Quand on entends
commenter la morale sexuelle, essentiellement répressive et pleine
d'interdits, on lui voit attribuer une origine souvent religieuse ou
« naturelle ». Il en est ainsi du très fameux tabou de
l'inceste. Passé l'invocation des prohibitions d'origine religieuse,
on voit prétendre que celui-ci a une origine « naturelle ».
Il aurait pour but d'éviter la naissance d'enfants faibles ou
dégénérés du fait de l'excès de consanguinité. Si on étudie
bien cette argumentation, on constate qu'elle ne tient pas la route.
En effet, s'il s'agissait vraiment du souci d'empêcher la naissance
d'enfants débiles, on devrait voir tout aussi vigoureusement
condamner et pourchasser les unions avec des personnes malades ou
âgées avec une plus jeune. Ce qui n'est pas le cas.
Si je baise ma sœur, en
Allemagne, je risque la prison. Si, à 63 ans, en Allemagne, je mets
enceinte une jeune femme qui n'est pas une parente proche, en dépit
de la probabilité accrue que l'enfant soit faible ou débile, je ne
risque rien. Il s'agit donc de bien autre chose que la santé des
enfants à naître.
La législation actuelle
en Italie et en France vend la mèche. En Italie l'inceste n'est en
aucun cas un délit, à la condition expresse qu'il ne lui soit pas
conféré la notoriété. En résumé, baisez avec qui vous voulez,
mais allez-y discrètement. Et alors vous ne risquez pas le glaive de
la loi.
Mais, c'est avec la loi
française qu'on découvre le pot-aux-roses. L'inceste n'est pas
punissable par la loi. En revanche, les enfants nés de couples
incestueux ne peuvent en aucun cas se voir reconnue leur filiation
authentique. Par exemple, un père qui a un enfant avec sa fille est
dans l'impossibilité juridique de le reconnaître. En résumé, il y
a un enfant. Mais il n'est pas en droit d'exister légalement comme
les autres enfants. Il n'est pas possible pour lui d'avoir légalement
son père. Quelle est le motif de cette bizarrerie qui amène à nier
tranquillement la réalité de l'existence ?
C'est alors que la vérité éclate sur l'origine de la prohibition de l'inceste, qui n'est ni morale, ni religieuse. Elle est économique. Il s'agit de la question de l'héritage. Car, qui dit filiation dit héritage. C'est pour éviter des conséquences dans ce domaine que l'acte sexuel entre parents proches a été prohibé un jour.
C'est alors que la vérité éclate sur l'origine de la prohibition de l'inceste, qui n'est ni morale, ni religieuse. Elle est économique. Il s'agit de la question de l'héritage. Car, qui dit filiation dit héritage. C'est pour éviter des conséquences dans ce domaine que l'acte sexuel entre parents proches a été prohibé un jour.
C'est pourquoi en France
vous pouvez légalement coucher tant que vous voulez avec votre mère,
sœur, père, frère... mais si un enfant naît de cette union, il ne
pourra pas avoir légalement de père.
Les discours sur
l'origine morale, religieuse, sanitaire, traditionnelle, etc. du
tabou de l'inceste relèvent de la littérature. C'est juste une
question de transmission de la propriété qui est à l'origine de
cet interdit soi-disant fondamental de la société. Car il est en
fait fréquemment violé, mais pas ouvertement. Il l'est dans les
conditions énoncées par la loi italienne : sans notoriété trop
visible.
Les règles dites morales
ou religieuses viennent ensuite pour encenser l'interdit économique.
Dans les régions où la
terre cultivable est rare, comme au Bhoutan, la tradition faisait
qu'une femme en épousant un homme épousait simultanément tous ses
frères. Ainsi, on ne risquait pas de voir les terres possédées par
les parents des maris trop fragmentées par la conséquence des
héritages. Une femme ayant les enfants de plusieurs hommes. Tandis
que si chaque femme avait un mari unique et différent, la terre
serait divisée en autant d'héritages que de couples. Ici, il n'y a
qu'un couple « élargi » qui hérite des parents. Quand
bien-même ceux-ci auraient dix fils.
Pour des raisons
également économiques la multiplicité des partenaires sexuels des
femmes est pareillement traditionnellement prohibés. L'homme,
traditionnellement, baise tant qu'il veut. La femme, elle, qui pond
les héritiers, n'a droit qu'à un unique géniteur de ses bébés.
Quelquefois sous peine d'être mise à mort si elle ne reste pas
visiblement rigoureusement fidèle à son époux.
Une étrangeté du droit
français veut que « l'agression sexuelle » est prescrite
au bout de trois ans et le viol au bout de dix. Pour quelle raison
une telle différence ? Il faut lire entre les lignes. Le viol est
considéré comme beaucoup plus grave tout simplement parce qu'il
remet en question la virginité des jeunes filles. En quelque sorte,
la garantie de fraicheur et de non gravidité de la femme. Élément
essentiel dans le cadre du commerce des femmes que représente le
mariage traditionnel, arrangé et organisé pour des motifs
économiques. Il n'y a pas si longtemps, me disait un ami auvergnat,
dans les bals de son village on ne laissait danser les filles
héritières d'une ferme qu'avec des garçons héritiers d'une ferme.
Les parents y veillaient. Partout ailleurs le motif économique se
retrouve aussi derrière les règles régissant la morale sexuelle.
Une vieille fermière autrichienne nous montrait, à ma mère et moi,
avec beaucoup de contentement les photos de mariage de ses quatre
filles. Et ajoutait : « elles ont toutes épousé un garçon
qui héritait d'une ferme ». Ça se passait en 1973.
Un des domaines les plus
étranges de la morale sexuelle officielle concerne la majorité
sexuelle. Il s'agit de l'âge, distinct de la majorité civile, à
partir duquel une fille ou un garçon peut baiser avec un partenaire
civilement majeur sans que ce dernier encourt un châtiment
impitoyable, de l'ordre de dix années de prison, et l'opprobre
généralisé. Officiellement, on parle ici de protection de
l'enfance. Mais de quels enfants s'agit-il au juste ? En Espagne, la
majorité sexuelle est à treize ans, en Italie quatorze, en France
quinze, en Suisse seize. En résumé, si étant majeur je baise avec
un ou une mineur de juste treize ans révolu à Madrid je ne risque
rien. Sitôt la frontière franchie, la même aventure me vaut d'être
classé en France comme un monstre et me retrouver en prison. Si la
même aventure m'arrive en Italie avec un ou une partenaire de juste
quatorze ans révolu, je ne risque rien. Mais, si je connais la même
aventure en France, même topo, même condamnation morale et pénale.
Enfin, si je baise en France avec un ou une partenaire de juste quinze ans
révolu et qu'il m'arrive la même chose en Suisse, me voilà classé
monstre et emprisonné chez les Suisses. D'où provient cette
disparité pour le moins étrange ?
A-t-elle un rapport avec
la protection de l'enfance ? Autre fait révélateur : la majorité
sexuelle est à Mexico City fixée à... onze ans. Et, en France, elle
était aussi fixée à onze ans jadis. Pourtant on se retrouve là
carrément avec des enfants qu'on a l'autorisation de baiser. Comment
la loi peut-elle ou a put-elle tolérer une chose pareille, alors
qu'elle se déclare prétendre protéger l'enfance ? La raison, une
fois de plus, est en fait économique.
Jadis en France et dans
les sociétés peu développées économiquement, les enfants
travaillent. Donc, ils cessent précocement d'appartenir à la sphère
économique parentale. Pour cette raison, moins l'économie est
développée, plus tôt le producteur ou la productrice n'appartient
plus à ses parents et devient officiellement baisable. A onze ans à
Mexico City, et en France jadis, à treize en Espagne aujourd'hui,
quatorze en Italie, quinze en France actuelle et seize en Suisse pays
économiquement plus riche et développé.
A l'origine de la loi sur
la majorité sexuelle on ne retrouve pas des motifs moraux,
religieux, ou de protection de l'enfance, mais des considérations
économiques.
La morale n'a pas
grand-chose à voir là-dedans. Il s'agit de propriétés et
transmissions d'héritages. Le jour où l'Humanité sera délivrée
des contraintes économiques et des conséquences aberrantes des
héritages trop importants, la morale et les lois verront ce
changement se répercuter sur elles. Comment changeront-elles
précisément ? C'est très difficile à dire. Mais ce qui est
certain, c'est que la vie sera organisée différemment. Elle sera
certainement beaucoup moins violente qu'aujourd'hui, et même
peut-être enfin respectueuse pleinement de l'être humain. Et la
protection des personnes et des biens ne sera plus, comme parfois, le
prétexte à l'inverse, mais une réalité générale et intangible.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 9 décembre 2014
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire