Scène classique à
laquelle j'assistais tout à l'heure : un beau jeune homme
complimente une belle jeune femme en présence de tiers. Puis ajoute
: « je ne te drague pas, j'ai une copine ! » Qu'est-ce à
dire ? Si on a « une copine », ça signifie qu'on laisse
« tranquille » les autres filles, parce qu'on a son
vide-couilles personnel à domicile ? De même, dernièrement,
certains commentateurs ont déclaré, parlant d'affaires criminels où
on a vu des prêtres catholiques accusés d'agressions sexuelles sur
des enfants : « s'ils ont agressé c'est parce qu'ils ont fait
vœu de célibat. » Si on suit ce raisonnement tous les
célibataires sont des vicieux et des agresseurs d'enfants. Je ne
crois pas que ce soit vrai. Un autre propos que j'ai entendu à
propos du sexe il y a bien des années : « tout le monde fini
par trouver chaussure à son pied. » Sous-entendu : « tout
le monde baise et doit baiser. »
J'ai cru à ce message.
Durant des dizaines d'années j'ai cherché à suivre le troupeau. Et
me trouver une copine en fait sans m'en rendre clairement compte pour
faire « comme tout le monde. » J'ai finalement arrêté
cette connerie. Mais je vois bien qu'elle règne toujours autour de
moi.
Qu'est-ce qui
« m'oblige » à penser au « petit trou »
d'une femme que je trouve jolie ? Et à penser devoir y mettre ma
queue ? La Nature ? Vous en êtes sûr ?
Ce bon vieux discours
invoquant « la Nature » pour justifier tout et n'importe
quoi est à géométrie variable. Quand on démontre qu'il existe des
hommes heureux qui visiblement court moins derrière les femmes,
voire pas du tout, on s'entend répondre : « oui, mais ils ont
moins d'appétit. »
De quelle « Nature »
s'agit-il ici ? Nos vies sont-elles si naturelles que ça ?
Quand, à la nuit tombante, j'allume la lumière électrique chez moi
je trahis très largement la Nature. Quand je cuis des aliments et
les sales, je la trahis également. Quand je me lave à l'eau chaude
et au savon, quand je me chauffe, quand j'allume un feu, quand je
prend de l'aspirine contre la migraine, quand je porte des vêtements,
quand j'écris ce texte sur mon ordinateur, je suis loin, très loin
de la Nature. Alors, où est-elle, la Nature ? Et quand pouvons-nous
y faire sérieusement référence ? Elle est pourtant bien là, en
nous et autour de nous, mais sacrement contrariée par la culture
humaine.
Pour se faire une vague
idée de la Nature, observons nos cousins singes. Baisent-ils en
permanence ? La plupart non exceptés paraît-il les Bonobos.
Sommes-nous des Bonobos ? Non. Alors pourquoi invoquer précisément
les Bonobos comme référence ? Exactement comme ceux qui invoquent
les loups ou les oies pour affirmer que le couple est immuable et
naturel parce que chez ces animaux il l'est. Et puis, un autre
élément pour analyser le comportement humain est d'observer si les
humains comme ils se conduisent présentement sont satisfaits du
résultat...
S'agissant de ce que l'on
appelle « l'amour » ou « le sexe »,
d'évidence la réponse est non. La quantité énorme de gens qui se
ressentent mal dans le domaine ainsi délimité est
impressionnante. J'observais il y a peu une femme apparemment
heureuse à tous points de vue et en particulier en amour. Son
sourire inoxydable, son rire quasi permanent, son air visiblement
détendu, sauf... qu'entourée d'affection toute la soirée elle n'a
pas arrêté de fumer et picoler. Alors, heureuse ou bonheur de
façade dissimulant des fêlures bien présentes dans ce soi-disant
bonheur ? Combien de gens « heureux » sont en fait dans
le jeu, la comédie du bonheur par peur d'avouer leur mal-être ? Croire qu'il existerait
une recette du bonheur est une des plus grandes farces qui existe.
C'est comme prétendre qu'il existerait une recette juste et exacte
de vie en général. Alors que chacun de nous est différent et mène
une vie différente. L'illusion d'une recette générale et unique
est rassurante. Car elle nous fait croire qu'il suffirait de la
trouver et la suivre pour être « définitivement et
irrémédiablement » heureux.
Basile, philosophe
naïf, Paris les 5 et 6 juillet 2016
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