jeudi 13 juillet 2017

814 Les dénis de viols

Nous sommes environné de victimes d'agressions sexuelles, y compris à Paris, et faisons comme si de rien n'était. On peut envisager que son voisin ou sa voisine a été cambriolé, escroqué, fait voler son portefeuille par un pickpocket ou fait dérober sa voiture par un voleur, mais pas qu'il a subi le plus répandu des crimes : le viol, l'agression sexuelle. Pourtant les indices éclatants abondent.

Une seule fois dans ma vie ma mère, il y a bien des années, j'étais déjà « grand », m'a posé cette question : « Petit, tu riais tout le temps, puis un jour ça s'est arrêté brusquement, pourquoi ? » Je n'ai pas su quoi répondre. J'avais oublié quand je riais tout le temps. Et cet arrêt, je l'ai compris bien plus tard, corresponds très certainement à la série d'agressions que j'ai subi et que j'assimile à un viol.

Si même une mère attentive n'arrive pas à identifier ce qui arrive ainsi à son enfant, on comprend que les victimes tardent souvent à s'identifier et être identifiées comme telles. Sans motifs visibles, cesser de rire tout le temps est un indice.

Une mère me décrit le comportement d'une de ses filles. Soudain elle a commencé à avoir une horreur très vive du toucher. Et s'est inquiété pour sa sécurité au point de s'entraîner intensivement à un art martial très violent. Et elle enchaîne des relations « amoureuses » décevantes avec des machos. Relations qui ne sont que des plans cul avec l'alibi de la recherche de « l'amour ». Elle se justifie auprès de sa mère en disant que pour juger un homme il faut absolument coucher avec.

Là nous avons trois symptômes témoignant de l'agression ou des agressions subies. Et la mère n'y voit rien de tel. Il faudra que j'arrive à lui ouvrir les yeux, ce qui est une tâche plutôt pénible.

Une vendeuse dans un magasin que je fréquentais il y a des années m'accueillait ainsi : une fois, extrêmement câline, l'autre froide comme un iceberg. Bien plus récemment, une jolie fille fait ma connaissance et est limite séductrice. Me propose de prendre un jour un café ensemble. Puis subitement plus rien, devient une sorte de glaçon agressif. Un jour je lui touche très légèrement l'épaule pour attirer son attention et l'effraye. Le toucher lui fait peur. Et son attitude avec moi a varié sans raison. Encore ici une victime de viol, ou de sa tentative ou d'un geste agressif apparenté.

Une dame et une jeune fille que je connais ont un caractère très dur. Par ailleurs j'ai su que l'une a été violée enfant et l'autre agressée nombre de fois à un âge plus avancé. Pour moi leur caractère est hérité de ces événements. Dans leur entourage personne ne le dit, pourtant c'est évident.

Certaines victimes combinent des élans chaleureux et tendres avec des attitudes inverses. Ou des gestuels bizarres. Une jolie fille qui a été agressée très jeune témoigne d'une sorte d'horreur de la bise, pas avec tout le monde, mais avec au moins une personne. Qui pourtant ne lui a rien fait de spécial.

Il existe des petits signes et des signes de plus grande ampleur qui témoignent très exactement de ce que c'est « cassé à l'intérieur ». Ce qui ne signifie pas que ce n'est pas réparable. À condition de chercher à le faire. Ce qui nécessite l'emploi de protocoles tactiles particuliers.

Quelquefois ces protocoles sont spontanés mais d'ampleur limitée. L'assistant d'un dentiste pose la main sur l'épaule d'une cliente soignée et angoissée et la calme aussitôt. La poignée de main chaleureuse d'un très bon et sage patron d'un petit restaurant me réconforte subitement. On a à faire ici à des échanges, partages, transmissions d'énergie par la médiation tactile. Nous avons besoin du toucher, de donner, recevoir, échanger, partager du toucher, et en sommes très souvent privés.

Basile, philosophe naïf, Paris le 13 juillet 2017

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