dimanche 8 novembre 2015

451 Limites de « grands principes »

Quelques « grands principes » : « aimes ton prochain comme toi-même ». « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse ». « Mets toi à la place des autres ». « Évites de faire souffrir ».

À présent, voyons un cas particulier qui est arrivé en 1912 lors du naufrage du Titanic. Il n'y avait pas suffisamment d'embarcations de sauvetage. La consigne donnée et relativement bien suivie : « les femmes et les enfants d'abord », condamnait à une mort certaine la plupart des passagers et membres d'équipage de sexe masculin. Voyant ça, un jeune homme a enfilé des vêtements féminins. Grâce à ce déguisement a réussit à embarquer dans une chaloupe. Et a sauvé sa vie.

Par la suite, quantité de gens qui n'étaient pas à bord du Titanic et n'ont jamais connut en général une situation similaire, n'ont pas eu assez de mots pour critiquer et condamner ce qu'ils baptisaient : « une lâcheté ». En l'occurrence, avoir sauvé sa peau, sans doute à la place d'une autre, grâce à un travestissement. Ce genre de condamnation est un peu facile. À présent, considérons l'application des « grands principes » faite à cette situation particulière. Si on doit aimer son prochain comme soi-même, la réciproque est vraie. Dans ces conditions, au nom de quoi doit-on accepter de périr par amour des autres ? En quoi sa vie à soi est moins précieuse que celle d'un autre ?

« Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse ». Si ce jeune homme avait accepté une mort certaine, il plongeait de ce fait sa famille, ses proches, c'est-à-dire autrui, dans le deuil. Il pouvait l'éviter. Avait-il le droit de ne pas se sauver ?

Si on comprends autrui, on se dit qu'il peut lui également user d'un stratagème pour se sauver.

« Mets toi à la place des autres » : même conclusion, chacun veut sauver sa peau. Les autres peuvent choisir de faire pareil.

« Évites de faire souffrir » : d'accord, mais pourquoi moi je dois choisir de souffrir, périr dans la catastrophe, plutôt qu'un autre ? Si je m'aime autant que mon prochain, pour quelle raison devrait-il avoir la priorité sur moi pour sauver sa peau ? Et, chacun de nous, n'a-t-il pas aussi pour devoir de chercher à échapper aux dangers ? Qui plus est celui du naufrage du paquebot ?

Les « grands principes » sont très jolis esthétiquement. Mais, sont-ils toujours applicables et si jolis que ça ? J'avais « promis » à une femme que nous aurions ensemble des enfants. Puis, notre relation s'est dégradée, est devenue insupportable. Je me sentais toujours « lié » par ma promesse. Me « mettant à la place de l'autre », j'excluais catégoriquement de « trahir ma parole ». Finalement, c'est mon amie qui m'a largué pour aller voir si l'herbe était plus verte ailleurs. Elle m'a délivré d'une situation sans issue dont je refusais de sortir « pour ne pas faire souffrir l'autre ». Ce qui faisait qu'à la place je me faisais souffrir moi. Est-ce justifié ? L'autre, de son côté, n'a pas hésité finalement par trahir la sienne, de parole. Alors, que sont ici les « grands principes » ? J'entends bien souvent le reproche fait aux hommes par des femmes : « ils ne veulent pas s'engager ». Mais, quand il y a rupture, le plus souvent c'est la femme qui en prend l'initiative. Dans ces conditions, que signifie « l'engagement » demandé ? Une arnaque ? Ne fais pas ce que je fais, mais fais ce que je te dis de faire. Où est l'égalité et le respect dans ces conditions ? De toutes façons, tant que la plupart des relations sont saupoudrées de mensonges, il n'y a guère de chance de pouvoir les envisager droites. Alors, les grands principes qu'en faire ? Un peu, mais pas trop. Une bonne trahison est parfois meilleure qu'une mauvaise fidélité où on se trahit pour l'autre. Qu'en pensez-vous ? À mon avis, le jeune homme du Titanic a très bien fait de se déguiser, mentir et tricher. Savoir s'il a eu « raison » ou « tort » ici est totalement secondaire. La seule chose qui compte au fond est qu'il est resté vivant.

Basile, philosophe naïf, Paris le 8 novembre 2015

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