ce moment atteint sans intentions de l'atteindre, on ne risque pas ensuite de le retrouver tout simplement parce qu'on cherche à le retrouver.

C'est aussi pourquoi en amour « au début c'est toujours bien ». Parce que c'est inattendu et on l'accepte sans le pré-penser. Après, on veut retrouver ce qu'on a connu et c'est terminé.

Il n'y a rien de plus compliqué pour certains que parvenir à être simple. Simple comme l'enfant qui, avant sa naissance, perçoit et entend, découvre et accepte, s'éveille à la vie. Plus tard, une fois né, on nous apprend à ignorer la vie en pensant. Pensant le plus possible et ne vivant pas. Pour vivre, il faut arriver à des états de non pensée, soit de méditation.

Et quand cet état est concomitant à une pratique sexuelle, masturbation ou acte sexuel, on grimpe aux rideaux.

Ce qui généralement n'arrive que peu de fois dans la vie, car on ne sait pas méditer, surtout dans ces moments-là, durant ces activités-là.

On peut aussi méditer en faisant de la peinture, du jardinage, en se promenant dans la Nature, etc. Un ami qui vivait à Palavas-les-Flots m'a raconté cette belle histoire. Il connaissait un homme qui était vendeur chez un marchand de poissons de la ville. Cet homme était toujours d'une formidable et très belle humeur joyeuse. Un jour il lui a demandé quelle était sa recette pour avoir une telle joie de vivre. Ce vendeur de poissons lui a répondu que sa recette était la suivante : « chaque jour je vais m'allonger sur la plage durant deux heures et je ne pense à rien. » Ce vendeur de poissons était un grand sage. Pour beaucoup de gens c'était juste un très joyeux vendeur de poissons.

Beaucoup de choses justes ne s’apprennent pas par la réflexion mais avec la simple pratique.

Basile, philosophe naïf, Paris le 29 juillet 2017

833 Le grand désastre de la sexualité automatique et soi-disant libérée

Pour une dame de mes connaissances mon comportement est simple à analyser. Comme j'ai eu des problèmes d'agression dans mon enfance, je fuis la sexualité en inventant des théories justificatrices. Une autre dame de mes connaissances m'expliquait hier qu'elle n'avait « aucun problème avec le toucher ». Par delà la diversité apparente des sujets traités, ces deux dames abordaient le même sujet : le grand désastre de la sexualité automatique et soi-disant libérée.

C'est une chose qui officiellement n'existe pas, comme quantité d'autres règles, conditionnements et interdits soi-disant naturels, inévitables, sécurisants et allant de soi.

Qu'est-ce à dire ? Je ne refuse rien mais exige une chose : l'acte sexuel ne doit survenir pour ce qui me concerne qu'à la condition nécessaire, impérative et pas suffisante d'exprimer un désir réel, authentique et réciproque. Or, qu'en est-il dans notre belle société occidentale, française et parisienne soi-disant « libérée » ? Certains gestes, certaines situations, certaines réactions « physiques » impliqueraient l'acte sexuel automatique. C'est « la sexualité automatique et soi-disant libérée ». Je suis dans un lit avec une jolie demoiselle ? Boum ! Faut y aller ! J'ai réussi à embrasser une jolie demoiselle sur certains endroits tels que la bouche, les fesses ou les seins ? Boum ! Faut y aller ! J'ai une érection ? Etc, etc.

Comme « alibi » on va invoquer la logique, la « Nature », et tutti quanti... Mais alors, si agissant ainsi avec tant de « logique », de « naturel », tout se passe généralement aussi mal, d'où cela provient-il ?

Et pourquoi tant de « couples » se séparent ? Tant d'hommes et de femmes souffrent du sentiment d'être seul ? Jusqu'à paraît-il aujourd'hui trente pour cent des étudiants de France ?

Nous vivrions soi-disant dans une société « libérée » qui a fait sa « révolution sexuelle » dans les années soixante-dix du siècle dernier. Sur Internet il n'y a jamais eu aucun de pornographie disponible en libre-service et autant d'articles pseudo-scientifiques nous expliquant l'art de grimper aux rideaux en cinq leçons.

N'importe quel individu, fut-il un embobineur ou une embobineuse, est en droit de s'affubler du titre de « sexologue ». L'usage du terme n'est l'objet d'aucune réglementation officielle. Et venir nous bramer ses conseils et critiques dans les oreilles. S'il a usé son fond de jupe ou de pantalon sur les gradins d'un amphi de fac de psycho, il ajoutera : « psychologue ». Comme ça, ça fera bien : « psychologue sexologue » ! Il sera bien payé, y compris quand il dit ou écrit des bêtises.

Le grand problème est qu'au lieu de s'écouter, nous écoutons la détestable petite musique de la sexualité obligatoire. J'ai fait ci, elle fait ça, donc on doit faire la chose... Ou on doit partir en courant pour l'éviter.

Justement, cette dame qui n'a « aucun problème avec le toucher », elle croit que certains touchers impliquent l'acte sexuel quand bien-même on n'en aurait pas envie. C'est le devoir conjugal revu et simplifié. Je te touche là, donc, si tu ne « résiste » pas, on fait la chose. Ce mode de fonctionnement est celui de nombreux « couples ». Et justement un beau jour ils se séparent les « encouplés » ! N'y aurait-il pas une relation de cause à effet entre ce mode de fonctionnement sexuel « automatique » et leur séparation ? Si, justement ! Mais pour le voir il faut ouvrir les yeux. Et renoncer à ces dévastateurs « automatismes » sexuels. J'espère avoir été clair. De toutes manières je serai amené à reparler de la question.

Basile, philosophe naïf, Paris le 29 juillet 2017

vendredi 28 juillet 2017

832 Pas vraiment nus

Bien souvent les naturistes ne sont pas vraiment nus. Il suffit déjà de consulter Internet en cherchant des pages avec le mot « Naturisme » pour voir une masse de photos de lieux de vacances, de campings et de plages. Par delà les motivations commerciales des annonceurs, le message est clair. Si on se met nu au soleil, c'est pour éviter les marques de maillots et faire du bronzage intégral. On a un alibi, une excuse pour se mettre nu, mais ne craignez rien, dans la vie vraie on est toujours habillés. Ouf ! Nous voilà rassurés, la morale traditionnelle est pratiquement sauve.

Confirmant cette gêne j'ai remarqué que des publications naturistes ont des fois un peu trop de photos de groupes nus prises de dos. Ainsi on ne voit aucun zizi.

Nu n'est pas notre état normal, tel est le message délivré par diverses revues naturistes qui étalent sur leur couverture des photos de jolies femmes nues de moins de trente ans. Le Naturisme apparaît alors réduit à un prétexte pour montrer des femmes nues. Est-ce conscient et volontaire ?

Combien de fois j'ai pu lire dans ces revues des plaidoyers pour justifier la nudité publique ! Mais quel besoin existe de la justifier ? Ce serait plutôt ceux qui s'exhibent en public avec de ridicules petites pièces d’étoffes sur eux qui auraient à se justifier ! Et à qui on devrait réserver des lieux particuliers pour leurs étranges pratiques ! Ce serait des plages et campings textiles.

Certains naturistes font du naturisme clandestin. Une dame âgée qui fréquentait avec son mari un club naturiste qui depuis a fermé, insistait sur une chose. Le fait que là où ils habitaient leurs voisins n'étaient pas au courant. Et ne devaient surtout pas l'être.

En 1976, en vacances dans un camping naturiste au bord de l'Ardèche, je photographie la rive en face. Un homme âgé et antipathique arrive comme une flèche venant de la rive en face et veut me frapper : « tu as photographié ma femme ! » Est le motif qu'il invoque. Je n'avais pas fait attention à ce que au loin sur l'autre rive il y avait des naturistes nus dont la femme en question. Mes excuses et mon air ahuri ont calmé l'excité. Un vacancier sympathique et costaud qui observait la scène de loin est même arrivé à mon secours mais n'a pas eu besoin d'intervenir !

Au tout début des années 1980, en vacances dans les Landes, j'observais que sur la grande plage de Biscarosse pratiquement toutes les femmes étaient seins nus. Depuis ce temps-là, j'ai l'impression que beaucoup de femmes ont recommencé sur les plages à dissimuler leurs seins sous cet objet hypocritement baptisé « soutien-gorge » et qui n'est en fait qu'un cache-nichons. Cette évolution est compréhensible. Les femmes n'étaient pas à l'aise et à égalité avec les hommes qui vont la poitrine à l'air sur les plages. Quand une femme était seins nus, que de fois elle était « par hasard » allongée sur le ventre sur la plage ? Ou debout elle croisait les bras couvrant ses appelants mammifères ?

Les femmes n'étaient pas vraiment à l'aise et à égalité avec les hommes, et ne le sont toujours pas. Traitées en objets sexuels beaucoup d'entre elles préfèrent avoir le torse couvert pour sentir moins les regards masculins viandarts autour d'elles.

Au tout début des années 1980 on avait l'impression que les plages françaises se dirigeaient vers la généralisation des seins féminins nus et puis de la nudité intégrale, comme sur les plages ordinaires de certains pays. Depuis, on est largement retourné en arrière.

Tant que beaucoup d'humains croiront que la simple nudité est « sexuelle » on en restera là. Et les marchands de ridicules vêtements de bains auront un avenir commercial devant eux.

Basile, philosophe naïf, Paris le 28 juillet 2017

mercredi 26 juillet 2017

831 Peut-on auto-produire son bonheur ?

Il y a une trentaine d'années, je regardais une émission de télévision. Sur un plateau on voyait se dérouler un débat avec une ex ballerine danseuse étoile, qui avait fait vœu de perpétuelle virginité au sein de l'église catholique. Cette femme ayant formulé ce vœu se définissait comme étant une « vierge consacrée ». Face à elle il y avait plusieurs interlocuteurs cherchant à la déstabiliser. En même temps on les sentait gênés. Car leur interlocutrice très jolie dégageait un sentiment de bonheur extatique. On la sentait se sentir très bien dans la démarche sexuelle qu'elle avait choisie.

À l'inverse, je connais une femme qui m'explique qu'elle éprouve souvent et franchement l'envie de faire l'amour. Chose qui n'arrive pas, ce qui la déçoit fortement.

De ces deux dames aux démarches contradictoires, peut-on dire que l'une a raison et l'autre tort ? Qu'elles ont toutes les deux une démarche légitime et différente ? Laquelle est plus proche du bonheur ? Et qu'est-ce que le bonheur ?

Le bonheur corresponds à un dégagement interne d'endorphines. Ce sont des drogues naturelles. Dans une certaine mesure cette émission dépend de nous et pas de ce qui nous arrive précisément. Ce qui signifie qu'on peut se rendre heureux à priori avec n'importe quoi, dans n'importe quelle situation. Il suffit de s'autosuggestionner que tout va bien pour que, dans une certaine mesure, nous nous sentions bien.

Cependant, cette faculté a ses limites. Déjà face aux contraintes de la réalité. Elles pourront contribuer à nous délivrer du fantasme, du songe, de la rêverie qui nous met en joie. C'est pourquoi il est préférable que les conditions de vie que nous rencontrons correspondent vraiment au bonheur.

Ce qui soulève la question : existe-t-il un bonheur objectif, si oui à quoi correspond-t-il ?

Si j'observe ces deux dames aux démarches contradictoires, je ne peux qu'enregistrer leur point de vue. Étant donné ses propos et l'impression qu'elle donne, je peux penser que la première est heureuse. Et que la seconde serait heureuse à condition de connaître la réalisation de ses rêves.

Sinon, je peux aussi considérer que ces deux dames sont des êtres humains ayant tous les mêmes besoins précis. Que s 'ils sont satisfaits elles iront tout à fait bien.

Là ma démarche philosophique suscitera les hurlements de certains de mes interlocuteurs. Comment ? Nous ne serions pas des êtres parfaitement uniques, dotés de sentiments et réactions parfaitement uniques ? Et bien non, nous ne sommes que la déclinaison répétée d'une même demi personne : l'être humain homme ou femme. Si nous parvenons à comprendre dans une mesure suffisante comment elle fonctionne, nous pouvons significativement améliorer notre vie.

Revenons aux deux dames du début de cette page. Si ça se trouve elles éprouvent toutes les deux la très banale réaction féminine hostile au harcèlement sexuel des mâles obsédés en permanence par le coït mécanique. L'une et l'autre sr défendront alors chacune à sa façon. La seconde insistera pour affirmer une sexualité qu'elle ne vit pas. Pourquoi ? Parce que les hommes qui l'attirent ne veulent pas d'elle, pardi ! Comme par hasard ils seront tous dans ce cas. Ce discours sexuel dissimulera un très banal rejet au nom de l'amour des hommes baiseurs sommaires. Ce rejet sera fait par l'autre dame au nom de Dieu. Deux démarches apparemment différentes, un même but. Par derrière le mur des mots il faut savoir identifier la réalité des intentions et des situations vécues. Ces deux dames fuient, évitent ou repoussent les hommes harceleurs en brandissant chacune un drapeau différent.

Basile, philosophe naïf, Paris le 26 juillet 2017

830 Le discours des lions

En France, au début des années 1960, la grève était une arme revendicative uniquement réservée au monde du travail. Il n'était pas question de parler de grève chez les étudiants et encore moins chez les lycéens. Ces derniers étant plutôt considérés comme des enfants. Et puis une petite organisation politique trotskiste lambertiste présente à Paris, le CLER, Comité de Liaison des Étudiants Révolutionnaires, a initié une action paraissant absurde à beaucoup d'étudiants : la grève. Quand des militants du CLER en grève se présentaient à un examen, ils rendaient volontairement une copie blanche. Étonnement et incompréhension chez quantité d'étudiants qui voyaient ainsi ces militants gâcher à leurs yeux volontairement le cours de leurs études. Plus d'une cinquantaine d'années après, la grève étudiante ou lycéenne fait partie du paysage.

Dans le domaine « sexuel », il en est aujourd'hui comme de la grève étudiante hier. Prétendre volontairement ne pas chercher à baiser, refuser la baise, dérange. Une amie, qui ne cherche pas à me draguer, a passé hier un bon moment à chercher à me convaincre de chercher à baiser. Car je lui expliquais que très simplement, en l'absence d'un réel désir, je préférais ignorer la chose et m'en portais très bien.

Tout l'argumentaire de cette amie se résumait ainsi : « je devais avoir envie de baiser. » Si je ne me trouvais pas mal de ne pas baiser, c'est que j'avais des problèmes. Et si je déclarais ne pas m'en trouver mal, c'est que je me protégeais et me mentais à moi-même. En résumé : « baisez, c'est obligatoire, naturel et bon pour la santé. »

Le poids de la pensée unique est étonnant. J'aurais dit à mon amie : « je suis végétarien », ou : « je ne mange jamais de pommes », ou : « je ne bois pas de café », aurait-elle ainsi passé au moins trois quarts d'heure à chercher à me convaincre du caractère faux et illégitime de ma démarche ? Je ne crois pas.

Ne pas baiser, volontairement, ne pas s'en cacher et surtout ne pas paraître s'en trouver mal, au contraire, voilà bien une façon de vivre qui dérange. Proclamer qu'on fréquente des clubs échangistes, qu'on est bisexuel, gay ou polyamoureux, voilà qui fait d'agréables sujets de conversation. Mais déclarer qu'on ne baise pas, volontairement et qu'on s'en trouve bien et le paraître, ça dérange. Parce que ça remet en question les autres, qui patauge dans la baise et s'en trouve souvent mal et déçu. Mais se consolent en se disant que tout le monde souffre et se trouve dans le même cas.

De l'avis de beaucoup la sexualité doit être normée et active. Même si cette activité se résume à se lamenter qu'on n'y arrive pas. Un jour des amis chez qui j'étais en vacances se sont inquiétés. J'étais seul et ne m'en plaignais pas.

Toute la sexualité est sensée être normée. Ainsi par exemple on vous dira que les lions vivent avec une troupe de lionnes. Un mâle a plusieurs femelles pour lui tout seul. En fait ce n'est pas exactement ça. Le lionceau mâle arrive à l'âge de trois ans. Il est alors chassé du groupe. Et vivra seul, à moins de parvenir à chasser un lion qui a sa troupe de femelles et prendre sa place. Donc, la plupart des lions vivent seuls et n'ont aucune vie sexuelle.

À entendre les discours normatifs, l'homme, lui, doit baiser pour son plaisir toute l'année. Et pourquoi donc ? Est-il heureux ainsi ? À regarder les dragueurs impénitents que j'ai connu, sauf deux d'entre eux, ils ne m'ont pas paru spécialement heureux et épanouis. Je n'ai pas eu l'impression que leur situation était spécialement enviable.

Basile, philosophe naïf, Paris le 26 juillet 2017

829 Lendemain de stage de massages

Dans ma dernière contribution, je parlais de mon stage de massages et terminais ainsi mon propos : « Je n'ai pas su poursuivre l'expérience de ce stage de manière pratique à l'extérieur. Car j'avais les préjugés de mon époque, je croyais à l'existence du « sexuel ». Qu'il existait une zone de la communication entre humains adultes qui implique automatiquement la recherche du coït. » Qu'est-ce à dire ?

J'avais eu l'occasion de vivre un toucher très agréable et pas du tout sexuel. En écrivant cette phrase je me rends compte que je me mets en désaccord avec sans doute au moins quatre-vingt pour cent de la population, sinon plus. La plupart des gens croient que les caresses entre adultes débouchent sur le coït. Ils trouvent cette situation juste et positive, ou injuste et horrible, mais y sont attachés. Plus même : rien que la vue des gens, baptisés « nus » pour la circonstance, est considérée comme « sexuelle ».

J'étais passé à travers le miroir et avais vécu autre chose. Comment allais-je transposer cette expérience dans la vie de tous les jours ? Ce fut impossible du fait même du matraquage normatif sexuel dominante. De la « pensée unique sexuelle » régnante qui nous brame à longueur de journées dans les oreilles : « baisez, c'est très bien !!! » ou : « ne baisez pas, résistez, baisez c'est très mal !!! »

J'avais recueilli les coordonnées de la jeune et très jolie fille de dix-sept ans avec laquelle j'avais sympathisé durant le stage. Je pris contact avec elle pour la revoir. Elle habitait pas loin de mon lieu de travail. Mais déjà ma vision de la situation était déformée par le matraquage sexuel régnant, qui n'a fait que s'amplifier depuis cette époque. Ça se passait il y a trente-et-un ans.

L'expression même de ce matraquage, je m'en souviens très bien, est que j'ai eu un moment d'appréhension avant de téléphoner à cette jeune fille. Je me suis dit : « oui, mais il y a le SIDA. » Qu'était-ce à dire ? Que d'emblée, rencontrant une demoiselle sympathique je pensais au coït. Alors que je n'avais pas éprouvé le moindre désir de la chose avec elle. Pourquoi alors penser au coït et craindre la contagion du SIDA ?

Pour la très simple raison que la « pensée unique sexuelle » n'arrête pas de nous bramer dans les oreilles que nous devons baiser à tout va. Quand bien-même nous n'éprouverions aucun désir mais connaîtrions juste la possibilité « technique » de réaliser l'acte.

Partant sur de telles bases, nos retrouvailles ne risquaient pas de suivre un cheminement original. La jeune fille et moi, quand nous nous sommes revus, n'avions en gros rien à nous dire. Nous ne nous sommes pas revus par la suite et j'ai même oublié son prénom.

La « pensée unique sexuelle » a ainsi triomphé de notre relation tactile possible. Au nom du « mieux » qui serait soi-disant la recherche du coït, on évite de se lancer dans la recherche et l'exploration du continent inconnu de la tactilité. L'inconnu fait toujours peur. D'autant plus qu'il nous rappelle l'impressionnant et incompréhensible monde de la vie intra-utérine et de notre très petite enfance où nous avons pleinement vécu notre tactilité.

C'est tellement plus simple et rassurant de nier tout ça au nom de la baise, que souvent nous ne réussissons pas à réaliser parce « l'autre ne veut pas ». C'est toujours la faute à l'autre, jamais à nous-mêmes. C'est très commode de penser ainsi. On n'y est pour rien, ce sont les autres qui n'ont pas compris ou « ne sont pas gentils ». Ouf ! Prenons vite la fuite et cachons-nous pour ne rien voir.

Basile, philosophe naïf, Paris le 26 juillet 2017

mardi 25 juillet 2017

828 La carence tactile source d'une terreur non domiciliée

Avant notre naissance nous baignons dans un univers tactile et phonique : l'intérieur de la femme qui nous porte. Nous partageons sa chaleur et entendons le bruit régulier et rassurant de son cœur. Si nous avons un jumeau ou une jumelle c'est encore plus tactile. Les jumeaux ou jumelles se tiennent étroitement compagnie, nus, se touchant et serrant l'un contre l'autre, durant des semaines et des mois. Ils ne l'oublieront jamais complètement.

Petits, nous sommes hyper-communicants : as de la peinture, de la danse et du rythme, du chant, de la poésie et surtout du toucher et des câlins. Toute cette créativité passera au broyeur de la Civilisation vers l'âge de quatre ans environ. Ce sera le sevrage tactile, la liquidation de notre créativité poétique, vocale, chorégraphique et picturale. Quand plus tard nous chercherons à renouer avec le toucher, nous serons incapables, ignorants, analphabètes tactiles. Et intoxiqués par le bourrage de crâne sexuel de notre société, qui prétend abusivement asservir les caresses au coït.

Regardez bien la photo des grands criminels, qu'ils soient « de droit commun », « politiques », « financiers », « économiques » ou « militaires ». Ce sont presque tous des hommes et pas des femmes. Ils manquent tragiquement de caresses. Alors ils compensent en commettant des crimes.

L'oubli de notre prospérité tactile intra-utérine et ensuite enfantine, l'oubli du sevrage tactile et de la liquidation de notre créativité poétique, vocale, chorégraphique et picturale suscitera en nous un trouble et une terreur d'origine inconnue. Elle sera « non domiciliée ». Nous chercherons à lui trouver une domiciliation. Attribuer à cette terreur une origine claire. Qui ne sera pas la bonne.

Subitement un problème habituel va vous tarauder. Derrière ce problème devenu envahissant se cachera en fait la carence tactile, niée, ignorée et bien présente.

Que de conduites absurdes cette peur non domiciliée à son véritable domicile, sa véritable origine, va entraîner ! On verra, par exemple, des gens riches avoir peur sans raison de devenir pauvres et s'accrocher à leur argent comme si leur vie en dépendait. Ils deviendront avides et avares.

Quand j'ai effectué un stage d'un week-end de massages en 1986, après quelques heures de massages partagés, j'ai pu observer des changements ou des révélations de comportements dont le souvenir m'est resté. Notre groupe était composé de trois hommes dont un gay et six femmes, si je me souviens bien. On devait dormir sur place. Ça se passait dans un grand appartement parisien. Le premier soir l'homme qui était gay, prétextant une obligation, nous a quitté pour dormir ailleurs. Au moment de son départ, l'un de nous a esquissé le geste de lui tendre la main. Puis s'est arrêté et tout le monde a rit. Il apparaissait évident à chacun de nous qu'on ne saurait quitter cet homme autrement qu'en l'embrassant. Dans notre groupe se trouvait une très grande et belle jeune fille blonde aux yeux bleus. Elle avait dix-sept ans. Elle était donc mineure. Ce qui a suscité au début du stage la grimace de la dame qui l'organisait. J'avais sympathisé avec cette jeune fille. Et à plusieurs reprises il nous arrivait de nous rejoindre face à face et puis nous serrer dans les bras l'un l'autre. Il n'y avait rien de « sexuel » dans notre geste. Pourtant nous étions nus durant les séances de massages. C'était juste et spontanément vécu comme des simples câlins très agréables. De la pure tactilité. Durant les deux semaines qui ont suivi le stage, j'ai spontanément perdu tout intérêt pour la pornographie et la masturbation. Bizarrement mes érections étaient devenues ligneuses, elles n'avaient jamais été aussi dures. On aurait dit du bois. Ce phénomène a duré aussi deux semaines, puis a disparu. Je n'ai pas su poursuivre l'expérience de ce stage de manière pratique à l'extérieur. Car j'avais les préjugés de mon époque, je croyais à l'existence du « sexuel ». Qu'il existait une zone de la communication entre humains adultes qui implique automatiquement la recherche du coït.

Basile, philosophe naïf, Paris le 25 juillet 2017

lundi 24 juillet 2017

827 Le grand meuble en bois et la promenade le long du canal de l'Ourq

Dans les années 1980 j'ai eu à un moment-donné une petite amie. Sexuellement ça a toujours été très nul. Ce qui était, je le comprend bien à présent, tout à fait inévitable, car nous avons suivi la pensée unique sexuelle régnante. Nous cherchions à trouver le bonheur dans la gymnastique patriarcale réglementaire dont le but suprême est le mélange d'humeurs diverses d'origine féminine ou masculine. Mélange recherché et obtenu indépendamment d'un quelconque vrai désir réciproque.

Les deux moments les plus beaux que nous avons vécus n'étaient largement pas « sexuels ». L'un, c'était quand, très bricoleuse, cette dame construisait une grand meuble avec du bois de récupération. Je l'observais et parlais avec elle, assis sur un petit escalier. L'autre moment fut une balade à vélos par une belle journée ensoleillée le long du chemin de halage du canal de l'Ourq.

Si je n'avais pas été infecté par la pensée unique sexuelle régnante, je me serais moins polarisé sur la gymnastique décevante dont la perfection, imaginaire, rêvée et absente, me manquait. Un peu comme un convive insatisfait qui, à un banquet, est incapable d'apprécier les plats servis. Même délicieux, il leur manque toujours quelque chose qui en fait n'existe pas.

Ce mythe du bonheur en fait introuvable, n'est pas le seul qui hante les relations difficiles entre l'homme macho et la femme victime du machisme.

Il existe par exemple toute une mythologie prétendant que quand elle a cédé au jeune homme, la jeune fille qui d'abord ne voulait pas, trouve son pied avec le jeune homme. La jeune fille est en fait généralement déçue et ennuyée. Un acte forcé n'est pas agréable à vivre.

Une dame que j'ai connu, qui avait épousé son mari vers 1944, me disait que commentant la prestation sexuelle de leur mari, elle et ses copines disaient toutes : « à chaque fois j'attends qu'il ait fini sa petite affaire pour aller me laver. » Une amie me racontait que sa mère, dans les années 1960-1970, à chaque fois que son mari l'honorait, angoissait. Elle se levait tout de suite après en catastrophe et s'envoyait avec la pomme de douche un jet d'eau glacée dans le vagin, espérant ainsi éviter de tomber enceinte. Le mari, que j'ai connu, paraissait un brave homme. L'imaginer allongé paisiblement sous les draps cependant que sa femme procédait ainsi, m'a laissé songeur.

Le cinéma à l'occasion cautionne la fable de la jouissance automatique de la jeune fille qui cède aux attentes sexuelles du jeune homme. Je me souviens d'un film de Jean Renoir où une jeune fille emmenée dans les bois par un jeune cavaleur qu'elle ne connaît pas, lui résiste quand il l'assaille. Puis tombe dans ses bras. Et bien des années après, mariée à un triste et quelconque bellâtre, croisant le jeune homme qui l'a violé, appelons les choses par leur nom, lui dit : « j'en rêve tous les soirs. » Dans un film comique sorti au milieu des années 1960, on voyait un jeune homme sautant en parachute avec une jeune fille. Aboutir ensemble à terre sous le parachute. La jeune fille protestait, puis protestait de moins en moins. Enfin la toile relevée par les deux jeunes gens, ils échangeaient un sourire radieux et complice. Message évident : « si une fille vous résiste, sautez-lui dessus, elle n'attend que ça. » Et, bien patriarcalisé, la salle et moi trouvions ça normal et amusant... 

Voilà comment, à travers chef d’œuvres ou films de distractions, le cinéma distille le poison patriarcal. Même dans les livres pour enfants, les publicités les plus anodines, les chansons sentimentales, partout, partout, partout, on vous met dedans. Quand je me retrouve en compagnie d'une dame avec laquelle j'ai l'air de m'entendre, aux yeux de l'entourage, nous voilà mariés. Si je parle agréablement avec une jolie fille, on dira que je drague. Avant, j'éprouvais l'envie de protester. À présent je ne dirai plus rien. Tant pis si on dira et croira que je suis en couple ou que je drague.

Basile, philosophe naïf, Paris le 24 juillet 2017

826 La « pensée unique sexuelle »

Une jeune fille peut très bien prendre le parti d'être léchée, sucée et doigtée par un jeune homme et y trouver de la détente et du plaisir. Sans pour autant avoir envie de « faire l'amour », c'est à dire de recevoir un pénis en érection dans le vagin. En léchant, suçant et doigtant la jeune fille, le jeune homme peut très bien prendre son plaisir et bander sans pour autant avoir envie de faire l'amour avec la jeune fille. Mais la jeune fille va se dire : « si j'ai envie d'être léchée, sucée et doigtée par ce jeune homme et y prend du plaisir, c'est que j'ai envie de faire l'amour avec lui ». Elle se dira aussi : « si ce jeune homme me lèche, suce , doigte, y prend du plaisir et bande, c'est qu'il a envie de faire l'amour avec moi. » Et le jeune homme se dira : « si cette jeune fille accepte avec plaisir d'être léchée, sucée et doigtée par moi, c'est qu'elle a envie de faire l'amour avec moi. » Il se dira aussi : « si je bande, c'est que j'ai envie de faire l'amour avec elle, et me voir ainsi lui donne envie aussi. »

D'autres idées pourront venir renforcer cette conviction erronée : « de quoi aurais-je l'air à présent si je dis non. » « Il faut bien en passer par là, ça fait partie de la relation. » « À la longue on se connaîtra mieux et ça se passera mieux. » « Il faut s'accorder sexuellement. » « Nous sommes amoureux, c'est normal de faire l'amour ensemble. » « Comme nous voulons avoir des enfants, ce serait très mal venu de refuser à présent. » « Si je dis non, il va aller voir ailleurs. » « Il est tellement gentil que je ne peux pas lui refuser ça ». « Quand il va me pénétrer avec son pénis, je vais pousser des cris comme si je jouissais, comme ça il finira plus vite et on pourra passer à autre chose : se laver et dormir dans ses bras qui sont si doux », « si je continue à manquer de désir, j'irais consulter un spécialiste », etc. Tout un tas d'affirmations allant toutes dans le même sens : il faut y aller.

Alors, on y va. On met le zizi dans la zezette, on secoue. Le résultat est nul. Mais chacun des deux jeunes gens se dit : « ce n'était pas si mal. Je n'ai pas senti grand chose, mais l'autre a joui. Ce sera mieux une autre fois. » « C'est bien de faire plaisir à l'autre ». « Ça ne peut pas être parfait tous les jours ». Et ainsi on va se plier à l'ordre moral sexuel machiste dominant, à la pensée unique sexuelle. Qui n'est rien d'autre que le devoir conjugal d'antan repeint avec de jolies couleurs factices qui ont prétendument noms : liberté et épanouissement sexuel.

Durant une période plus ou moins longue les deux jeunes gens continueront à pratiquer régulièrement un pseudo acte sexuel qui est le fruit d'un malentendu. Et qui est, au plan « physique », au mieux une double masturbation combinée baptisée abusivement « relation sexuelle ». Puis, l'un des deux, sans analyser forcément trop le malentendu, ne le supportera plus et ce sera la rupture.

Loin de les aider, livres, articles de journaux ou revues, émissions de radio ou télévisions, sites Internet et « spécialistes » autoproclamés enfonceront un peu plus les deux jeunes. Ceux-ci vont être abusé par tout un jargon pseudo scientifique destiné à leur fourguer la pensée unique sexuelle. Si on remarque qu'il n'y a pas de désir, au lieu d'en prendre acte et analyser la situation, on décrétera qu'il y a « panne de désir », « problèmes dus à la routine », « dysfonctionnement érectile », etc.

L'essentiel contenu dans ces discours est qu'il n'existe pas d'autre voie que se conformer aux diktats de la sexualité officielle machiste régnante. Sexualité officielle machiste régnante qui affirme que le but de « la sexualité », voire de la vie-même est l'éjaculation du monsieur dans la dame.

Le plus souvent le jeune homme se fait le transmetteur de la sexualité officielle. Normal, cette idéologie le présente en vainqueur. Les jeunes filles étant moins enthousiastes en moyenne pour « passer à la casserole », on dira qu'elles « cèdent ». Que l'homme propose et la femme dispose. Mais la pression machiste dominante sera terrible et s'exercera d'abord sur et contre les femmes.

Basile, philosophe naïf, Paris le 24 juillet 2017

dimanche 23 juillet 2017

825 Le continent disparu et retrouvé de la tactilité

Le manque tactile aigu est la base du malheur humain. Après la rupture du contact avec la mère, lors de la naissance, le petit humain est sans cesse cajolé, touché, câliné, si tout se passe au mieux. Pour son malheur, vers l'âge de quatre ans environ survient le très violent sevrage tactile. De celui-ci les êtres humains généralement ne se relèvent jamais, sauf de très rares cas. Ils sont brisés physiquement et moralement. Et quand ils chercheront à nouveau le contact perdu, ce sera à travers la caricature de ce qui sera présenté comme « la sexualité », et qui est très souvent un pâle reflet et une caricature du toucher. Ne serait-ce qu'en considérant la surface de peau concernée par nombre de prétendus « rapports sexuels » en comparaison de la surface de peau concernée par des rapports tactiles effectifs. Les premiers concerneront juste quelques zones réduites abusivement baptisées « zones érogènes ». Les seconds concerneront de très larges zones épidermiques. J'ai l'habitude de résumer en disant : « vingt centimètres carrés d'un côté, deux mètres carrés de l'autre. » C'est abrupt, mais ça dit bien ce que ça veut dire.

Le silence tactile est la source de nombreux troubles divers, comportementaux ou de santé. L'être humain en grave carence tactile réagira à ce manque de multiples façons : obsession du matériel, de se sentir « posséder » des choses, crises de peur panique de la mort survenant de temps en temps par périodes de par exemple une semaine, obsession de l'autre sexe, hostilité à son égard, peur des autres, violence, addictions diverses : alcool, cigarette, drogues, tranquillisants, comportements superstitieux ou sectaires, spiritualité excessive et perte du contact avec la réalité, pathologies diverses et pas seulement « psy », anorexie, boulimie, fatigue, sentiment d'ennui, d'isolement, d'inutilité, d'abandon, soucis de santé dit « psychosomatiques », etc.

La tactilité est comme un immense continent disparu à l'intérieur de chacun de nous. Comment la retrouver ? J'ai suggéré des thérapies simples passant par le toucher neutre et rassurant. L'idée n'a pas paru plaire à une personne avec laquelle j'ai discuté. Elle a connu des agressions physiques, auraient besoin d'un traitement pour s'en remettre, mais le refuse en déclarant le remettre « à plus tard ». La peur issue des agressions vécues a générée en elle une peur de la peur. Elle ne veut pas tenter une thérapie pacifique qui la confronterait à sa peur. Thérapie qui peut être interrompue à chaque instant sur simple demande et sans justificatif.

Pour surmonter ici la peur, il faudra sans doute banaliser le traitement permettant la réintroduction de la tactilité. Moins évoquer les réparations des blessures de l'âme à opérer après des drames vécus, mais simplement évoquer une amélioration de vie possible pour tous. Les personnes blessées moralement et – ou – physiquement au cours de leur vie viendront forcément avec les autres profiter de la réintroduction dans la tactilité.

La tâche est immense et à portée de doigts. Elle permettra de redécouvrir ou découvrir bien mieux la Nature en l'homme. Et aussi de débrouiller la confusion tactile sexuel. Si le sexuel existe, il n'en demeure pas moins que sa zone de référence est très réduite. Il existe une tactilité qui a une place bien plus importante dans la vie des humains, bien qu'elle soit niée, ignorée, déformée. Il n'est pas rare de voir confondu le tactile avec le sexuel et lui attribuer cette qualité. Un exemple parmi d'autres est représenté par la prétention de proclamer « sexuel » la satisfaction de la tétée chez les bébés. Celui qui a affiché cette opinion conservant encore un très grand prestige auprès d'un très grand nombre de gens en qualité de spécialiste de l'être humain.

La redécouverte de la tactilité mettra des années, mais elle est belle, agréable, passionnante et quelquefois surprenante. Elle remet beaucoup de choses à leur juste place et nous offre une vision clarifiée des choses et des gens.

Basile, philosophe naïf, Paris le 23 juillet 2017

824 Il est possible d'observer et analyser, mais pas de juger

Récemment, étant énervée pas par moi, mais ayant besoin de passer sa colère sur quelqu'un, une amie a pris avec moi un ton agressif, injuste et sentencieux. Sentant que l'échange devenait à sens unique, tournait au vinaigre et risquait d’entraîner énervements réciproques et affrontement verbal, j'ai vite clos la conversation. Ce bref incident dont mon amie s'est expliquée par la suite, s'inquiétant de savoir si elle m'avait blessé, m'a éclairé sur un important aspect de ma manière de réagir aux gens et aux choses. Si l'attitude de mon amie m'avait ici dérangée, c'était parce qu'elle me jugeait.

Sans le réaliser, j'ai fini par développer depuis un certain temps un mode de réaction consistant éventuellement à définir et caractériser personnes et situations, mais sans prononcer de jugements. Exemple : si je caractérise quelqu'un qui vole comme un voleur, c'est juste une caractérisation. Je ne le condamne pas, tout en évitant autant que possible d'en souffrir. Un individu carrément dangereux, je souhaiterais sa neutralisation, y participerait éventuellement, mais ne le jugerais pas.

De même s'agissant de moi-même ; si par exemple j'évite de faire quelque chose par peur, je ne me dirais pas : « quel imbécile je suis ! J'ai peur ! » Je me dirais simplement : « je ne fais pas ça parce que j'ai peur. » Et connaissons-nous tous les tenants et aboutissants à l'origine du comportement humain de soi-même et des autres ? Bien sûr que non. Alors à quelle compétence prétendrions-nous pour condamner qui que ce soit ? Surtout que bien souvent les individus qui agissent ne connaissent pas leurs propres motivations. Il leur arrive même souvent d'agir en sens contraire de leurs intérêts. Il existe aussi plusieurs façons de lire le contenu du même événement.

Une photo va illustrer les vainqueurs d'une bataille dans la guerre des X contre les Y. On pourrait commenter le visage hilare des vainqueurs du point de vue des enjeux du conflit. On peut aussi faire remarquer que ceux qui pavoisent sur la photo sont tous des hommes ! Les affrontements guerriers quelles qu'en soient leur nature sont toujours l'expression d'un problème de testostérone...

Une campagne électorale voit des partis s'opposer. On peut considérer les positions opposées... On peut aussi remarquer que les différents chefs qui s'affrontent ont tous au fond la même motivation : s'emparer et jouir du pouvoir pour tenter de se dérober à la trouille affreuse de leur mort inévitable.

Une femme vous déclare « être en couple ». Vous pouvez croire avoir reçu une information précise, alors qu'il n'en est rien. Ça peut y compris être juste une feinte pour dire : « pas touche ! Je suis prise ! » et éviter ainsi de se faire courtiser, ou alors au contraire chercher à susciter votre jalousie.

Savoir au fond des choses ce que vivent les gens est impossible. Alors, restons humbles et ne nous avisons pas de prétendre définir précisément les gens. Au nom de quoi aurions-nous cette capacité ? Regardons le spectacle du monde, caractérisons plus ou moins les acteurs, analysons plus ou moins les situations, mais ne jugeons pas. Ce serait une erreur et ce n'est ni notre rôle ni notre compétence. Et en se passant de faire le juge la vie devient soudain nettement plus supportable.

Nous pouvons éviter une personne dangereuse pour notre tranquillité, nous en éloigner, la fuir, sans pour autant nous infliger le port du poids d'un tribunal accusateur et dénonciateur qui va prononcer des condamnations de nous et – ou – des autres. L'autre jour, sur le ton de la conversation badine trois personnes parlaient des internements psychiatriques. Elles étaient assises près de moi dans une sorte de restaurant. J'ai connu une personne malade et hospitalisée régulièrement en psychiatrie. Cette conversation m'était désagréable à entendre. J'ai changé de place et me suis éloigné. Sans pour autant expliquer quoi que ce soit à ceux qui me dérangeaient. A quoi bon ? Et ainsi ne pensant plus à eux j'ai rétabli ma tranquillité. Sans juger qui que ce soit.

Basile, philosophe naïf, Paris le 22 juillet 2017

jeudi 20 juillet 2017

823 Défense de dire « je t'aime »

Jadis en France, « faire l'amour » signifiait : « faire la cour ». « Être en goguette » signifiait : « être en caresses avec une femme ». « Embrasser » signifiait : « serrer dans ses bras ». « Baiser » signifiait probablement : « donner un bisou ».

Le sens donné à ces mots a bien changé, et d'autres aussi. Surtout pour ces mots : « je t'aime » ou « je vous aime ».

Au dix-huitième siècle, quand on éprouvait simplement de l'amour pour quelqu’un, homme ou femme, on pouvait lui dire et on lui disait sans problème ou hésitation : « je t'aime » ou « je vous aime ». Aujourd'hui ces mots ont acquis une connotation sexuelle implicative.

C'est une véritable catastrophe sémantique que personne à ma connaissance n'a jusqu'à présent relevé.

En France aujourd'hui il est de facto interdit de dire à quelqu'un qu'on l'aime. Ou alors on peut le dire si on exprime aussi par là le fait qu'on couche avec cette personne ou qu'on souhaite, demande ou envisage de le faire...

Cette situation est insupportable.

Elle peut changer.

Dans les années 1960, par exemple, avec la vague de la chanson yé yé est apparu l'usage du qualificatif « terrible » pour dire simplement qu'on admirait un auteur ou une œuvre. La mot « terrible » a perdu très largement son sens original très fort et négatif.

Il est possible et souhaitable de rendre aux mots « je t'aime » ou « je vous aime » leur sens neutre original.

Ce qui rendrait à la langue française une de ses plus belles et riches expressions.

Je pose la question : « s'il est la plupart du temps interdit de facto de dire je t'aime, comment voulez-vous que l'amour se porte bien ? » 

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 juillet 2017


mercredi 19 juillet 2017

822 Oublions l'art de nous rendre malheureux ainsi que les autres...

J'ai l'habitude de dire : « quantité de personnes font de très grands efforts pour se rendre malheureux, et leurs efforts sont récompensés ! » C'est notamment le cas de la manière classique suivante :

On se sent souffrir de la solitude. Alors on envisage comme réponse à sa détresse de trouver une personne qui vous comblera en tout : par sa présence, ses câlins, son activité sexuelle, éventuellement si on est en âge de « fonder une famille » : par ses qualités reproductives et éducatives des enfants, par la reconnaissance sociale et le soutien matériel. En résumé : la couple parfait qui est en amour l'équivalent de la pizza complète à la pizzeria. Celle où il y a tout : de la purée de tomates, plusieurs fromages, des champignons, des olives, des anchois, du jambon, etc.

De tels couples dits « parfaits » existent. J'en ai rencontré et en connais au moins trois, un à Paris et deux en banlieue : ils s'entendent à merveille, sont beaux, vivent ensemble, n'ont pas l'air de s'ennuyer, ont de superbes enfants, sont mariés, etc. J'en ai aussi certainement croisé d'autres sans les identifier. Mais, à côté de ces réussites, combien de bricolages sordides ressemblant y compris parfois à une espèce de prostitution ? « Je te donne le loisir de m'utiliser sexuellement. Et en échange nous vivons ensemble et payons ensemble les factures communes. » C'est presque ça.

À force de ne chercher que des pizzas complètes on passe à côté de bien des choses. Mais certains ne se posent pas trop de questions. On est jeune et beau ou jeune et belle. On se trouve un ou une partenaire équivalent. On fait tout comme si ça collait bien. Quand ça ne colle vraiment plus on se sépare. Et on trouve un ou une partenaire de remplacement. Ça fonctionne très bien ainsi tant qu'on est considéré comme « jeune ». Après, ça devient amère. Les nouvelles générations de jeunes vous font une concurrence invincible... Alors, on reste seul, ou on se contente « des restes », comme ils disent. Soit d'une compagne ou un compagnon déjà comme vous un peu décrépit. Comme le commentait tristement une femme ex vedette de cinéma jadis célèbre comme « sexe symbole » : « on a un cœur toujours jeune et il y a tout qui pendouille... » Je cite de mémoire, mais le sens y est.

À écouter certains, l'essentiel serait de ne pas réfléchir et être « spontané ». On est seul, on se sent seul ? C'est la faute à l'autre, au sexe opposé, à « pas de chance ». Ce n'est jamais le produit aussi de vos responsabilités, vos actes, vos intentions. Comme on veut tout tout de suite, on rejette tout ce qui ne ressemble pas à la perspective de la dégustation de la fameuse pizza complète tant espérée.

Quand je sors mon discours sur les câlins et la relation tactile, j'ai l'impression d'être un Martien. Ceux qui m'entourent ont leurs idées arrêtées sur « le sexe » à pratiquer et « le couple » à chercher à former. Améliorer nos relations en général entre individus bien informés et de bonne volonté revient pour eux à vouloir apprendre à un canard à courir un cent mètres. Une idée belle, absurde et irréalisable.

La confusion relationnelle générale durera tant qu'on cherchera à rencontrer « la bonne personne » et personne d'autre. Tant qu'on évitera de jeter un regard critique sur le comportement humain en amour. Non, il n'existe pas une fatalité qui nous condamnerait éternellement à continuer à souffrir et rêver. On peut sortir des vieilles équations et aller ailleurs, plus sûr, plus sensé, plus heureux, plus libre et surtout respectueux de soi-même et des autres.

Le temps de la caricature amoureuse est révolu. Cessons de croire au bonheur. Construisons-le avec les matériaux et les outils dont nous disposons. Laissons la « perfection » empêcher de dormir les rêveurs et satisfaisons-nous d'admirer la perfection de ce qui est. 

Basile, philosophe naïf, Paris le 19 juillet 2017

mardi 18 juillet 2017

821 Fantasmes

J'ai un souvenir très précis qui doit remonter à quand j'avais deux ou trois ans, sinon guère plus. J'étais très petit et admirais grandement mon père à propos de la chose suivante : quand nous allions à la gare, tout la haut au dessus de moi il parlait avec quelqu'un au guichet. Quelqu'un que je ne voyais pas mais dont je devinais la présence. Grâce à ces paroles, mon père obtenait facilement « un billet ». Je n'avais pas la moindre idée de ce que c'était. Mais savais que grâce à ça, peu après, nous nous retrouvions dans le train qui démarrait peu après. Mon père était extraordinaire ! Il faisait quelque chose qu'il savait faire et à chaque fois grâce à lui nous pouvions monter dans le train ! J'ignorais à l'époque l'existence d'une chose qu'on appelle « l'argent ». Et la première fois qu'on m'a montré « un billet », j'ai été plutôt déçu. C'était une petite chose rectangulaire et plate assez moche.

C'est notamment avec le souvenir de telles admirations enfantines que bien plus tard nous bâtirons dans notre tête la statue vivante de « la femme idéale, qui va nous faire connaître, et elle seule, le bonheur parfait. » La femme idéale, de même que l'homme idéal, par définition n'existe pas. Le bonheur parfait également n'existe pas. Comment des humains imparfaits pourraient, qui plus est à deux, créer quelque chose de parfait ? Mais on y croit souvent, parce qu'on a envie d'y croire. Qu'est-ce que ce serait triste si le Père Noël et le Prince Charmant n'existaient pas !

Le Bonheur parfait en amour, j'ai cru y goûter trois fois. De ces brefs instants j'ai fait le modèle de ce que je cherchais. Une fois allongé habillé sur mon lit, l'objet de mon amour également habillé allongé sur moi. Nous avons passé ainsi un quart d'heure peut-être. J'ai juste un peu caressé un sein de ladite demoiselle. Et me suis senti à cette occasion extraordinairement bien. J'en ai conclu que j'avais là goûté à cet amour tant recherché. Sauf qu'en fait pour des raisons que j'ignore, je m'étais à cette occasion juste envoyé un fort et vigoureux shoot d'endorphines.

Le même phénomène m'était arrivé en rêvant à une autre demoiselle sur laquelle je fantasmais, l'imaginant être mon amour. C'était plutôt mon illusion.

Une troisième occasion plus « sexe » où j'avais pu m'administrer une bonne dose de drogue naturelle auto-produite. Et voilà le décor planté pour m'imaginer avoir effleuré le continent magique où nous devrons essayer tous de parvenir un jour.

Les fantasmes amoureux sont comme des esquisses crayonnées sur une toile épaisse qui a nom la frustration tactile. Privé de caresses et de toucher en général à partir du sevrage tactile enfantin, nous imaginons un bien-être abusivement assimilé à l'acte sexuel. Si à un affamé on fait croire que se nourrir passe par l'acte sexuel, il va y rêver. S'il réalise que ce sont deux choses différentes et d'importances différentes, il va arrêter de se focaliser sur le sexe.

Mais ce ne sera pas le cas de son entourage, qui continuera à attribuer une importance démesurée à cette petite sexualité. Et ignorer le grandiose toucher.

Le débat sur la question sera généralement verrouillé par « la pudeur ». On va ainsi s'opposer à la liberté d'expression. J'ai vu une amie s'offusquer de ce que j'aborde « des sujets intimes », c'est à dire sexuels. Cependant qu'elle ne s'est pas gêné pour m'annoncer que dorénavant « elle sort avec untel ». Ce qui signifie qu'elle couche avec. C'est un propos admis comme « correct ». Mais par contre disserter sur la masturbation, quelle horreur ! Surtout si c'est pour l'analyser et pas se contenter d'être « pour » ou « contre ». On prétend souvent que c'est la seule question qui se pose dans le domaine sexuel : être pour ou contre. Mais ce qui importe plus c'est savoir ce que nous voulons et ce dont nous avons besoin. Et ignorer les rêves qui nous égarent et abrutissent.

Basile, philosophe naïf, Paris le 18 juillet 2017

lundi 17 juillet 2017

820 La source du désaccord homme-femme

Soit la rencontre entre deux jeunes gens qui s'apprécient. Le jeune homme souhaiterait prendre la jeune fille dans ses bras. La jeune fille aimerait bien que le jeune homme la prenne dans ses bras. Mais ils ne le feront pas, pourquoi ? Parce que le jeune homme se dit que son geste implique dans de brefs délais de passer « aux choses sérieuses », entendez par là très prosaïquement au coït. Et il sent bien que cet acte n'est pas à l'ordre du jour. La jeune fille se dit que si elle accueille favorablement les bras du jeune homme, elle sera sensée dans de brefs délais passer au coït. Et, dans le fond, elle n'en a pas envie. Alors il ne se passera rien. Faire des câlins à un humain ami apparaît moins évident pour un humain que caresser un chat, un chien ou un cheval qu'il ne connaît pas.

Quelle est l'origine, la source de cette mésentente homme-femme ? Il est dans l'homme. Et il commence très jeune. Pour l'illustrer, prenons un cas vécu. Un jeune homme, vers l'âge de douze-treize ans découvre la masturbation masculine adulte, c'est à dire comprenant l'éjaculation. Il se retrouve la pratiquant au moins une fois par jour. Et remarque que certains jours qu'ils passent particulièrement agréablement avec des amis à bavarder, rire, rien de particulièrement « sexuel », il oublie carrément et tout simplement son activité quotidienne. Il ressort deux faits intéressants de cette expérience. D'une part cette activité ne compense pas une relation sexuelle partagée. Aucun animal n'éprouve le besoin de s’accoupler ainsi trois cent soixante cinq fois par an. D'autre part, l'oubli de cette activité à l'occasion de journées affectivement bien remplies indique une piste.

La masturbation masculine adulte, la plupart du temps, ne compense pas un manque « sexuel », mais un manque affectif. Et quel manque ? Le manque tactile, produit du sevrage tactile subi vers l'âge de trois-quatre ans. Revenons à nos deux jeunes gens hésitants qui n'osent pas finalement se prendre dans les bras. En fait, ils souffrent du manque tactile. Leur désir d'étreinte est tactile et n'est pas l’expression d'un besoin sexuel de coït. Mais dans leurs têtes il y a confusion. Ils en restent désemparés et renoncent à suivre leur envie. Cette confusion vient d'abord du côté masculin.

Et cette confusion est générale. Vers l'âge de douze-treize ans, les garçons découvrent et commencent à pratiquer régulièrement la masturbation masculine adulte. Ils compensent ainsi leur faim tactile. Mais ils vivent également le shoot endorphinien survenant lors de leur éjaculation comme une drogue. D'où par exemple la pratique quotidienne de la « prise » de cette drogue. Abusés par la mal éducation et l'analphabétisme tactile régnants, les garçons s'imagineront manquer de « sexe ». Divers éléments leur donneront cette illusion. Ils manquent aussi de sexe, mais beaucoup moins proportionnellement que de tactilité. Mais ça, personne ne va le leur expliquer.

Ils vont étendre leur pratique masturbationnelle en remplaçant à l'occasion leur main par un orifice naturel d'un tiers. Ce faisant ils croiront « faire l'amour » et vont ennuyer le tiers en question. Ils vont très souvent le harceler et même quelquefois hélas le violer.

Toute la source du malentendu est là. Privés de tactilité les garçons souffrent de faim tactile. La compensent avec la masturbation. Confondent celle-ci avec un besoin de « faire l'amour », qui n'est finalement très souvent qu'une masturbation à l'intérieur de quelqu'un d'autre.

Quand après une rupture j'analysais les bons moments vécus, il m'est arrivé plus d'une fois de regretter plus les câlins que les pseudo actes sexuels qui n'en étaient pas. Ce que j'ai mis bien longtemps à comprendre et réaliser. L'amour est une chose simple, à condition de le respecter et ne pas faire n'importe quoi comme à peu près tout le monde. Il y en a qui ont compris, qui comprennent, qui agissent intelligemment et s'en ressentent agréablement. Mais ils ne sont pas, loin de là, les plus nombreux. Ça dépend de nous, de nos efforts si nous voulons en faire partie.

Basile, philosophe naïf, Paris le 17 juillet 2017

dimanche 16 juillet 2017

819 Négation du toucher et hypertrophie de la « sexualité »

Quand on évoque la « sexualité » chez les humains, on est frappé par la place qu'on lui trouve accordée. Elle semblerait être pour beaucoup à la base de tout ou au moins de l'essentiel. D'où vient cette abracadabrante prééminence, cette hypertrophie de la sexualité ?

La raison est un flou et une confusion. Le flou c'est l'absence de contours précis, de définition donnée à cette dite « sexualité ». Où commence-t-elle, ou finit-elle ? C'est très confus. La confusion est celle faite entre les activités purement sexuelles, c'est à dire axées sur la reproduction ou y ressemblant beaucoup, et la relation tactile en générale. Celle-ci est niée, contrariée, ignorée, méprisée, rejetée...

Mais on n'arrive pas à se débarrasser » de la sexualité ! Sauf pour de très petites minorités monacales, pour des religieux faisant vœu de chasteté. Alors le sexe se maintient présent. Il est confondu avec la relation tactile, le langage tactile, la communion tactile.

Ainsi, par exemple, dormir avec quelqu'un peut ne pas être du tout sexuel. On jouit du contact de l'autre et c'est tout. Ça peut arriver et ça arrive bien plus fréquemment qu'on le dit.

Mais allez le crier à la cantonade ! Nous dormons le plus souvent sans baiser et en sommes forts satisfaits ! Ça ne se fait pas. On se tait à ce propos. Et tout le monde se dit : « X et Y sont mariés et dorment ensemble. Ils ont l'air d'être heureux de vivre. Ça doit y aller entre eux la nuit ! » Alors que X et Y dorment simplement paisiblement l'un contre l'autre.

Le toucher est mille fois plus important que la sexualité. On parle mille fois plus de la sexualité que du toucher. Quand on parle du toucher, certains le rebaptise « sexualité », ce qui est tout à fait ridicule. Ils disent par exemple : « il arrive que le sexe se résume à des caresses. » On va ainsi nier le toucher et en faire un annexe de la sexualité. Comme ce médecin de Vienne qui qualifiait le plaisir de la tétée chez les bébés de « plaisir sexuel ».

Bien qu'ignoré souvent dans les discours et les livres, le toucher reste présent et surgit à tous moments dans la vie. On s'obstine souvent à l'ignorer. On le rebaptise massage, caresse, câlin, alors qu'il s'agit d'un langage et d'une nourriture, d’un lien entre l'affectif et le social.

Quand on découvre pleinement l'importance, la place de la tactilité, son rôle essentiel, fondamental dans la vie des humains, la sexualité diminue d'importance à toute vitesse. Et n'occupe plus qu'une place réduite, juste la sienne. On réalise alors que dans notre société depuis des temps immémoriaux, l'arbre de la sexualité cache la forêt de la tactilité. Il faut rendre sa place et sa légitimité au besoin tactile nié depuis tant de siècles par nos cultures. Cette négation paraissant liée avec l'existence du patriarcat, qui prétend réduire la femme à une créature soumise à l'homme et dominée par lui.

Comment commence notre vie ? Baigné dans le liquide amniotique, les yeux fermés, dans l'obscurité, au chaud dans le ventre d'une femme et entendant son cœur. Une intense vie tactile et auditive. Qui se poursuit au contact de la mère, de ses mains, ses seins, sa voix. Le toucher et l'audition sont notre premier refuge, instruments de communication, sources de plaisir, communion et douceur. Le toucher en général plus tard fait écho pour nous à toutes ces premières sensations de la vie. Au contact, par la tactilité nous nous sentons vivre. Si personne ne nous touche, nous dépérissons. Quand nous voulons dire qu'une chose nous émeut, nous disons qu'elle nous touche. Chassée, pourchassée, niée, la tactilité est omniprésente et réclame sa place et son rang.

Basile, philosophe naïf, Paris le 16 juillet 2017

samedi 15 juillet 2017

818 Traumatismes et espérance

Les cavaleurs de sexe masculin harcèlent les femmes qu'ils trouvent jolies. Cet harcèlement que subissent ainsi nombre de femmes classées « jolies » font qu'elles sont en permanence sur la défensive. Elles craignent d'exprimer leurs désirs, ressentis et sentiments. Même simplement de paraître jolies et séduisantes. Elles évitent souvent alors les robes, portent systématiquement des pantalons, s'habillent « baggy », c'est-à-dire « sac », et évitent de se mettre en valeur. Elles ne disent pas à leurs harceleurs qu'ils les emmerdent, mais trouvent une pirouette pour se dérober à eux. Combien de femmes au lieu de dire « non » aux avances d'un homme, vont invoquer l'existence d'un amoureux, y compris imaginaire, pour repousser l'importun ? La pleine et entière sincérité a ici du mal à frayer son chemin. Ma mère m'a raconté que quand elle était célibataire, dans les années 1920 1930, elle portait une alliance et avait fait agrandir la photo d'un acteur, prise dans un journal, qu'elle affichait chez elle et présentait comme son fiancé. Tout ceci pour qu'on lui foute la paix.

Les femmes sur la défensive permanente se retrouvent parfois sur une position exactement inverse. Suite à une très forte déception amoureuse, elles ouvrent leurs bras à tout le monde. Cet état perturbé ne dure pas. J'ai pu l'observer à deux reprises avec deux amies différentes.

La première entrepris de draguer la totalité des hommes de son entourage. J'en étais. Étant un peu amoureux d'elle je fut « cueilli » sans difficultés. Malheureusement un des heureux gagnants se révéla pas tout à fait sain. Résultat, nous goûtâmes tous collectivement à un aimable champignon nommé candida albicans, qu'il avait récolté sur une de ses nombreuses « conquêtes ». Le sympathique dermatologue vénérologue qui s'occupa de moi à cette occasion aimait bien plaisanter. Une de ses blagues en forme de devinette était : « quelle est la différence entre une femme et une pizza ? Réponse : on peut choisir une pizza sans champignons. » La seconde amie que j'ai pu observer contrariée par une forte déception amoureuse, dragua tout ce qui passait. Y compris un de ses élèves lycéens et une voisine plus âgée qu'elle. Pour je ne sais quelle raison j'échappais à sa liste. Par exception je n'en faisais peut-être pas partie.

J'ai eu le sentiment que ce genre de phénomène n'est pas exceptionnel. Il y a même des dragueurs rusés qui sont à l’affût de ce genre de situations où des jolies femmes « baissent la garde »..

J'ai pu constater un autre effet de traumatisme vécu. Une amie qui avait subit très jeune une très grave agression sexuelle, paraissait adopter à l'égard du sexe une attitude où elle se dépréciait. Acceptait des relations sommaires où on profitait d'elle, on ne la respectait pas. Elle me racontait sa vie sexuelle. Ce qui était aussi une forme d'auto-dépréciation. Elle me disait par exemple aller en boîte de nuit et faire très vite la chose, dans les toilettes avec un employé. On aurait dit que pour réduire la gravité de l'agression qu'elle avait subi, elle cherchait des situations où le sexe était juste une sorte d'activité mécanique dont l'autre profitait. S'agissant de cette activité, elle me disait ne pas y prendre plaisir. Mais alors, lui ai-je demandé, pourquoi s'y adonner ? Elle ne m'a pas répondu. Elle a même failli tourner dans des films pornos, m'a-t-elle raconté. Mais, par chance, le producteur a eu pitié d'elle et a renoncé à l'employer.

Les femmes, depuis la nuit des temps, rêvent de voir les hommes se conduire avec elles en hommes et plus en petits garçons égoïstes, capricieux, bêtes, possessifs et parfois violents. Il existe des hommes, des vrais . Ils sont rares. Ce qui ne signifie pas que tous les autres sont des voyous. Mais leur comportement est insatisfaisant. Il n'est pas complémentaire de celui des femmes, comme il devrait l'être. Alors, bien des femmes font avec ce qu'elles rencontrent, s'adaptent, font pression. Ainsi il existe des femmes qui procèdent littéralement à la castration psychologique de leur époux trop porté sur la chose. D'autres situations existent, qui sont très souvent insatisfaisantes.

Basile, philosophe naïf, Paris le 15 juillet 2017