Une très vieille
question posée est la suivante : « si Dieu existe et est bon,
alors pourquoi le mal existe ? »
La question posée est
débattue. On utilise des concepts tels que « Dieu »,
« la vie », « le bien », « le mal »...
sans définir leur sens. On fait comme si on savait déjà
précisément ce que ces mots signifient. Alors qu'en fait on ne sait
pas ce qu'ils définissent vraiment. À partir de tels attendus, il
est facile de partir dans des raisonnements qui se perdent et des
conclusions très incertaines.
Quand les humains en
grandissant atteignent l'âge de quatre ans environ débute la
période de leur « enfance prolongée ». Elle durera au
moins une dizaine d'années environ. Quand on observe la définition
de Dieu qu'en donnent nombre d'humains, on voit transparaître la
transposition de papa et maman vus par les yeux d'un enfant. Dieu
surveille, punit ou récompense. La souffrance ne doit pas, ou ne
devrait pas exister.
Pour chercher à
comprendre d'où vient le mal, des théories ont été avancées.
L'une consiste à
affirmer que « la souffrance est bonne ». Si le négatif
devient positif, il n'y a plus que du positif.
L'autre annonce que « la
souffrance est méritée ». Pour diverses raisons, l'une étant
« le Karma ». Soi-disant, s'il nous arrive des ennuis,
nous subirions la compensation de notre inconduite dans la vie
précédente.
Cette théorie a
l'avantage de justifier y compris les malheurs frappant des petits
enfants. S'il arrive un terrible accident à un petit bébé, c'est
tout à fait normal. Ça signifie que dans sa vie précédente
c'était un gros salaud. Ce genre de théorie se double d'autres
affirmations. Personnellement je n'y souscris pas. Sans pouvoir non
plus, on se demande comment, prouver leur invalidité.
Il y a une troisième
approche qui elle me paraît beaucoup plus vraisemblable. Il
existerait une logique que nous ne voyons pas. Dieu est bon quand
même. Mais nous ne percevons pas clairement le fonctionnement du
monde.
J'ai pensé qu'en fait la
réponse pratique à la question posée est celle de l'action
limitée. Pour que ça aille bien pour nous, ça dépend, pour une
part de notre action à nous. Je vais prendre un exemple très simple
qui m'est arrivé hier matin. Je me réveille. J'ai froid, car mes
jambes sont nues sous la couette. Il faudrait que je prenne le
pantalon de pyjama qui se trouve pas loin, mais je ne sais pas où,
et l'enfile. J'ai la flemme de le faire et ne cherche pas à
m'habiller ainsi. Me rendors. Et, quand je me réveille, sens que
j'ai visiblement pris froid.
Ma responsabilité ici
était d'accepter de faire l'effort de chercher le pantalon de
pyjama. Je n'ai pas voulu le faire, résultat : j'ai pris froid.
Le monde, le froid, c'est
Dieu. La volonté de mettre mon pyjama c'est moi. Si je ne m'assume
pas, le froid est le plus fort et j'attrape froid. Cette logique
serait générale. Si on ne témoigne pas d'un minimum de bon sens et
d'efforts correspondants, les ennuis arrivent. Or, en fait, un nombre
énorme de gens ne font rien comme efforts de réflexion, d'action.
Ils se laissent vivre. Se conduisent comme un troupeau résigné et
ont des problèmes. Ce qui leur arrive est logique. Si Dieu vous dit
de mettre votre pyjama pour éviter de prendre froid. Que par paresse
vous ne faite pas et prenez froid, c'est ce qui doit arriver, sous
votre responsabilité. Dieu n'est pas là pour vous traiter comme si
vous étiez incapable de raisonner, agir, prendre des initiatives.
Vous avez aussi un rôle, votre rôle, a jouer.
S'agissant des petits
enfants, ils sont dépendants, suivent les grandes personnes. Ils ne
font rien, ni bien, ni mal. Et ont besoin des grandes personnes pour
les aider à vivre. Exactement à l'image des anticorps qu'ils
trouvent dans le lait maternel et ne sont pas encore à même de
produire eux-mêmes.
La remarque qui sera
fréquemment soulevée est : « oui, mais, il y a des gens qui
sont bons, qui font des efforts, et auxquels des ennuis arrivent
quand-même. »
Ce qui suppose que pour
des gens « bien » la vie devrait être absolument
dépourvue d'ennuis. On se demande bien pourquoi. Parce que « Dieu
est bon ». Une fois encore on perçoit ici cette conception
infantile de la relation de l'homme à Dieu. L'homme serait le petit
enfant et Dieu le papa et la maman. Et l'homme, il est doté aussi
d'une tête. Elle lui sert à quoi s'il ne s'en sert pas ?
Quantité de gens réputés
« bons » ne sont pas si « bons » que ça. Par
exemple, tout un tas d'hommes apparemment gentils sont persuadés que
violer une femme c'est très bien. Qu'ils le fassent ou non. Et
qu'ils ne le fassent pas uniquement par crainte d'avoir des ennuis.
De leur côté, en
retour, il existe une quantité de femmes qui méprisent, haïssent
les hommes. Et prennent plaisir à les faire souffrir. Ça peut
apparaître y compris dans des micro événements.
L'autre jour, je suis à table avec deux dames que je connais un peu. Nous sommes dans une sorte de restaurant où les clients débarrassent eux-mêmes leur table. Une des deux dames, à la fin du repas où nous avons déjeuné tous les trois, se lève. Ramasse son assiette et me propose d'emporter aussi la mienne. J'accepte. L'autre dame cherche une éponge au bar et nettoie la table. Puis, toutes les deux me regardent et m'agressent verbalement : « ah, on voit qu'il a été élevée par une mère ! » Sourires entendus qui signifient : « tu es un macho ». Elles ont fait très vite, l'une d'elle m'a proposé de débarrasser mon assiette avec la sienne. Et, une fois l'opération terminée, je n'ai plus moyen de nier dans les faits leurs propos sexistes. Comme je me défends en évoquant la manière dont j'ai toujours partagé les tâches domestiques quand il m'est arrivé de ne pas être seul dans la vie, une des deux dames clos aussitôt le débat : « c'est pour rire, » dit-elle. En fait, ce n'est pas pour rire. Les deux dames ont des petits airs entendus qui disent : « celui-là, c'est un salaud et un con comme les autres. Et nous l'avons bien coincé en lui en faisant la démonstration. » Moralité de l'histoire : je ne mangerais plus en leur compagnie.
L'autre jour, je suis à table avec deux dames que je connais un peu. Nous sommes dans une sorte de restaurant où les clients débarrassent eux-mêmes leur table. Une des deux dames, à la fin du repas où nous avons déjeuné tous les trois, se lève. Ramasse son assiette et me propose d'emporter aussi la mienne. J'accepte. L'autre dame cherche une éponge au bar et nettoie la table. Puis, toutes les deux me regardent et m'agressent verbalement : « ah, on voit qu'il a été élevée par une mère ! » Sourires entendus qui signifient : « tu es un macho ». Elles ont fait très vite, l'une d'elle m'a proposé de débarrasser mon assiette avec la sienne. Et, une fois l'opération terminée, je n'ai plus moyen de nier dans les faits leurs propos sexistes. Comme je me défends en évoquant la manière dont j'ai toujours partagé les tâches domestiques quand il m'est arrivé de ne pas être seul dans la vie, une des deux dames clos aussitôt le débat : « c'est pour rire, » dit-elle. En fait, ce n'est pas pour rire. Les deux dames ont des petits airs entendus qui disent : « celui-là, c'est un salaud et un con comme les autres. Et nous l'avons bien coincé en lui en faisant la démonstration. » Moralité de l'histoire : je ne mangerais plus en leur compagnie.
Le conflit homme-femme
est la base et la source de tous les conflits. C'est le premier de
tous les conflits. C'est ce conflit, où ils ont aussi très souvent leur part de responsabilité, qui peut rendre les hommes méchants.
Et également hypocrites
: je suis frappé par les déclarations d'amour de la paix et des
droits de l'homme dont, à l'occasion, se fendent d'ignobles
dictatures. Elles n'ont que le mot « civilisation » à la
bouche et font tout le contraire chez elles.
Vers le début des années
1990, je suis tombé sur le compte-rendu d'un entretien entre un
homme qui se présentait en qualité de « philosophe
catholique » et un journaliste. C'était une interview de Jean
Guitton parue dans le Figaro Magazine.
Une question que le
journaliste lui a posé m'a frappé, je la cite de mémoire : « Si
Dieu est bon, alors pourquoi la souffrance, la maladie, la mort ? »
Cette question a un
caractère au moins en partie absurde. Si on est croyant, qui plus
est, si on croit au Paradis, la mort ne doit pas être un problème,
tout au contraire ! Si l'Au-Delà existe, alors la mort est le plus
fabuleux des voyages. Mais de nombreuses traditions religieuses
l'attestent, il ne faut pas se suicider, c'est-à-dire anticiper la
date de départ. Et on a le devoir de préserver sa vie en général.
La tentation suicidaire
est une chose qui paraît parfois extrêmement bizarre. Ainsi, elle
est contagieuse. J'ai entendu rapporter le fait suivant à ce propos.
Durant la guerre d'Algérie, il arrivait parfois qu'un soldat français se suicide.
Dans ce cas-là, l'ensemble de sa chambrée était renvoyée dans ses
foyers. Car autrement il existait un risque de contagion suicidaire.
J'ai moi-même ressenti
ce phénomène étrange de contagion. J'ai assisté un jour aux
obsèques d'une jeune fille que je connaissais un peu et s'était
suicidé. Au moment des obsèques, je ressens bizarrement une
sympathie et une proximité pour l'acte commis. J'ai l'impression que
c'est finalement très sympathique de se suicider. Mais je ne vais
pas aller jusqu'à suivre ce chemin hasardeux-là. Simplement, je
note cette pensée étrange. Alors que je n'avais pas du tout de
raison de me suicider, voilà que je voyais, très brièvement, cet
acte comme quelque chose de bienvenu.
J'ai connu cet épisode
il y a environ une trentaine d'années. Un autre phénomène des plus
bizarres et redoutables est celui du suicide en lieu et place du
meurtre. C'est une histoire abracadabrantesque. Elle aide à
comprendre certains comportements sans pour autant les approuver.
Quelqu'un vit ce qu'il
croit être un parfait amour. Ça casse au bout d'un certain nombre
de mois. Il y a cru à fond. Et c'est fini. Sa fiancée
lui a donné son congé. Il accepte la réalité. Et voilà qu'un
jour il est chez elle et a soudain une envie d'être ultra-violent
contre elle ! Cette envie claire et nette le surprend. Car il n'est
pas du tout quelqu'un de violent. Il ne laisse rien paraître de son
envie inattendue. La maitrise sans peine en se disant simplement :
« je ne suis pas quelqu'un qui se conduit comme ça.. »
Et ça passe.
Seulement voilà : il a
refusé cette explosion extérieure de la violence. Elle a donc
explosé intérieurement. Et voilà qu'il se retrouve envahi par une
tentation suicidaire... qui dure un certain temps. Puis s'évapore
complètement. Le récit de cette expérience vécue m'a fait
comprendre un peu la mécanique des crimes passionnels. Leurs auteurs
sont fréquemment des personnes très calmes en temps normal. Quand
elles passent à l'acte et se retrouvent emprisonnées, ce sont
souvent des détenus modèles, parfaitement tranquilles.
La violence est une chose
absolument détestable. Elle est hélas cultivée, notamment par les
médias, qui adorent exalter la haine de l'autre. Ce dernier étant
présenté comme irrécupérable. La lecture des journaux des années
de guerre ou d'après-guerre est fort démonstrative de ce phénomène
de représentation négative. Au début des années 1920, la presse
française ne se gêne pas pour parler des « boches ».
Dans l'immédiat après-guerre, vers 1946, la presse ressasse
inlassablement les atrocités du conflit qui s'est achevé. Les
malheureux qui l'ont subit n'avaient visiblement pas le droit de
respirer un peu et profiter enfin de la vie en paix !
Par exemple en faisant la
fête. La fête, c'est super important. Les étudiants parisiens, les
forts des Halles et les grands journaux parisiens organisèrent un
important cortège de Carnaval le jeudi de la Mi-Carême 28 mars
1946. Un journal nota à cette occasion que les autorités
officielles ne cherchèrent guère à aider à l'organisation de ce
joyeux défilé festif. Elles préféraient les commémorations solennelles, tristes et funèbres.
Faire de nos vies un beau
jardin passe aussi par l'organisation de la joie et du plaisir sain
de la fête véritable. Il n'est pas nécessaire d'argent, de
pouvoir, de célébrité, pour arriver à organiser une fête
réussie. C'est-à-dire une fête où on s'amuse. L'amusement c'est
la vie. N'écoutons pas ceux qui veulent à tous prix nous empêcher
de nous amuser en rond. Chantons, dansons, rions ensemble !
Basile, philosophe
naïf, Paris le 16 novembre 2015
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