Il est de bon ton et
trouvé tout à fait raisonnable aujourd'hui en parlant des humains
d'employer à l'occasion le concept d'« amour sexuel ».
On trouve cette terminologie utilisée dans des ouvrages publiés
sous les signatures prestigieuses d'auteurs réputés incontournables
pour expliquer la vie des humains. Mais qu'entendent-ils en parlant
d'« amour sexuel » ? Selon ces auteurs, il existerait
diverses formes d'amours. L'une de celles-ci impliquerait le désir,
la recherche et l'accomplissement de l'accouplement entre partenaires
humains. Ce serait ça, « l'amour sexuel ».
Mais, avez-vous entendu
parler de « l'amitié dinatoire carnivore » ? Selon un
auteur, existerait une forme d'amitié impliquant forcément de vous
inviter à diner pour un repas comprenant des produits carnés.
Comment ça ? Cette forme d'amitié n'existerait pas ? Vous êtes
contre le fait d'inviter des amis à diner ? Et à diner en
consommant des produits carnés ? Vous êtes donc végétarien ?
C'est à ce genre d'affirmations absurdes et apparemment raisonnables
qu'on risque d'être confronté si on nie que l'amour sexuel existe.
Si vous niez l'existence de l'amour sexuel on vous dira : « Comment
ça ? Vous êtes contre le fait de faire l'amour avec votre amoureuse
? Vous êtes puritain, ascète, abstinent sexuel ? » Ou alors,
si vous êtes un homme et vous fréquentez une amie proche de vous
sans chercher à parvenir au coït avec elle, l'explication coulera
de source : « vous êtes homosexuel ! »
Mais pourquoi devrais-je
obligatoirement chercher à enfiler une amie si elle est sympathique
et agréable ? C'est la Nature ! Ah bon, et lire un livre à la
lumière électrique c'est la Nature aussi ? Combien de choses non
naturelles faisons-nous tous les jours ? A commencer par nous lever
en hiver avant l'aube pour aller étudier ou travailler !
L'amour existe, il
n'est pas sexuel. La sexualité existe et peut à l'occasion
participer d'une relation d'amour. Mais, me direz-vous, la Nature
veut que vous ayez envie de faire l'amour ! Ah, décidément, vous
m'énervez avec votre Nature passe-partout et justifiant tout ! La
plupart du temps ce qu'on prétend être le désir sexuel
chez les humains n'est pas un vrai désir, mais un pseudo-désir.
L'homme va bander pratiquement toujours alors qu'il n'éprouve pas le
désir authentique et véritable de « faire l'amour ».
Mais la confusion règne à ce propos. Quand vers 1964, l'année de
mes treize printemps, j'ai commencé à bander pour un rien et à
cowpériser pareil, c'est-à-dire émettre un lubrifiant gluant par
le pénis, j'ai eu honte et j'ai été terriblement gêné. Ici,
c'est la première fois que j'en parle aussi clairement, 52 ans
après. Personne ne m'avait à l'époque averti de l'arrivée de ces
phénomènes. Et comme ils paraissaient « sexuels »,
c'était forcément gênant, honteux, à cacher. Si je me mettais nu,
je bandais aussitôt. J'ai cessé de prendre le bain en étant vu par
des membres de ma famille. Je cachais soigneusement mes érections
nombreuses, involontaires, intempestives... Pourtant il n'y avait là
rien de mal. De plus, je suis catégorique là-dessus, je n'éprouvais
absolument pas l'envie de « faire l'amour » avec qui que
ce soit. Donc, ces érections n'exprimaient nullement le désir
sexuel. Ces érections n'étaient pas sexuelles, mais
physiologiques, réflexes. Celui ou celle qui croit qu'une
érection exprime forcément le désir de coït se trompe lourdement.
Le concept d'« amour
sexuel » implique que selon des règles impératives et
mystérieuses, à un moment-donné vous ne vous appartenez plus.
C'est à votre zizi que vous êtes sensé devoir obéir. C'est une
dangereuse et monumentale ânerie traditionnelle! Cette notion
d'« amour sexuel » est vague, imprécise, envahissante,
inauthentique, déstabilisante, inquiétante, culpabilisante. On
donne l'impression, en particulier aux jeunes, qu'à un moment-donné,
soudain, ils doivent suivre une sorte de canevas prédéterminé
précis. En gros : « une fille vous plaît, il faut chercher à
coucher avec elle. Et impérativement mettre le truc dans le
machin. » Ce discours caractéristique de la « pensée
unique » a d'effroyables conséquences. Quand on commence à
développer ce discours du sexe obligatoire et automatique en
certaines circonstances on a tout faux. On fonce droit dans le mur.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 26 novembre 2016
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