Comme je l'ai déjà
écrit par ailleurs, une des plus grandes aberrations de notre
société est d'avoir fait de l'acte sexuel entre humains un produit
de consommation. Ce qui réduit les humains à l'état d'objets à consommer. Certains hommes jaugent les femmes comme un boucher
jauge une bête de boucherie qu'il achète sur pied. « Voyons
la bouche, le regard, les seins... Très bien ! Je consomme ! »
Le désir véritable est remplacé par un calcul. Et quand
l'organisme dit non, se cabre, refuse de s'impliquer dans des
divagations, on fait appel à la science. On traite des « pannes
de désir » comme des pannes de voitures. C'est juste un
dysfonctionnement. Il faut remettre la machine en route. Sans
chercher à réfléchir pourquoi en fait « ça ne marche pas ».
Alors que l'acte sexuel ne doit se pratiquer qu'à la condition
exclusive, mais pas forcément suffisante, qu'il existe un vrai et
authentique désir réciproque. Désir qui est rare. Pour aller au
coït, on se contente le plus souvent de la possibilité
« technique » de la réalisation de l'acte, jointe à une
relative excitation. Les humains, dans leur ignorance abyssale de
leur sexualité, croient en particulier que l'érection masculine et
les réactions génitales féminines correspondantes expriment le
désir et même l'urgence de l'acte sexuel. Alors que ces réactions
physiologiques interviennent fréquemment en l'absence du désir, qui
est un sentiment très particulier. La colossale et dévastatrice
stupidité humaine conduit au galvaudage de l'acte sexuel. Ce
galvaudage va ronger la relation et finir par la rendre insupportable
à l'un des partenaires. Il ne supportera plus l'autre et va rompre.
Ce schéma relationnel explique la plupart des ruptures
incompréhensibles entre des amoureux qui avaient, semble-t-il, très
bien débuté leur idylle.
Fait à souligner, le
mécanisme de la distanciation des relations et de la rupture ne sera
pas clairement analysé et identifié. La catastrophe arrivera. Et on
ne saura pas vraiment comment l'expliquer. Ça marchait si bien. Et à
présent voilà que plus rien ne fonctionne. On était si bien. Et
voilà qu'on est très mal.
J'ai mis plus de quarante
ans pour comprendre le processus. Les autres ne le comprenant pas,
partent à la recherche de remèdes qui ne font qu'aggraver leur
sort. Sentant confusément que quelque chose cloche dans le domaine
sentimental, ils cherchent à résoudre le problème par la recherche
d'une séduction supérieure. Ainsi, par exemple, ils donnent trop.
Ou accumulent trop. Ça peut consister en dons de valeurs matériels.
Ou accumulation de celles-ci. La chrematistique, dérangement
consistant à accumuler sans fin le plus d'argent possible, est un
trouble d'origine sexuelle. On croit sans le comprendre et l'analyser
clairement, que « l'amour » qui paraît fuir, vous
sourira enfin si on est riche, très riche, trop riche. Ou si l'on
est généreux, très généreux, trop généreux. On offre ce à
quoi on tient le plus. La personne qui reçoit les cadeaux les reçoit
avec plaisir. Mais n'est pas « séduite » pour autant.
D'autant plus qu'avec le comportement hypersexualisé l'amour est en
fait impossible. L'obsession du coït tue les sentiments. Réduit les
humains à devenir des sex machines. Plus rien ne fonctionne. Le coït
lui-même devient fade et décevant.
Conquérir le plus de
« pouvoir » possible, voler, dominer, toutes sortes de
comportements déviants et plus ou moins acceptés par la société
deviendront un but pour l'amoureux malheureux qui en fait tourne le
dos à l'amour. J'ai raconté dans ce blog comment à 22 ans l'amour
m'amenait à prendre le risque de voler un rideau dans un train.
D'autres voleront des biens autrement plus importants. Des dictateurs
affameront des pays entiers. Et ce crime aura pour source le trouble
de leur sexualité. Trouble qu'ils ne résoudront pas avec de tels
moyens.
Avec le temps, la société
toute entière a fini par marcher sur la tête. Les plus affamés
sont souvent les paysans qui produisent les aliments. Les plus bêtes
se retrouvent commandant les plus intelligents. La force se met au
service de l'arbitraire, et ainsi de suite. Une société qui tourne
le dos à l'amour est une société malade et qui se traine. Seul
l'amour peut rendre au monde son équilibre.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 10 novembre 2015
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire