On vante la Nature. Ceci
est naturel, c'est donc bien. Ceci ne l'est pas. C'est à proscrire.
Mais qu'appelle-t-on « la Nature » ?
Une amie me disait : « il
ne faut pas boire du lait. C'est mauvais. L'homme est le seul animal
qui boit le lait d'une autre espèce animale que lui. C'est pourquoi
c'est à éviter. »
L'homme est aussi le seul
animal qui mange des aliments cuits, porte des vêtements et se
retient de pisser et chier devant les autres, pour aller se vider aux
toilettes, ou dans un coin tranquille et isolé si c'est en pleine
campagne. Donc : ne buvons pas de lait, refusons de le faire ! Ne
mangeons que des aliments crus. Vivons nus. Et pissons et chions dès
que nous en avons envie, y compris devant les autres et au milieu du
salon.
La « Nature »
est une vue de l'esprit. En revanche existe un ordre général de
l'univers. Qui fait, par exemple, de l'amour une force fondamentale
qui régit les êtres et les choses. Deux atomes s'attirent. Deux
amoureux s'attirent. C'est une même loi, un même phénomène. Mais
ça ne signifie pas qu'il faut forcément ajouter : « c'est
bien » ou « c'est mal », parce que c'est naturel.
Un tsunami, un tremblement de terre, une épidémie de peste, une
piqure de moustique, un coup de soleil, c'est naturel. Ce n'est pas
« bien » pour autant.
On dirait parfois que,
plutôt que se servir de sa réflexion, l'homme cherche des sortes de
« lois » supérieures qui lui permettraient d'éviter de
réfléchir. Il trouverait alors très commode de se soumettre à
elles. Il en est ainsi, par exemple, des « lois naturelles ».
On a vu les mêmes hommes condamner l'adultère, qui peut être
condamné, si on veut, mais qui est une chose naturelle. Et condamner
l'homosexualité comme « contre-nature », alors qu'elle
existe dans la Nature chez diverses espèces animales. Le mot
« Nature » se décline à toutes sortes de sauces, pas
toujours objectives, loin s'en faut.
Et si on revenait aux
fondamentaux ? « C'est bien », c'est-à-dire : ça me
paraît bien. Ou : « c'est mal », c'est-à-dire, ça me
paraît mal. Ne serait-ce pas déjà beaucoup plus simple? La
Nature n'est plus là, dès que j'utilise la lumière artificielle ou prends
un cachet contre la migraine. Arrêtons de
l'invoquer !
Ce qui est drôle, c'est
voir se disputer des gens qui sont en fait d'accord. On voit les
partisans de « la Science » invectiver les partisans de
« Dieu ». Mais que disent-ils les uns les autres ? Les
premiers disent : « il existe un ordre général de l'univers,
régis par les lois de la Science. » Les seconds disent : « il
existe un ordre général de l'univers, régis par les lois de
Dieu. » Sur l'essentiel, ils se rejoignent : « il existe
un ordre général de l'univers. » La seule divergence est le
nom donné à la source de cet ordre. Les uns l'appellent « la
Science », les autres « Dieu ». Mais il n'y a pas
de divergence fondamentale.
Certes, ensuite on trouve des divergences. Par exemple, les uns ne croient pas en l'existence de l'au-delà. Les autres y croient. Mais, bien malin celui qui pourrait prouver scientifiquement que l'au-delà existe ou n'existe pas. Pour étayer ici la négation, j'entends dire : « c'est évident que l'au-delà n'existe pas, car cette pensée nous arrange. » Piètre démonstration, si je dis : « c'est évident que demain n'existe pas, puisque la nuit venue, le retour du soleil m'arrange », ou « c'est évident que le printemps n'existe pas, puisque l'hiver étant là, l'arrivée du printemps m'arrange », que trouvera-t-on à me répondre ? D'autres disent : « l'âme n'existe pas, on ne l'a jamais vu. » Et alors, la radioactivité existait depuis toujours, avant qu'on la découvre !
Certes, ensuite on trouve des divergences. Par exemple, les uns ne croient pas en l'existence de l'au-delà. Les autres y croient. Mais, bien malin celui qui pourrait prouver scientifiquement que l'au-delà existe ou n'existe pas. Pour étayer ici la négation, j'entends dire : « c'est évident que l'au-delà n'existe pas, car cette pensée nous arrange. » Piètre démonstration, si je dis : « c'est évident que demain n'existe pas, puisque la nuit venue, le retour du soleil m'arrange », ou « c'est évident que le printemps n'existe pas, puisque l'hiver étant là, l'arrivée du printemps m'arrange », que trouvera-t-on à me répondre ? D'autres disent : « l'âme n'existe pas, on ne l'a jamais vu. » Et alors, la radioactivité existait depuis toujours, avant qu'on la découvre !
Basile, philosophe
naïf, Paris le 8 décembre 2015
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