Un article dans un grand
journal parisien traitait, sur un ton qui se voulait léger et
spirituel, de la sexualité de nos contemporains. Une affirmation là
a retenu mon attention. Elle prétendait que les humains autour de
nous « font l'amour » une fois par semaine et que c'est
suffisant pour assurer « leur bonheur ». L'article
prétendait nous éclairer, décomplexer, aider à mieux
vivre...
C'était en réalité le contraire en dépit du ton et des apparences. En effet, tout d'abord si pour assurer notre bonheur il faut « faire l'amour » une fois par semaine, ça signifie que ceux qui n'ont pas cette opportunité sont des malheureux, des ratés, des minables, des qui n'ont rien compris, qui sont au dessous de tout. Bref, il ne leur reste plus qu'à se faire interner en hôpital psychiatrique ou aller voir un psy.
Ensuite « faire
l'amour » qu'est-ce à dire ? Est-ce que droguer, saouler
et sodomiser dans une piscine une jeune fille de treize ans, comme
l'a paraît-il fait un jour une de nos célébrités, c'est faire
l'amour ? Est-ce qu'aller voir les prostituées et en être
client c'est « faire l'amour » ? Mystère, il
semblerait qu'il suffit de mettre le truc dans le machin, secouer,
décharger... et hop ! On a « fait l'amour ».
Et cet acte délicieux
assurerait notre bonheur. Il existerait donc un bonheur standard à
portée d'éjaculation. Les dames devant bien sûr se plier à la
carotte masculine pour avoir accès elles aussi au bonheur...
Mais là où une
interrogation est soulevée par cet article, c'est quand il affirme
la périodicité de l'acte sexuel assurant le bonheur. Ce n'est pas
une fois tous les quatre jours ou tous les cinq jours, mais très
exactement selon un rythme hebdomadaire. D'où provient cette étrange
précision ? A quoi correspond-t-elle ?
Elle correspond très
exactement au rythme de la fréquentation habituelle des bordels
d'antan. Le paysan allait au marché une fois par semaine.
Quatre-vingt-dix pour cent des hommes étaient jusqu'à une époque
pas si ancienne des paysans. Une fois vendus ses produits, l'argent
empoché, le paysan allait au bordel et rentrait ensuite à la
maison.
Le propos donnant comme
rythme sexuel satisfaisant celui d'un rapport hebdomadaire relève
très simplement d'une conception bordelienne de la sexualité.
Par delà les discours
« modernes et décomplexant », voilà en fait quelle est
la vérité.
En analysant toutes
sortes de discours sexuels écrits ou exprimés avec des images, dans
la pornographie, en particulier, on retrouvera le même discours. Le
sexe est un produit de consommation pour hommes, consistant
essentiellement à se masturber en remplaçant sa main par un orifice
naturel de quelqu'un d'autre. Le tout étant présenté comme une
jouissance extraordinaire et automatique, qui correspondrait au fait
de « faire l'amour ».
Une jeune fille
influencée par les scénarios pornographiques m'ayant proposé de
m'y inscrire avec elle un matin, j'ai décliné l'offre. Une amie qui
par la suite commentait ma réaction m'a demandé : « mais
tu n'as pas voulu en profiter ? » Sans réaliser l'horreur
du concept : profiter de quelqu'un... On peut réaliser diverses
choses avec d'autres personnes, mais profiter de quelqu'un est ici
bien peu civil. Mon amie commentatrice ne s'était pas rendu compte
de ce que pouvait signifier d'incongru sa question.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 18 juin 2017
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