Tous les humains à leur
naissance sortent du ventre d'une femme en passant par son sexe pour
arriver au monde. Ce lieu est donc unique et admirable. Mais qu'en
ont fait les hommes ? Un objet de jouissance honteux et « indécent »,
c'est-à-dire à cacher. La loi au Québec comprend par exemple parmi
les délits possible : « exposition des parties génitales ».
Dans les clubs naturistes une loi non écrite invite les femmes à
éviter de laisser voir leur entrecuisses. Loi qui est même étendue
aux enfants. Comme me le racontait avec indignation un naturiste qui
avait vu une fillette de quatre ans se faire engueuler par sa mère
pour avoir écarté les jambes en présence d'un petit garçon.
Chez les adultes, le sexe
serait à dissimuler car son exposition impliquerait une sorte de
« sexualité passive ». Sa seule vue possible
impliquerait une incitation publique à pratiquer l'acte sexuel, acte
intime et donc à dérober à la vue des autres. Il faudrait cacher
les organes génitaux jusque y compris même aux pratiquants de
l'acte sexuel. Selon certains codes de morale en usage notamment en
France il n'y a pas si longtemps, le coït devait être pratiqué
furtivement et dans l'obscurité complète.
Cette manière de
considérer le sexe visible comme une invite à « faire sexe »
règne toujours bel et bien. D'autant plus que la misère tactile
régnante fait que les mots manquent pour exprimer et même penser le
besoin de câlins n'impliquant pas l'acte sexuel. Quelques exemples
vécus me viennent à l'esprit. Un jour, une amie chez laquelle je
suis en visite m'invite à prendre une douche et implicitement ne pas
me rhabiller ensuite. A la sortie de sa salle de bain, je la retrouve
nue et souriante qui me dit : « j'avais envie de toi mais ne
savais pas comment le dire. » On s'est fait des câlins, sans
aller jusqu'au coït. Puis elle s'est défilée par la suite, évitant
de me voir pendant un certain temps. Motif ? Je ne l'ai compris qu'à
présent, soit des dizaines d'années plus tard. Pour moi, à
l'époque, imprégné par la morale régnante, il paraissait évident
que nous irions nécessairement par la suite jusqu'au coït. Idée
arbitraire et artificielle assimilant la possibilité « technique »
de l'acte à la nécessité de le pratiquer. Mon amie, plus à
l'écoute de ses sens ne sachant comment éviter cette extrémité
choisissant la fuite. Bel exemple d'incompréhension réciproque ! Au
cours de notre relation, cette situation s'est reproduite à deux
reprises à plusieurs années d'intervalle. Câlins réciproques et
dénudés suivis de la fuite de la demoiselle, qui m'a donné un jour
comme explication de ne pas être venu à un rendez-vous : « je
n'en avais pas envie ». D'autres fois des bisous plus appuyés
que d'habitude s'arrêtaient là sans la suite « logique »
selon la morale dominante. Si un garçon et une fille se font des
câlins, ils sont sensés baiser ensuite. Et bien non, la morale
dominante abuse et égare, mais qui s'avise à le dire à notre
époque si consciencieusement consumériste et sexualisante ?
L'aberration consumériste règne toujours, en témoigne pour moi un
exemple beaucoup plus récent.
Un matin, une jeune fille
de ma connaissance faisant semblant de dormir m'offre effectivement
l'exposition de ses parties génitales, comme dirait la loi au
Québec. Je ne donne pas suite à cette invite. S'étant par la suite
« réveillée » et rhabillée, la demoiselle ne témoigne
d'aucune déception ni frustration. Ce qui montre bien que son invite
allait au delà de son désir. Si elle avait vraiment eu envie de
coït, elle aurait été manifestement déçue. Mais comment
voulez-vous dans notre belle société hyper-sexualisée exprimer une
envie de câlins sans acte sexuel à la clef ? Les mots n'existent
pas ou guère. On a voulu faire du sexe de la femme une bombe à
retardement. Sa vue devrait impliquer certaines choses. Et bien non,
ce n'est pas du tout vrai. Il n'y a pas d'obligation. Mais voilà, la
seule opportunité pour une femme de connaître des câlins libres de
toutes complications est donnée par les petits enfants ou les
animaux de compagnie. Il n'est pas surprenant qu'une femme devenue
mère oublie souvent son compagnon au bénéfice de son enfant petit
et nettement plus authentique dans ses élans de tendresse ! Plutôt
qu'accuser « l'égoïsme » de la mère, le papa devrait
plutôt se demander qu'est-ce qui fait de lui un être si peu
attirant en comparaison d'un petit enfant !
Basile, philosophe
naïf, Paris le 28 août 2016
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