Je passais tout à
l'heure par une petite place ombragée de Paris presque entièrement
garnie des fauteuils et tables des restaurants voisins. Comme il
faisait très beau et très chaud l'abondante clientèle était
légèrement vêtue. Mon regard fut attiré par le beau dos dénudé
d'une jeune femme. Puis, plus loin, je remarquais deux jeunes femmes
assises sur un banc qu'accompagnait un très joli chien. Je demandais
à ces femmes de quelle race il était : « C'est un staff
américain », me répondit l'une des deux. « Il est très
gentil », ajouta-t-elle, m'invitant visiblement à venir le
caresser.
Ce propos me fit penser à
ce que caresser un chien inconnu est des plus facile, à condition
qu'il ne morde pas. Mais vous voyez-vous à ma place aller demander
poliment à la jeune femme inconnue au beau dos dénudé : « me
serait-il autorisé, possible de vous caresser le dos ? » Non,
bien sûr, ce serait très mal pris. Il en résulte qu'on est plus
proche des chiens inconnus que des femmes inconnues. Étonnons-nous
ensuite que notre société se porte si mal !
Allons plus loin :
pourquoi prétendre caresser une femme inconnue, ou un homme inconnu,
est-ce si peu possible ? Parce que c'est considéré comme « une
avance sexuelle ». Pourquoi donc ? Parce que l'homme est réputé
avoir « tout le temps envie ». Et, effectivement, il
semble que les hommes ont en permanence envie de baiser. Mais,
pourquoi ? Certains répondront : « parce que l'homme est fait
ainsi. » Réponse rapide et insatisfaisante. Si on disait
« l'homme a tout le temps faim » ou « tout le temps
soif », on s'empresserait d'identifier un trouble et chercher
son explication et le remède. S'agissant de baiser en permanence on
fait comme si c'était naturel. En fait, c'est un problème.
Quelle est son origine ?
La pratique régulière de la masturbation masculine à partir de
l'âge de 12-13-14 ans et ensuite tout le long de la vie est à
l'origine de ce dérèglement. Qui va empêcher le plus souvent la
nudité partagée - y compris quand il fait très chaud, - ainsi que
la plupart des contacts physiques tendres entre hommes et femmes,
notamment caresser le dos de la femme précitée.
Cette société qui
prétend au sexe en permanence conduit à la solitude et la détresse
morale et « physique ». Et à s'occuper mieux des chiens
que des humains. Il y a là un problème.
Et quand une femme
accepte les caresses d'un homme elle se trouve d'emblée confrontée
à son exigence de baiser...
Certains crétins ont
même inventé le concept de « préliminaires ».
Soi-disant caresser une femme conduirait forcément si tout se passe
bien à l'accouplement. Un imbécile que j'écoutais dernièrement
parler dans une vidéo expliquait que les caresses amenait « la
montée du désir » et finissait par la « submersion dans
la jouissance sexuelle » ! Que c'était joliment dit. Sauf que
c'est faux. Les caresses ne sont pas sensées conduire forcément à
l'acte sexuel. Et celui-ci peut se révéler mal venu et de ce fait
parfaitement ennuyeux, insipide et écœurant.
Les idiots qui ont une
tête, mais ont oublié de s'en servir, ne s'aperçoivent pas que
l'érection, la cowperisation*, et son équivalent féminin ne
signifient pas nécessairement l'envie de faire l'amour.
On le voit ici, partant
de caresser un chien ou un dos féminin on en vient à poser des
problèmes fondamentaux de société. Il y a là un très vaste
domaine relationnel entre humains qu'il faut réformer, rendre plus
riche et acceptable. Sinon, on en restera toujours à la tristesse,
les tranquillisantes et la résignation. La vie, notre vie, nos vies
pourraient être infiniment plus belles et agréables avec plus de
caresses... Quand viendra le jour où caresser une femme ou un homme
inconnu sera aussi bienvenu que caresser un chat ou un chien inconnu
?
Basile, philosophe
naïf, Paris le 23 juillet 2016
*Émission des glandes
de Cowper, d'un liquide lubrifiant que certains ont cru intelligent
de baptiser « liquide précoïtal », comme si cette
émission impliquait nécessairement le coït. Le terme
« cowperisation » est de mon invention. La cyprinisation
est son équivalent féminin.
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