lundi 3 décembre 2012

5 A propos des « bipolaires »

On constate que des gens ont un comportement perturbé. Ils alternent des moments de grande exaltation et profonde dépression, allant jusqu'au suicide. Et ce, sans lien visible avec la vie qu'ils mènent. Conclusion : « ils sont malades ».

Mais de quoi ? Quelle maladie ? Comment la définir ?

On prend alors une bonne pelletée de symptômes apparemment liés. On la déverse dans un grand sac. Puis, on trempe son doigt dans un encrier et on indique dessus le nom de la maladie susdite. Ce qui donne : « psychose maniaco-dépressive ».

Un nom à faire peur aux néophytes. « Psychose » fait penser à des fous, et « maniaco » rappelle « maniaque ». Si on est peu au fait du jargon médical, on pense alors à des monstres agresseurs d'enfants ou ce genre de choses.

Par la suite, les initiés trouve le nom adopté pour la « maladie » beaucoup trop long. Ils vont utiliser juste les initiales, ce qui donnera : « P. M. D. » Pas de quoi s'étonner. Si vous fréquentez le milieu médical, vous constaterez qu'on y affectionne l'usage d'abréviations en tous genres : le bloc opératoire, par exemple, c'est « le bloc ». On ne dit pas « la chirurgie », mais « la chir ». Et un médecin spécialisé en anatomie-pathologie devient « un anapat' ».

Puis, le temps passe et la « P. M. D. » change d'appellation. On ne parle plus alors que des « troubles bipolaires » ou de la « maladie bipolaire ». Les malades deviennent des « bipolaires ». Ce nouveau nom est même encore abrégé en « bipo ». Sympa, non ?

Mais, au juste, qu'est-ce exactement la maladie en question, d'où vient-elle, quelles sont ses origines, ses causes ?

Ben... à dire vrai... on n'en sait fichtre rien.

Jadis les femmes enceintes attrapaient souvent la fièvre après leur accouchement et mouraient. Les médecins disaient qu'elles étaient victimes de la « fièvre puerpérale ». Ce qui donnait l'impression qu'ils comprenaient quelque chose au phénomène. En fait, ils n'y comprenaient rien. Et le mot « savant » qu'ils utilisaient et qui en mettait plein la vue aux néophytes, signifiait tout simplement « fièvre des accouchées ». Autant dire rien de plus que ce que tous le monde constatait : la température des accouchées montait et elles mouraient ensuite, point.

Avec la « bipolarité », c'est la même chose aujourd'hui. On ne sait pas d'où proviennent les troubles. On met juste un nom dessus en donnant l'impression d'avoir avancé ainsi pour comprendre ce qui arrive.

On dit soigner les « bipolaires ». Mais si vous prétendez soigner une personne agitée ou dépressive en lui assenant un coup de matraque sur la tête, la soignez-vous ? Non, bien évidemment.

C'est exactement ce qui se passe aujourd'hui avec les personnes soignées pour des troubles « bipolaires ». Mais en plus subtil : la matraque est chimique. Le résultat est le même.

Si une personne dont l'humeur est troublée se retrouve en permanence abrutie, démotivée, endormie par des drogues baptisées « médicaments », ça va beaucoup mieux. Son humeur n'est plus troublée. Elle ressemble aussi ainsi beaucoup à un légume. Et même un gros légume, car ces « médicaments pour bipolaires » transforment fréquemment les « malades » en bibendums. Ils ouvrent l'appétit et entraîne le manque d'activité. On engraisse aussi les veaux en les gardant en stabulation. J'ignore si on leur ouvre aussi artificiellement l'appétit. En tous cas, le résultat de leur inactivité est la même que pour les « bipolaires », mis à part qu'on n'envoie pas ces derniers à l'abattoir.

Je ne jette pas la pierre au corps médical. Il est patient, rempli de bonne volonté et les drogues, quand elles arrêtent une crise, peuvent sauver la vie à des malades qui se seraient sinon suicidés. Mais elles ne les soignent pas et ne les guérissent pas non plus. Telle est la désagréable réalité. On ne soigne pas les « bipolaires », car on ne sait pas les soigner. On les drogue. Jadis on enchaînait les fous. On a fait un progrès, car la brutalité physique directe a reculé, mais le fond de l'acte est identique.

Certains personnes vont chercher l'explication de la « bipolarité » dans la génétique. On trouve des bipolaires apparentés à d'autres bipolaires. Mais à cela on peut rétorquer deux choses : d'une part, il y a beaucoup de « bipolaires » en général, ce qui rend probable d'en retrouver plusieurs dans une même famille. D'autre part, il peut s'agir non d'une maladie présente potentiellement dans une même famille, mais simplement d'une sensibilité, une fragilité plus grande, qui favorise à l'occasion l'arrivée des troubles « bipolaires ».

D'où peuvent provenir ces troubles ?

Pour le savoir, il faut comprendre en quoi ils consistent. Donner des explications chimiques ne répond pas aux interrogations. C'est comme si on déclare que la quantité d'eau diminue dans une casserole en ignorant qu'elle est posée sur un réchaud allumé. On annonce une conséquence en ignorant la cause et ses effets précis : le feu, l'ébullition et l'évaporation. C'est seulement en identifiant la cause, le feu allumé, qu'on peut chercher à agir directement et efficacement sur elle.

L'humeur bonne ou mauvaise de nous tous ne dépend que plus ou moins de ce qui nous arrive. Il en est de même pour l'appétit. On peut avoir faim quand n'a pas besoin de manger, et alors trop manger, grossir, se rendre malade. Inversement, on peut ne pas avoir faim quand on a besoin de manger, et alors ne pas manger, maigrir, s'affaiblir, se rendre malade. Avec l'anorexie, cela peut aller jusqu'à la mort.

De même, nous pouvons être triste alors que tout va bien et joyeux alors que tout va mal, sans pour autant être classé « bipolaire ».

Il y a plusieurs années, j'ai entendu dire que notre appétit était réglé par un organe baptisé « adipostat ». Quand il se déréglait, notre appétit se déréglait. Pour essayer de comprendre ce qui arrive, avançons l'hypothèse de l'existence d'un organe comparable, réglant les humeurs en général. Nous l'appelleront « humeurostat ».

Les troubles « bipolaires » seraient le résultat de son dérèglement. Pourquoi ceux-ci surviendraient et comment parvenir à y remédier ?

Notre humeur serait au moins en partie réglée par nos besoins primitifs, c'est-à-dire les besoins du singe qui vit toujours en nous. Quand ceux-ci sont perturbés, peut arriver un dérèglement de l'humeur. Prendre conscience de la forme de ce dérèglement permettrait d'y remédier. Cette prise de conscience expliquerait la guérison inexplicable et spontanée d'un faible nombre de malades dits « bipolaires ». Les troubles « bipolaires » pourraient trouver leur origine dans le sevrage calinique.

Basile, philosophe naïf, Paris le 27 octobre 2012

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