Je parlais un jour avec
un anarchiste qui me disait : « le jour où viendra une société
communiste libertaire ». Puis, il m'esquissait son rêve de
cité idéale. J'ai connu bien des gens que le mot, l'idée de
« socialisme » faisait rêver à un monde sans peurs,
injustices, violences... Et voilà que, parcourant Internet, je lis le
texte d'une prière catholique qui appelle la venue « du règne
de Dieu ». Force m'est de constater que dans les trois cas le
rêve joue exactement le même rôle dans la pensée de ceux qui s'y
attachent.
Ceux qui parlent du règne
de Dieu s'attachent à « la divine providence ». Les
autres « aux lois de l'Histoire ». Dans ces différents
cas il s'agit à chaque fois de forces supérieures et irrésistibles
qui finiront par établir le règne attendu sur Terre. La parole
sacrée de Jésus pour les uns, celle de Marx ou de Bakounine pour
les autres, occupent la même place dans le système de pensée des
adeptes de ces modes de penser. A chaque fois derrière on retrouve
l'aspiration de l'homme à un monde meilleur. Cette aspiration est
très généreuse, mais est-elle réaliste ? A mon avis oui, il est
réaliste de rêver. A condition de comprendre le rêve et son
rapport à la réalité.
Quand nous rêvons à un
monde idéal, selon Dieu, Marx ou Bakounine, nous pensons souvent à
son organisation politique, économique et sociale, et rarement aux
caresses. Pourtant c'est leur manque qui explique quantité de
troubles chez les humains.
Très récemment, je me
surprends à m'énerver subitement à l'endroit des femmes. Je sens
en moi colère et insatisfaction, alors qu'en temps normal je suis
plutôt tranquille de ce côté-là. J'ai finalement compris la
source exacte de mon énervement. Rentrant ce soir-là chez moi je
croise une jolie jeune fille que je connais à peine, mais
suffisamment pour la saluer fort civilement. Elle me rend mon
bonjour. Mais, chose inattendue, ajoute : « on se fait la bise
! » Chose faite, après quoi nous échangeons quelques aimables
banalités sur le mode d'occuper le temps des fêtes de fin d'année
et le début de l'année à venir. Nous nous quittons après ce bref
échange et je n'y pense plus. Oui mais, je n'ai pas réalisé qu'en
faisant la bise à cette personne, j'ai senti une incroyable douceur
de la peau de ses joues. Je ne suis ni amoureux, ni séduit par cette
jeune fille. Mais en carence absolu ou presque de câlins, chose que
je supporte fort bien. Mais voilà, mon organisme, lui, est affamé
de caresses. Cette faim commune dans notre société est réveillée
par ce contact. Un peu comme la soif peut être réveillée par la
vue d'un grand verre d'eau... Et l'organisme s'agite, se tourmente et
m'envoie des pensées énervées à propos des femmes. Au bout de
vingt-quatre heures mon énervement s'est évaporé et la
tranquillité est revenue.
Mais imaginons un être
un peu brut, qui croit que les femmes sont d'agréables gibiers à
chasser. J'en aurait été quitte pour en être malade. Là je sais
qu'il n'y a rien à imaginer. Dans notre société les câlins sont
pris en otages par les règles régissant « le sexe ». On
ne caresse pas si on ne baise pas. S'il n'y a pas d'envie de baiser
on ne caresse pas. Les épidermes sont condamnés à la diète si on
ne consomme pas du cul. C'est barbare mais c'est comme ça dans notre
société malade.
Certains, pour compenser ce manque vont faire toutes sortes de bêtises et avoir divers comportements incorrects vis à vis des autres. Moi, je m'en passerais. Mais le « monde idéal » appelé par les uns ou les autres s'en passe-t-il ? Avons-nous d'abord besoin d'argent ou de câlins, c'est-à-dire d'amour ? On peut être riche et malheureux. Mais il est souvent beaucoup plus facile d'invoquer juste des changements matériels pour arriver à un monde meilleur. Que se confronter à l'irritante question du manque de câlins et des obstacles à ceux-ci en nous et autour de nous. Il faudra bien pourtant un jour parvenir à répondre positivement au problème de la carence, et même famine quasi générale, régnant dans le domaine des câlins.
Certains, pour compenser ce manque vont faire toutes sortes de bêtises et avoir divers comportements incorrects vis à vis des autres. Moi, je m'en passerais. Mais le « monde idéal » appelé par les uns ou les autres s'en passe-t-il ? Avons-nous d'abord besoin d'argent ou de câlins, c'est-à-dire d'amour ? On peut être riche et malheureux. Mais il est souvent beaucoup plus facile d'invoquer juste des changements matériels pour arriver à un monde meilleur. Que se confronter à l'irritante question du manque de câlins et des obstacles à ceux-ci en nous et autour de nous. Il faudra bien pourtant un jour parvenir à répondre positivement au problème de la carence, et même famine quasi générale, régnant dans le domaine des câlins.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 20 décembre 2015
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