Quand on évoque la
« sexualité » chez les humains, on est frappé par la
place qu'on lui trouve accordée. Elle semblerait être pour beaucoup
à la base de tout ou au moins de l'essentiel. D'où vient cette
abracadabrante prééminence, cette hypertrophie de la sexualité ?
La raison est un flou et une confusion. Le flou c'est l'absence de contours précis, de définition donnée à cette dite « sexualité ». Où commence-t-elle, ou finit-elle ? C'est très confus. La confusion est celle faite entre les activités purement sexuelles, c'est à dire axées sur la reproduction ou y ressemblant beaucoup, et la relation tactile en générale. Celle-ci est niée, contrariée, ignorée, méprisée, rejetée...
La raison est un flou et une confusion. Le flou c'est l'absence de contours précis, de définition donnée à cette dite « sexualité ». Où commence-t-elle, ou finit-elle ? C'est très confus. La confusion est celle faite entre les activités purement sexuelles, c'est à dire axées sur la reproduction ou y ressemblant beaucoup, et la relation tactile en générale. Celle-ci est niée, contrariée, ignorée, méprisée, rejetée...
Mais on n'arrive pas à
se débarrasser » de la sexualité ! Sauf pour de très
petites minorités monacales, pour des religieux faisant vœu de
chasteté. Alors le sexe se maintient présent. Il est confondu avec
la relation tactile, le langage tactile, la communion tactile.
Ainsi, par exemple,
dormir avec quelqu'un peut ne pas être du tout sexuel. On jouit du
contact de l'autre et c'est tout. Ça peut arriver et ça arrive bien
plus fréquemment qu'on le dit.
Mais allez le crier à la
cantonade ! Nous dormons le plus souvent sans baiser et en
sommes forts satisfaits ! Ça ne se fait pas. On se tait à ce
propos. Et tout le monde se dit : « X et Y sont mariés et
dorment ensemble. Ils ont l'air d'être heureux de vivre. Ça doit y
aller entre eux la nuit ! » Alors que X et Y dorment
simplement paisiblement l'un contre l'autre.
Le toucher est mille fois
plus important que la sexualité. On parle mille fois plus de la
sexualité que du toucher. Quand on parle du toucher, certains le
rebaptise « sexualité », ce qui est tout à fait
ridicule. Ils disent par exemple : « il arrive que le sexe
se résume à des caresses. » On va ainsi nier le toucher et en
faire un annexe de la sexualité. Comme ce médecin de Vienne qui
qualifiait le plaisir de la tétée chez les bébés de « plaisir
sexuel ».
Bien qu'ignoré souvent
dans les discours et les livres, le toucher reste présent et surgit
à tous moments dans la vie. On s'obstine souvent à l'ignorer. On le
rebaptise massage, caresse, câlin, alors qu'il s'agit d'un langage
et d'une nourriture, d’un lien entre l'affectif et le social.
Quand on découvre
pleinement l'importance, la place de la tactilité, son rôle
essentiel, fondamental dans la vie des humains, la sexualité diminue
d'importance à toute vitesse. Et n'occupe plus qu'une place réduite,
juste la sienne. On réalise alors que dans notre société depuis
des temps immémoriaux, l'arbre de la sexualité cache la forêt de
la tactilité. Il faut rendre sa place et sa légitimité au besoin
tactile nié depuis tant de siècles par nos cultures. Cette négation
paraissant liée avec l'existence du patriarcat, qui prétend réduire
la femme à une créature soumise à l'homme et dominée par lui.
Comment commence notre vie ? Baigné dans le
liquide amniotique, les yeux fermés, dans l'obscurité, au chaud
dans le ventre d'une femme et entendant son cœur. Une intense vie
tactile et auditive. Qui se poursuit au contact de la mère, de ses
mains, ses seins, sa voix. Le toucher et l'audition sont notre
premier refuge, instruments de communication, sources de plaisir,
communion et douceur. Le toucher en général plus tard fait écho
pour nous à toutes ces premières sensations de la vie. Au contact,
par la tactilité nous nous sentons vivre. Si personne ne nous
touche, nous dépérissons. Quand nous voulons dire qu'une chose nous
émeut, nous disons qu'elle nous touche. Chassée, pourchassée,
niée, la tactilité est omniprésente et réclame sa place et son
rang.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 16 juillet 2017
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