dimanche 26 janvier 2014

216 À propos de l'actuelle révolution ukrainienne

Mon défunt père était un aristocrate né en 1909 à Saint-Pétersbourg dans un milieu de nobles militaires de carrière russes et tsaristes. Il me disait avec animosité à chaque fois qu'il en parlait : « les Ukrainiens sont des Russes ! » Pourtant, il n'avait aucun intérêt personnel à le dire. Son propos illustrait en fait que la négation de l'identité nationale ukrainienne est une tradition chez certains Russes. Et les relations entre la Russie et l'Ukraine sont loin d'avoir toujours été fraternelles et amicales. L'histoire en témoigne. 
 
Quand eu lieu la Révolution d'octobre 1917, les bolchéviks prirent le pouvoir. En mars 1918, par le traité de Brest-Litovsk, le gouvernement bolchévik livra l'Ukraine aux Allemands, en échange de la paix. Le contenu de ce traité était, certes, imposé par l'impérialisme allemand, mais un tel acte laisse des traces. D'autant plus quand il émane du gouvernement russe.

Peu après, l'armée anarchiste ukrainienne de Nestor Makhno chassa les Allemands d'Ukraine, si j'en crois une belle chanson qui parle de ladite armée.

Les Ukrainiens n'étaient pas au bout de leurs peines dans leurs relations avec les Russes. Par la suite, convoqués par les bolchéviks au côté desquels ils combattaient les gardes blancs, l'ensemble des officiers de Makhno tombait dans un piège et était fusillé. Épisode peu glorieux de l'histoire de la guerre civile où on voit une des parties en présence se débarrasser par traitrise d'un allié.

L'entrée de l'armée rouge en pays cosaque suscita le soulèvement des cosaques contre celle-ci. Cela se passait aussi en Ukraine.

Vint la fin de la guerre civile en Russie et la victoire des bolchéviks. Les ennuis des Ukrainiens dans leurs rapports avec les Russes ne s'arrêtèrent pas là. L'ensemble du Comité central du parti communiste ukrainien sera exterminé par les soins d'un serviteur du régime de Staline. Ce serviteur devait devenir plus tard célèbre. Il s'agissait de Nikita Khrouchtchev. Parmi les chefs communistes de l'Ukraine ainsi assassinés figurait un des principaux leaders bolcheviks, un Roumain d'origine bulgare connu sous le nom de Christian Rakowski. Président du Conseil des commissaires du peuple d'Ukraine en 1919, arrêté en 1937, il sera fusillé en 1941.

Bien plus tard, Khrouchtchev devait dire que Staline envisagea la déportation de l'ensemble du peuple ukrainien et renonça face à l'ampleur de la tâche. C'est dire qu'il détestait ce peuple.

Au début des années 1930 les Ukrainiens subirent une famine qui fit des millions de morts. Elle fut voulue, organisée par le pouvoir central de Moscou.

Cet événement est resté dans la mémoire collective ukrainienne sous le nom d'Holodomor.

L'Ukraine, grand et vieux pays d'Europe habité aujourd'hui par plus de 45 millions d'habitants, a continué à être niée par le pouvoir russe. Du temps de l'URSS ce pays était aux abonnés absents. Personne n'en parlait en France, par exemple. Les universités d'Ukraine dans les années 1960 donnaient leurs cours en russe et pas en ukrainien.

Chaque fois qu'en URSS quelqu'un s'avisait de protester contre la situation faites aux Ukrainiens, il se retrouvait immanquablement pourchassé en qualité de « nationaliste petit-bourgeois ».

Toutes ces choses laissent des traces dans la mémoire du peuple ukrainien. Quand, il y a quelques mois, fut annoncé un accord privilégié avec la Russie, décidé par le gouvernement ukrainien, quantité d'Ukrainiens se se sont sentis trahis, vendus aux Russes.

L'Europe libérale, de son côté, avait proposé un accord de merde à l'Ukraine. Accord dont les ultra-libéraux européens ont le secret. Réformes dites « de structure » pour foutre en l'air l'économie ukrainienne et la rendre bien libérale, etc. Cet accord fut rejeté par le gouvernement pro-russe d'Ukraine. Quoi qu'on pense des motivations de ce rejet, n'oublions jamais que l'accord proposé par l'Europe était un accord de merde concocté par les mêmes spécialistes qui affament le peuple grec. Et, en collaboration avec les Medefistes de « droite » ou de « gauche », planifient la destruction des services publics et de l'économie françaises.

L'accord privilégiant la Russie avait provoqué la colère d'un grand nombre d'Ukrainiens. S'ajoutait à ce sentiment l'indignation soulevée par le train de vie luxueux du président Ianoukovitch. Puis le mécontentement amené par la violence de la répression des protestations.

Et, enfin, la goutte qui a fait déborder le vase, la décision d'adopter des lois mettant en place une dictature. Punissant notamment de cinq années de prison le blocage des bâtiments officiels, réprimant le port de casques et masques dans les manifestations, etc. Un train de mesures qui rappelle la sinistre « loi matraque » que tenta d'imposer le gouvernement québécois. Et qui entraina des protestations qui le firent tomber. En somme, décider « démocratiquement » d'instaurer la dictature.

Loin d'être des manifestations d'amour pour Barroso, le soulèvement actuel du peuple ukrainien est d'abord une révolte dirigé contre la tutelle russe, le luxe du président ukrainien et sa tentative d'instaurer une dictature.

Comme disait un manifestant dernièrement : « je préfère descendre dans la rue protester maintenant plutôt qu'attendre qu'on vienne me chercher chez moi ».

Certains médias français répètent que les manifestants ukrainiens ne témoignent que de sentiments « pro-européens ». Il faudrait dire : anti-russe, anti-dictature, anti-Ianoukovitch. Et aussi, accessoirement, leurs motivations ont pour origine quelques illusions sur l'Europe. L'Europe des capitalistes ultra-libéraux qui est une belle saloperie et se garde bien de les aider. Car elle déteste tous les peuples d'Europe et du monde, notamment les peuples russe et ukrainien. Et n'aime que l'argent. On la voit bien à l’œuvre, quand, via le gouvernement français à ses ordres elle ferme aujourd'hui maternités et hôpitaux de proximité, et services d'urgences, comme celui de l'Hôtel Dieu de Paris. Si elle est prête à provoquer ainsi une catastrophe sanitaire en France, que vaut pour elle le sort et la liberté du peuple ukrainien ? Rien du tout, seule l'adoration du Veau d'or intéresse Barroso et ses amis, au nombre desquels notre très sarkozo-démocrate président scootériste.

Que va donner la révolution ukrainienne ? Certainement que d'ores et déjà interviennent massivement en Ukraine tous ceux qui souhaitent qu'elle échoue. Et n'apporte rien de bon au peuple ukrainien. On peut supposer que l'argent russe alimente une part de la résistance du gouvernement pro-russe d'Ukraine. Les unités de police qui font face aux manifestants touchent peut-être de très belles primes, comme cela arrivait en Angleterre, pour la police anglaise, quand Madame Thatcher réprimait la grande grève des mineurs de son pays. Toutes les hypothèses sont possible. Le matériel anti-émeute est peut-être d'origine française ? Allez savoir ! En tous cas, les fées Carabosse ne manquent pas pour se pencher sur le berceau de la Révolution ukrainienne. Il faut espérer que, malgré tout, celle-ci finira par apporter quelque chose de bien. En tous cas, dans la suite de la révolution tunisienne, l'Ukraine nous apporte la première révolution européenne depuis la Révolution des œillets qui fit tomber la dictature au Portugal en 1974. 

Basile, philosophe naïf, Paris le 26 janvier 2014

jeudi 23 janvier 2014

215 Gaspillages rentables et programmés, sabotage de la recherche médicale

Au début des années 1960, quand j'étais petit, l'atelier familial où j'habitais, dans le quatorzième arrondissement de Paris, était chauffé au charbon. La société qui nous le livrait avait une petite boutique près de la place d'Alésia. L'employée, une dame que mes parents avaient surnommé « la bougnate », était communiste. A ma mère, elle donnait régulièrement des piles d'Humanité, qu'elle avait lu, et aussi des numéros de Vaillant, le journal communiste pour les enfants, que lisait son fils.

En dernière page de l'Humanité figuraient souvent des petites nouvelles originales. Je me souviens très bien d'une d'entre elles. Elle disait qu'on venait de mettre au point une machine à laver sans lessive ! Elle utilisait des buses projetant des multitudes de micro-bulles nettoyant le linge ! Et puis, plus rien depuis. Il faudra, si on en croit Internet, attendre le début des années 2000 pour qu'apparaissent enfin dans le commerce des machines à laver le linge n'employant que l'eau et pas de lessive. Elles sont plutôt chères. L'information du début des années 1960 était-elle fausse ? En y repensant, je dirais qu'une hypothèse est bien plus vraisemblable. La machine en question a certainement existé. Les trusts de la lessive, qui sont extrêmement riches et pollueurs, ont du racheter le brevet et l'enterrer. Ainsi va « le progrès » à l'ombre du capitalisme.

Une autre affaire illustre ce type de situation. Ma mère a raconté devant moi l'histoire suivante : peu après la seconde guerre mondiale sont apparus à Paris les premiers bas pour dames en nylon. Ceux-ci étaient absolument indestructibles ! Pourtant, bien vite la qualité a subitement baissée. Elle s'est même effondrée. Et les bas nylon devenus très fragiles se déchiraient pour un rien. « Filaient », selon l'expression consacrée. Les fabricants ont ainsi assuré l'importance de leurs marges. Cette histoire a été évoquée dans un documentaire passé sur Arte les 15, 18 et 24 février 2011 sous le nom bien évocateur de : « Obsolescence programmée ». On y apprenait également qu'a été mise au point une ampoule électrique d'une durée de vie de 100 000 heures, qui n'a jamais été commercialisée. Qu'on a, bien au contraire, fait un long travail de recherches pour mettre au point des ampoules dont la durée de vie ne dépasse pas 1000 heures !

Cette politique s'exprime également avec la date de péremption des produits frais. Trois jours avant celle-ci, ils sont retirés de la vente en métropole. En revanche, on trouve les mêmes produits à la Réunion dotés de dates limites complètement différentes. Ainsi, les yaourts sont là-bas bons pour la vente durant deux mois. Ils le sont effectivement ! Mais, pour des raisons commerciales, on préfère en métropole les jeter bien avant ! Exactement comme la lessive inutile dont on a déversé des centaines de milliers de tonnes dans la Nature depuis le moment où on a empêché la commercialisation des machines à laver le linge n'employant pas de lessive !

Il existe un autre chapitre noir de cette criminelle rentabilité, concernant la recherche médicale. On sait qu'il existe des « maladies orphelines ». Des maladies pour lesquelles les efforts de recherches manquent, car ils ne seraient pas commercialement rentables. Il existe aussi, fait à relever, des directions de recherches qu'on évite pour cause de non rentabilité. Ou dont on ferme le chemin.

On se souvient du lynchage public organisé contre le docteur Jacques Benveniste, scientifique français coupable d'avoir donné une validité scientifique à l'efficacité des dilutions homéopathiques. Il existe aussi des absences de recherches sur des utilisations nouvelles de médicaments anciens, tombés dans le domaine public. J'en connais au moins un : l'Allergine, extrait du bacille de Koch par le professeur de médecine André Jousset en 1903. Il l'a étudié durant plus de trente ans.

Ainsi va le capitalisme. Certains nous disent qu'il rapporte. Je crois qu'il coute surtout à la collectivité. Et rapporte seulement à quelques-uns.

Basile, philosophe naïf, Paris le 23 janvier 2014

mercredi 22 janvier 2014

214 Justice un jour sera rendue pour nos hôpitaux et maternités

Être riche, c'est « posséder » beaucoup de richesses, mais, que signifie « posséder » ?

C'est un sentiment éprouvé vis-à-vis d'une chose. Mais, quel genre de sentiment ?

Quand je suis né, une amie de ma mère a amené à la maison une petite breloque égyptienne, peut-être antique, et a dit : « c'est pour le bébé ».

Donc, théoriquement, je possède cet objet. Au départ, je n'en sais rien. Puis, on me le montre. Et, à un certain âge, je commence à me dire : « c'est à moi ». Le fait que je me le dise ne change strictement rien à cet objet. Si on admet qu'il est « antique », on peut imaginer que des centaines d'autres personnes, avant moi, se sont dit la même chose. Ça n'a rien changé à cet objet. Ces gens sont morts depuis très longtemps pour certains. Leur sentiment de propriété passé confine ici à un léger ridicule. Cet objet existe indépendamment de leurs « possesseurs ».

Mais parlons à présent des très riches. Ils « possèdent » des milliards d'euros ou de dollars, des milliers d'hectares de terre, des mines, etc. Et, par cet excès de propriété, empêchent des milliards de gens de vivre décemment. Quelle satisfaction peut bien leur apporter cette honteuse propriété ?

Je suis porté à penser que cette satisfaction est d'ordre largement sexuelle. Se sentir « posséder » quelque chose est un sentiment apparenté à ce qu'on ressent quand on a « fait l'amour » de façon agréable et satisfaisante.

D'ailleurs, ne dit-on pas « posséder », « prendre », pour s'accoupler ?

Que le sentiment de propriété ait un caractère sexuel dévoyé, est confirmé également par le fait que les très riches sont généralement des détraqués sexuels. On les voit très fréquemment obsédés et boulimiques sexuels, aimant les orgies et le dépassement, y compris criminel, des interdits sexuels. Quitte à s'attirer parfois de graves ennuis en dépit des protections dont ils disposent.

En résumé, le désir de posséder le plus d'argent possible est une maladie.

C'est aussi le point de vue de J.M. Keynes, qui a écrit : « L'amour de l'argent comme objet de possession — distinct de l'amour de l'argent comme moyen de goûter aux plaisirs et aux réalités de la vie — sera reconnu pour ce qu'il est, une passion morbide plutôt répugnante, une de ces inclinations à moitié criminelles, à moitié pathologiques, dont on confie le soin en frissonnant aux spécialistes des maladies mentales. » (J. M. Keynes, Perspectives économiques pour nos petits enfants in Essais de Persuasion, 1930, Les Classiques des Sciences Sociales)

Les maîtres du monde économique seraient donc en fait des malades, atteints de « démence financière ». Une maladie requérant les soins attentifs de la Faculté.

Soins comprenant l'enlèvement de leurs richesses. De même que les grands alcooliques sont quelquefois sevrés de force, dans les cas les plus désespérés.

Les grands patrons m'inspirent de la pitié. Sauf, ceux, bien sûr, qui ont un comportement criminel. Et doivent être autant soignés que poursuivis et jugés. Un jour viendra où ceux qui démantèlent l'économie et le système de santé en France seront jugés pour crimes contre la société, par une Haute Cour de Justice. Ils ont tort aujourd'hui d'être insouciants.

Basile, philosophe naïf, Paris le 22 janvier 2014

213 Non à la fermeture de l'Hôtel Dieu par les riches et leurs serviteurs !

Sébastien Fourmy, du directeur des campagnes d'Oxfam France.

Comment ont évolué les inégalités économiques depuis la crise?

Elles se sont amplifiées rapidement, dans la plupart des pays. La crise n'a eu qu'un impact limité dans le temps sur les plus riches, qui se sont depuis considérablement enrichis tandis que les plus pauvres se sont appauvris. Les 1% les plus riches possèdent près de la moitié de la richesse mondiale tandis que 99% de la population se partage l'autre moitié. Les 85 plus grosses fortunes mondiales possèdent autant que 3,5 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale. Ce creusement des inégalités n'est pas réservé aux pays riches : il se constate aussi dans les économies émergentes et les pays pauvres.

Quelles sont les causes de ce creusement des inégalités?

Il est en grande partie dû à la déréglementation financière et à l'évasion fiscale. Cette fraction de la population la plus riche évolue en dehors des règles fiscales qui s'appliquent à la majorité des citoyens. Par ailleurs, cette population privilégiée a non seulement accaparé les richesses, mais aussi confisqué le pouvoir politique. Ce sont les riches élites qui gouvernement et qui dès lors servent leurs propres intérêts.

En savoir plus sur http://lexpansion.lexpress.fr/economie/les-riches-ont-confisque-le-pouvoir-et-gouvernent-pour-servir-leurs-interets_424798.html#8JP5HmRoJkTU4rwV.99
Sébastien Fourmy, du directeur des campagnes d'Oxfam France.

Comment ont évolué les inégalités économiques depuis la crise?

Elles se sont amplifiées rapidement, dans la plupart des pays. La crise n'a eu qu'un impact limité dans le temps sur les plus riches, qui se sont depuis considérablement enrichis tandis que les plus pauvres se sont appauvris. Les 1% les plus riches possèdent près de la moitié de la richesse mondiale tandis que 99% de la population se partage l'autre moitié. Les 85 plus grosses fortunes mondiales possèdent autant que 3,5 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale. Ce creusement des inégalités n'est pas réservé aux pays riches : il se constate aussi dans les économies émergentes et les pays pauvres.

Quelles sont les causes de ce creusement des inégalités?

Il est en grande partie dû à la déréglementation financière et à l'évasion fiscale. Cette fraction de la population la plus riche évolue en dehors des règles fiscales qui s'appliquent à la majorité des citoyens. Par ailleurs, cette population privilégiée a non seulement accaparé les richesses, mais aussi confisqué le pouvoir politique. Ce sont les riches élites qui gouvernement et qui dès lors servent leurs propres intérêts.

En savoir plus sur http://lexpansion.lexpress.fr/economie/les-riches-ont-confisque-le-pouvoir-et-gouvernent-pour-servir-leurs-interets_424798.html#8JP5HmRoJkTU4rwV.99
Sébastien Fourmy, du directeur des campagnes d'Oxfam France.

Comment ont évolué les inégalités économiques depuis la crise?

Elles se sont amplifiées rapidement, dans la plupart des pays. La crise n'a eu qu'un impact limité dans le temps sur les plus riches, qui se sont depuis considérablement enrichis tandis que les plus pauvres se sont appauvris. Les 1% les plus riches possèdent près de la moitié de la richesse mondiale tandis que 99% de la population se partage l'autre moitié. Les 85 plus grosses fortunes mondiales possèdent autant que 3,5 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale. Ce creusement des inégalités n'est pas réservé aux pays riches : il se constate aussi dans les économies émergentes et les pays pauvres.

Quelles sont les causes de ce creusement des inégalités?

Il est en grande partie dû à la déréglementation financière et à l'évasion fiscale. Cette fraction de la population la plus riche évolue en dehors des règles fiscales qui s'appliquent à la majorité des citoyens. Par ailleurs, cette population privilégiée a non seulement accaparé les richesses, mais aussi confisqué le pouvoir politique. Ce sont les riches élites qui gouvernement et qui dès lors servent leurs propres intérêts.

En savoir plus sur http://lexpansion.lexpress.fr/economie/les-riches-ont-confisque-le-pouvoir-et-gouvernent-pour-servir-leurs-interets_424798.html#8JP5HmRoJkTU4rwV.99
Vivent aujourd'hui sur Terre sept milliards d'humains, dont 70 millions d'ultra privilégiés. Ce 1 % de la population mondiale, formé des plus riches, possède presque la moitié des richesses de tous les humains ! Les 99 % restants, dont vous et moi, je ne pense pas que les ultra-riches lisent mon blog, se partagent le reste. Et les 85 plus gros riches possèdent autant que les trois milliards cinq cents millions d'humains les plus pauvres, soit la moitié de l'Humanité. Ça n'est nullement en train de s'améliorer, bien au contraire. Les inégalités augmentent très vite et partout, dans les pays prospères comme dans les pays misérables ! Les riches ne souffrent absolument pas de la crise. L'enrichissement des plus riches s'explique par la modification des règlementations financières. Et par le fait d'échapper aux impôts. Et aussi, parce que ces mêmes riches ont confisqué le pouvoir politique. Et s'en servent selon leurs intérêts.

En lisant cela, vous vous direz : "voilà encore un discours révolutionnaire, anarchiste, bolchévik, mélenchonien !" Nenni, Messieurs, ces informations ne sont pas données par un comité insurrectionnel quelconque. Elles émanent de Sébastien Fourmy, directeur des campagnes de l'association Oxfam France. Et figurent aujourd'hui, 22 janvier 2014, en première page du site Internet du journal L'Expansion, peu susceptible d'être considéré comme révolutionnaire anti-capitaliste. L'intérêt pour les inégalités, dont témoigne ce journal, vient de ce que celles-ci ont été mises à l'ordre du jour du Forum de Davos, un rassemblement annuel des très riches en Suisse. Où se rencontrent les très riches et leurs serviteurs politiques, au nombre desquels cette année quarante de leurs valets affichant la ronflante charge officielle de "chefs d'états". Tout ce beau monde s'intéresse aux inégalités, non pas pour les réduire, mais pour considérer les risques financiers qu'elles pourraient faire courir à l'enrichissement des privilégiés. Cette dernière précision n'est pas de moi, mais du journal L'Expansion.

En écho exact aux informations données par L'Expansion, les patrons les plus riches versent en ce moment des larmes de crocodile pour nous assurer qu'ils manquent d'argent. Qu'ils n'en peuvent plus de l'argent qu'on leur demande pour participer aux efforts de la collectivité ! Ouin ! Ouin ! Snif ! Snif ! Et les gouvernements, de "droite" comme de "gauche", répondent présents. Pour exonérer les ultra-riches de contributions sociales rebaptisées "charges sociales", d'impôts, taxes, etc. Et les ajouter sur le dos de la masse des contribuables.

Et, partout, on ferme hôpitaux, maternités, services publics divers, avec ce credo inlassablement répété : "il n'y a pas d'argent, il faut faire des économies sur le dos des petits, des pauvres, des "ménages", comme ils disent. Il faut l'austérité. Il n'y a pas d'autres alternatives que vous appauvrir, vous, les pauvres. Et enrichir les autres."

C'est ainsi, au nom de cette même saloperie d'austérité, qu'on a fait passer le nombre des hôpitaux de l'Assistance publique de Paris de cinquante à trente-sept. Ça s'est passé ces dernières années. Et ça n'est pas fini ! En ce moment les bienfaiteurs des riches sont en train de fermer le seul hôpital central de Paris, l'Hôtel Dieu, pour le transformer à terme en palace de luxe. Comme ils l'ont déjà fait avec les Hôtel Dieu de Lyon et Marseille. Et ont en ligne de mire pour les faire disparaître les hôpitaux parisiens Beaujon et Bichat, et Avicenne, en Seine-Saint-Denis. 

Je suis heureux de faire partie du Comité de défense de l'Hôtel Dieu. Depuis que son service d'urgences a fermé le 4 novembre 2013, les attentes aux urgences des autres hôpitaux parisiens atteignent jusqu'à seize heures et plus. On sait que les longues attentes sont mortifères. C'est connu, prouvé, démontré, exposé dans des publications scientifiques, notamment américaines. Les responsables de la situation calamiteuse des urgences parisiennes s'en foutent. Ils ne pensent qu'à servir la soupe aux plus gros cochons. Interdisent aux pompiers et ambulances de revenir aux urgences de l'Hôtel Dieu. Et privent celles-ci du personnel nécessaire. En attendant de les liquider complètement, avec le reste de l'Hôtel Dieu, après les élections municipales de mars 2014. Ce boulot étant à la charge du nouveau directeur général de l'Assistance Publique, Monsieur Martin Hirsch, spécialiste des déclarations sédatives. Un nom qui lui conviendrait mieux, c'est Martin "Sédatirsch". Si vous me demandez ce que je pense de Monsieur "Sédatirsch", je vous répondrais : "mon avis est le même que celui de la CGT de l'Hôtel Dieu".

Il existe un site Internet : cyber-urgences, qui donne, en temps et en heure le degré de fréquentation et de surcharge des urgences parisiennes. Ceux qui ferment l'Hôtel Dieu ont tout dernièrement proposé... de modifier le mode de fonctionnement de ce site afin que la situation dramatique des urgences parisiennes n'y apparaisse plus ! Bravo, les truqueurs !

Entendez les divers guignols des médias et de la politique. Ils n'arrêtent pas de nous glapirent de nous serrer la ceinture. De couiner que nous devons accepter leurs saloperies au nom des "nécessités économiques", du "manque d'argent", de la très sainte et très sacrée "crise", de l'euro et l'Europe de merde, et demain du Grand Marché Transatlantique merdissime. Entendez tous ces illusionnistes... et souvenez-vous bien des informations données par le journal L'Expansion !

Et aussi du vieux proverbe français : "tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin elle se casse".

Ah oui, pourront se dire certains, les divers voleurs les plus riches possèdent la plus grande partie de la richesse matérielle du monde. Mais la vraie richesse humaine, ce sont les humains. Et, un jour, 1 % des humains ne feront pas le poids face aux 99 % restants. Il serait bon que les plus riches s'en souviennent. Et redistribuent avant que d'autres s'en chargent. Ce serait mieux pour tout le monde et la paix.

Je suis convaincu qu'une très grande chance pour moi a été de ne pas être riche. Elle m'a protégé des flatteurs, profiteurs, hypocrites et autres parasites qui tournent autour des riches à la façon de mouches autour d'un bout de viande pourrie. Je n'ai jamais volé un pauvre. Et n'ai pas besoin d'une armée de gardes du corps pour aller me promener, à pied ou en scooter. D'ailleurs, je n'ai pas les moyens de m'en acheter un. Ni de me faire livrer les croissants le matin.

Basile, philosophe naïf, Paris le 22 janvier 2014 

lundi 20 janvier 2014

212 L'homme disloqué

Quand l'humain est nouveau-né, c'est un petit singe sauvage. La quantité d'aspects de sa vie que l'éducation, véritable dressage, va modifier, contrarier, nier, est invraisemblable.

Ainsi, par exemple : toutes émissions est prohibée. Si elle n'est pas évitable, elle est condamnée, mal vue, à cacher.

Au nombre de celles-ci : vomir, baver, pisser, péter, chier. Mais aussi d'autres, qui n'ont pas de noms précis : sentir, c'est-à-dire dégager des odeurs corporelles naturelles. Émettre de la morve. Le verbe n'a pas été inventé pour. Je l'invente : morver. Dégager du cérumen, idem : cérumener. Et, dans le régistre sexuel "adulte"  : spermer, cypriniser, cowperiser.

A propos de ce dernier verbe : les glandes de Cowper émettent une substance translucide et gluante. Elle n'a pas de nom simple. Certains disent : liquide de Cowper. D'autres : liquide pré-éjaculatoire. Cette dernière qualification est impropre, car l'éjaculation peut très bien ne pas suivre. Je propose : cowpérine, mot bâti sur le modèle de son équivalent féminin, la cyprine. Ou encore, plus poétiquement, salive d'amour.

Autre interdit inculqué, infligé au petit singe humain : gouter, toucher, jouer avec ce qu'il émet.

Le toucher est limité par les vêtements, les interdits. Même se toucher certaines parties de soi est prohibé. Toutes pénétrations est interdite ou mal vue : se mettre le doigt dans la bouche, le nez, les oreilles, le vagin ou l'anus. Palper diverses parties des grandes personnes, comme les seins des dames.

Il est interdit de voir, laisser voir, montrer, chercher à montrer, diverses zones de l'épiderme ou des muqueuses, en particulier la langue, le sexe et l'anus.

Un membre humain est condamné en général : la langue. Il est défendu de lécher, excepté les glaces et les cigares. Tirer la langue, l'enfoncer dans la bouche ou l'oreille de quelqu'un est interdit.

Tout geste considéré comme ayant une connotation sexuelle est prohibé.

On habitue le petit humain à accepter et approuver certaines choses qu'il trouve désagréable. Comme se lever le matin quand il n'a pas envie de quitter son lit. A en condamner d'autres qu'il trouve agréable, comme manger un grand paquet entier de sucreries.

Tous ces interdits conduisent l'être humain à la dislocation. Il n'est plus uni. Certains aspects de sa personne sont dissociés d'autres aspects. Il se met à croire qu'il a "un corps" distinct, différent du reste de lui-même.

Quand arrive l'âge où il commence à pouvoir se reproduire, nouvelle dislocation : on lui fait croire que sa personne sexuelle existe, différente de sa personne ordinaire.

La seule fois où, jeune homme, j'ai déclenché la colère et l'indignation paternelles, c'est quand j'ai donné à lire à mon père un texte où apparaissait la phrase : "le sexe est une partie du corps comme une autre".

Aujourd'hui, je dirais plutôt : "en dépit de tous les discours, nous sommes un et le restons".

Quand on croit qu'il existe "la sexualité", on se retrouve avec de petits scénarios pré-écrits. A tel moment d'une relation, elle deviendrait "sexuelle". Et obéirait soi-disant à des règles particulières, différentes des autres régissant notre vie. Nous cessons d'être éveillés et consciemment présents dans l'instant présent et l'espace où nous sommes. Et obéissons à un scénario. Nous endormons dedans. L'échec relationnel, la déception sentimentale, suivent obligatoirement.

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 janvier 2014

211 La glace aux myrtilles de Vallouise, le coucher de soleil sur la baie de Saint Florent et l'orgasme de mes 22 ans

L'échelle des importance que nous nous concoctons fini par formaliser à tort des événements uniques et en faire des modèles d'objectifs à atteindre.

Vers le début des années 1980, je plantais ma tente dans le camping de Vallouise, en France, dans les Alpes du sud. Je campais avec mon ami Podo. Un jour, nous sommes allés dans une sorte de restaurant local où nous avons commandé chacun une glace aux myrtilles.

Celle-ci m'a laissé un souvenir unique et inoubliable. Il s'agissait d'une très grande et copieuse glace comme je n'en ai jamais mangé, ni avant, ni depuis. C'était une glace absolument artisanale, très bien faite à base et avec des myrtilles cueillies fraichement dans la montagne alentour.

En août 1993, j'étais en vacances en Corse au camping de Marina di Farinole. Un soir, sur la baie de Saint Florent, j'ai vu un coucher de soleil fantastiquement beau. Les couleurs multiples et très variées formaient une symphonie sans pareille, unissant le ciel en couleurs avec l'eau de la mer les reflétant.

En 1973, un soir, je me suis uni avec ma copine. Et, pour l'unique fois de ma vie, en m'accouplant, j'ai littéralement "grimpé aux rideaux". Et ressenti quelque chose d'extraordinaire en éjaculant à l'intérieur d'une femme.

Je remarque aujourd'hui ceci :

Bien qu'appréciant toujours le souvenir gustatif de la glace aux myrtilles de Vallouise, je ne me suis jamais torturé les méninges à ressasser son souvenir. Et vouloir à tous prix éprouver le même sentiment de perfection gustative en mangeant une des quelques centaines de glaces que j'ai mangé depuis cette glace unique et inoubliable.

J'ai vu de très nombreux couchers de soleil, y compris sur la mer. Pas une fois, en les observant, je me suis dit : "pourvu qu'il soit aussi beau que celui que j'ai admiré un soir sur la baie de Saint Florent".

Cette glace, ce coucher de soleil, sont toujours restés pour moi des moments uniques, passés et merveilleux.

En revanche, pourtant, que d'années j'ai pensé à l'orgasme unique de mes 22 ans en me disant vouloir le retrouver avec une autre femme à un autre moment !

Cette démarche est totalement absurde et stupide. Un moment unique passé reste un moment unique et c'est tout.

Je crois que d'autres que moi se sont empoisonnés la vie et se l'empoisonnent encore en oubliant de traiter leurs meilleurs souvenirs d'amour comme la glace aux myrtilles de Vallouise et le coucher de soleil sur la baie de Saint Florent.

La vie est un ensemble où s'inscrivent différents souvenirs. Aucun n'est appelé à se reproduire, si beaux soient-ils. Sachons les apprécier à leur juste valeur et juste place.

Rien ne se répète. Chaque instant est unique, nouveau et appréciable dans sa nouveauté.

La vie est remplie de glaces aux myrtilles, couchers de soleil et orgasmes précieux, innombrables et merveilleux.

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 janvier 2014

210 Incohérence dans l'échelle des importances

Il existe une chose par rapport à laquelle l'incohérence est très fréquente dans l'échelle des importances que se fabrique les individus. Il s'agit de l'acte sexuel et son opportunité. Cela se comprend. Car s'il est bien une activité totalement nouvelle par rapport à la petite enfance, c'est bien celle-là. Elle frappe donc naturellement l'imagination.

A croire l'échelle des importances chez bien des gens, il faudrait systématiquement rechercher ou éviter l'acte sexuel. Cette activité serait tout à fait à part du reste. Totalement originale, elle suivrait ses propres règles. Qui fonctionneraient comme des obligations.

Ainsi, on rencontre quantité de personnes qui s'imagine que si la possibilité existe de « faire l'amour », il faut ne pas la rater. Cette pseudo-obligation confine à la caricature. On fini par s'accoupler avec des êtres qui nous dégoûtent, ne nous intéressent pas.

L'absurdité du concept des bonnes occasions à ne pas manquer s'apparente à l'idée que si on peut manger, on doit manger. C'est une sorte de boulimie sexuelle.

Au début des années 1970, j'ai entendu à la faculté Dauphine à Paris un propos illustrant bien cette manière de penser : « si on a l'occasion de faire l'amour, il faut le faire, ça ne peut pas faire de mal. »

Eh bien si, justement, ça peut faire beaucoup de mal. Une amie me disait récemment, parlant d'une relation amoureuse qui s'était achevé dans l'échec et l'amertume : « on a fait l'amour sans savoir pourquoi on le fait ». Cette jeune femme et son copain se sont laissés prendre par leurs échelles des importances. Elle leur a dicté une conduite étrangère à eux-mêmes. Quand il a été possible de « faire l'amour », ils ont suivi le programme sans savoir trop ce qu'ils faisaient. Et ça a ravagé leur bonne relation amicale de départ.

Prétendre que, quand « faire l'amour » est possible, il faut le faire, revient à obéir à son pénis ou son vagin. Est-ce bien raisonnable ? Certains prétendront qu'on ne peut pas faire autrement. A quoi je rétorquerais qu'on peut très bien faire autrement. Encore faut-il savoir renoncer à céder à la pression sexualisante ambiante. Et surtout savoir corriger notre échelle des importances malmenée par celle-ci.

Jusqu'à l'âge de vingt-deux ans, je n'éprouvais aucune envie de faire l'amour avec qui que ce soit et m'en portais très bien. Puis, ma mère et le médecin de famille ont développé une pression intense pour que je me mette en règle de ce côté-là. Sagement, j'ai obéi. Et, une fois que l'aventure de six mois que j'ai connu s'est terminé, j'ai intégré à mon échelle des importances ce mot d'ordre stupide : « il faut » ou « il ne faut pas » faire l'amour.

Ce parasitage a duré quarante années. Aujourd'hui, que j'ai pu enfin m'en débarrasser, je me dis : « il faut vivre, être soi-même ». Et cela peut impliquer, ou ne pas impliquer, de « faire l'amour », chose absolument secondaire. Et à ne pas ramener artificiellement dans une relation sympathique où elle n'a nullement lieu obligatoirement d'être. Quand bien-même la planète entière raisonnerait différemment. Et la rumeur publique me hurlerait à l'oreille que mon intérêt, mon plaisir et mon devoir est de baiser.

Ceux qui n'arrêtent pas de chercher à satisfaire un besoin imaginaire, rencontrent presque toujours l'insatisfaction. Finissent par chercher à l'oublier dans des compensations, des addictions. Deviennent amers et jaloux. Et restent malheureux. Sans arriver à comprendre pourquoi ce qui leur paraît si simple, finalement ne marche jamais.

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 janvier 2014

209 Échelle des importances et malentendus

A un moment-donné, le jeune humain commence à franchir la clôture des adultes qui lui dissimulait bien des choses. Il commence alors à établir son échelle des importances personnelle. Pour cela, il lui est tentant de chercher un guide. 

Soit de suivre l'exemple de certaines personnes de son entourage. Soit de chercher à se déterminer par rapports aux règles établies. Ces deux manières d'agir pouvant n'en faire qu'une. Si on suit l'exemple de personnes proches qui cherchent à se déterminer par rapport aux règles établies.

Un exemple est donné par la "pudeur corporelle". Le jeune humain peut adopter la croyance comme quoi il est essentiel de cacher certaines parties de son épiderme à la vue d'autrui. Il existe pourtant des peuples qui vivent nus. Et nos ancêtres également se sont certainement promenés durant de nombreux millénaires en ne portant aucun vêtements sur eux.

Parfois, j'ai rencontré des personnes qui, étrangement, ignoraient totalement ces préjugés concernant la nudité. Ils baignaient pourtant dans une société qui en est imprégné.

Je me souviens en particulier de deux cas. Vers le début des années 1980, j'étais avec ma mère et une amie en visite chez une dame qui vivait avec son compagnon et ses deux grands enfants. Le plus jeune, une fille d'environ quatorze ans, au moment d'aller se coucher, se baladait allégrement, vêtue juste d'un haut assez court. Le cul parfaitement nu, elle ne paraissait y accorder aucune importance particulière.

L'autre cas similaire concerne une étudiante iranienne de Paris. Elle m'avait invité à assister à un cours de capoeira où elle était élève. Il n'y avait pas de vestiaire. Au moment de se changer pour pratiquer son sport, cette grande jeune fille brune ôte divers vêtements. Exhibe sans problème sa toison pubienne. Et fini de se changer comme si de rien n'était.

Il n'y avait aucune malice, aucun calcul exhibitionniste, à mon avis, dans ces deux exemples apparemment surprenants. En fait, l'échelle des importances de ces deux filles n'accordait aucune importance particulière à la nudité, fut-elle susceptible de laisser voir les organes génitaux.

L'échelle des importances s'applique exactement comme une sorte de loi originale propre à la personne qui l'adopte. Elle ne réalise pas du tout quand celle-ci se heurte, y compris violemment, aux règles établies suivies par d'autres.

Un exemple particulièrement surprenant dont je me souviens est celui d'une amie qui avait établi son échelle des importances divisant en deux sa personne par le milieu. Elle considérait que toutes les caresses au dessus de la ceinture ne la concernaient pas comme ayant des conséquences ou implications importantes. En dessous de la ceinture, c'était autre chose. Le résultat fut surprenant, traumatisant et imprévu pour moi. Ayant eu l'occasion de lui caresser, ô combien, la poitrine, y compris avec la langue et la bouche, je m'avisais un jour de lui caresser les fesses. Ce fut pris comme un véritable viol ! La sincérité parfaite de mon amie, mon ignorance totale à l'époque du fonctionnement de l'échelle des importances, m'amena à être profondément troublé.

Étais-je véritablement le monstre qu'elle m'accusait d'être ? La véhémence de cette amie finissait par me le faire croire. Je doutais de moi. Jusqu'à ce que deux amies proches, dont je connaissais le franc parler, et que j'interrogeais avec angoisse, me rendirent mon estime pour moi. Mais, il m'a fallu encore cinq années pour finir aujourd'hui d'analyser cet incident relationnel.

La volonté de chercher à établir son échelle des importances en conformité avec les idées de son entourage peut avoir de détestables conséquences.

J'ai connu le cas d'un petit garçon de sept ans qui adorait la danse. Ses parents, notamment son père, maître d'armes à la Garde républicaine, voulurent lui assurer sa vocation. Ils se renseignèrent pour le faire entrer à l'école de l'Opéra de Paris. Tout était prêt. Finalement ils renoncèrent, pourquoi ?

Parce que, entre-temps, tous les petits camarades du jeune garçon, apprenant sa vocation de danseur, se mirent à le traiter de "pédé". A leur âge, ils ne savaient probablement pas quel sens avait ce mot. Mais il était insultant pour eux et celui qu'ils maltraitaient ainsi. Choqué, le petit garçon doué et passionné par la danse ne voulu plus entendre parler de celle-ci.

L'échelle des importances esquissée ici dès un très jeune âge a ainsi brisé une belle vocation.

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 janvier 2014


dimanche 19 janvier 2014

208 Réponses à quelques questions importantes sur l'amour

Quand j'interroge des gens, ou me pose des questions sur l'amour, je rencontre souvent plusieurs interrogations :

Pourquoi l'amour paraît souvent plus simple très jeune, pour se compliquer ensuite ?

Pourquoi devient-il avec les années très difficile de le rencontrer ?

Pourquoi, au début, quand on le rencontre, ça va bien et après ça change ? Très souvent après un certain temps, ce qui allait bien se dégrade et ne va plus.

Pourquoi quantité de femmes et d'hommes finissent par en vouloir au sexe opposé ? Dont ils accusent les représentants d'être compliqués, incompréhensibles, intéressés, manipulateurs, égoïstes, insensibles, jaloux, possessifs, etc. bref, infréquentables. Mais, en même temps indispensables. D'où une situation impossible. Comme le résumait abruptement un copain quinquagénaire :  « quand tu es seul, tu t'emmerde. Quand tu es avec quelqu'un, elle t'emmerde ! »

L'explication se trouve dans le cours de l'évolution de la vie d'un très grand nombre.

Au début, l'amour, c'est effectivement très simple. Quand on est enfant, on ne se complique pas la vie. Une fillette de cinq ou six ans me disait il y a plus de vingt-cinq ans de ça : « j'ai échangé mon copain avec une copine, contre un sac de billes ! » On connait aussi la célèbre expression enfantine : « t'es plus mon copain ! »

On n'aime, on n'aime pas, on n'aime encore, on n'aime plus. Ainsi va la vie enfantine. Qui n'est pas forcément heureuse. Mais qui n'est pas compliquée.

Seulement voilà : arrive le heurt avec « la clôture des adultes », derrière laquelle la masse des adultes cache quantité de choses. Quand, un jour, on finira bien plus tard, par franchir ladite clôture, on est confronté à de multiples interrogations. Auxquelles on n'a pas été du tout préparés. On n'a appris au contact des adultes à manger, savoir se tenir à table, s'habiller, se laver, etc. Mais, s'agissant des choses de l'amour on est très largement ignorant. Car les adultes nous ont caché quantité de choses.

Alors, aux débuts de nos premiers pas en amour « adulte », il arrive effectivement que nous restions dans notre simplicité enfantine d'origine. D'où l'amour paraît simple. Ça ne va pas durer. Et ce ne sont pas les imbécilités distillées par les contes de fées, les films et les romans à l'eau de rose qui vont nous aider à comprendre la vie.

Comme les difficultés arrivent, avec notre grande ignorance nous allons essayer de comprendre. Découvrir ce que nous cherchons et comment y parvenir. Ainsi nous commencerons à nous fabriquer notre « échelle des importances ». Quelle importance donner au « sexe » ? aux « mots d'amour » ? à l'âge ? la beauté physique ? etc. Autant de réponses que nous allons chercher.

Nous allons être confrontés à des difficultés, déceptions, souffrances, rares ou plus longs moments de bonheur. Et un grand problème, une terrible incohérence va alors s'installer progressivement dans nos vies. Nous allons commencer à ne plus nous déterminer par rapport à ce qui nous arrive, mais par rapport à notre échelle des importances. Celle-ci est évolutive, se modifie avec le temps, plus ou moins vite.

Les personnes que nous rencontrons ont également concoctés leur propre échelle des importances. Et celle-ci est différente de la nôtre. Et comme les variations possible de ces échelles sont innombrables, bien rares sont celles qui coïncident ensemble.

Quand cela arrive, les personnes concernées sont ravies : elles sont amenées à penser avoir enfin « rencontré l'amour ». Seulement, le hic est que leurs échelles des importances continuent à se révéler l'une à l'autre, bouger, évoluer. Et finissent par s'éloigner. D'où la pensée couramment exprimée : « l'amour, au début, c'est toujours bien. Après ça se dégrade. »

Enfin, arrivés à un certain âge, on a accumulé échecs, déceptions et compliqué énormément notre échelle des importances. Elle devient comme une forteresse impénétrable. On va rester seul. Et maugréer contre l'ensemble du sexe opposé. En fait, on va maugréer tout simplement contre l'amour et ses espoirs déçus.

Voilà, en résumé, comment je réponds à ces importantes questions sur l'amour énoncées au début de cet article.

Je finirais par un exemple illustratif de l'influence sur nos vies de l'échelle des importances :

J'ai connu à la fin des années 1970 une jeune fille qui m'a raconté une mésaventure très désagréable qui lui est arrivée. Elle avait un petit copain. Celui-ci l'a un jour quitté pour une autre, parce que cette autre était la première femme à lui avoir dit : « je t'aime ». Pour ce jeune homme, la phrase en question était placée très haut dans son échelle des importances personnelle. Au point de lui faire quitter du jour au lendemain sa petite amie pour une autre jeune fille !

Inversement, combien étrange m'a paru une jeune femme vivant en couple, s'entendant pas si mal avec son compagnon, qu'elle trompait néanmoins à l'occasion, qui m'a dit un jour : « je ne dirais jamais à mon copain "je t'aime", ça gâcherait quelque chose ». Pour cette femme, bizarrement, le refus de dire « je t'aime » était placé très haut dans son échelle des importances.

La phrase « je t'aime » est quelquefois placée tellement haut dans son échelle des importances personnelle qu'on n'éprouve les plus grandes difficultés à la prononcer ! On se retrouve tout tordu et balbutiant pour jeter ces mots à la face de l'être aimé qui vous regarde avec étonnement et commisération. On donne l'impression de s'étouffer avec des mots, tellement on attend, croit, espère, qu'ils vont représenter une sorte de formule magique pour accéder au bonheur amoureux. Mais les formules magiques n'existent et fonctionnent que dans les films et romans. Dans la réalité, elles peuvent sembler parfois fonctionner. En fait, elles ne marchent jamais.

Reste l'interrogation : « comment sortir du domaine artificiel de l'échelle des importances, entrer dans la réalité et s'y mouvoir de manière satisfaisante ? » Cela arrive à certains, semble-t-il. Mais pour cela, il faut, d'une certaine façon, redevenir des enfants. Revenir à la simplicité originelle que nous avons connu. Le chemin du retour à la simplicité est caché, fait peur. Est très long, pénible et compliqué à trouver. Mais il n'y en a pas d'autre.

Basile, philosophe naïf, Paris le 19 janvier 2014

samedi 18 janvier 2014

207 A propos de « la pudeur »

Quand on est très petit, on ne se pose pas de questions quand les grandes personnes qui s'occupent de vous vous enfilent d'office divers vêtements. Par la suite, il apparaît logique d'en porter pour s'abriter du froid, de la pluie. Mais, mystérieusement, voilà que s'ajoute le fait de devoir porter des vêtements alors qu'on n'en a aucun besoin ! Je me rappelle, à cinq ans, durant des vacances au bord d'un lac en Savoie, avoir questionné mes parents : "pourquoi porter ici une culotte de bain ?" La réponse vint, imparable : "c'est pour l'hygiène". Bien que ne saisissant pas toutes les implications réelles et possibles de cette fameuse "hygiène", j'avais appris à la respecter sans discussion. J'acceptais cette explication bidon des préjugés pudiques régnants dans la société où je vis. Et acceptais l'idée qu'il était logique et justifié de porter ce qui est en fait un cache-cul et un cache-sexe. Que les enfants et grandes personnes sur les plages de Scandinavie et d'Allemagne du nord ignorent parfaitement.

Plus logique était ce petit garçon d'environ deux ans que j'observais il y a plus de trente ans sur la plage de Palavas-les-Flots. Il marchait sur la plage, les pieds dans l'eau. Quand il s'arrêta pour enlever sa culotte de bain mouillée et la jeter au loin avec dégoût. Il n'avait pas été encore contaminé par ce que nous avons baptisé "la Civilisation".

Pour justifier le port de ces caricatures de vêtements qu'on appelle "maillot de bain", on invoque "la pudeur". J'ai même vu pire en 1979 sur la plage du Portel, près de Boulogne-sur-Mer. Un grand panneau y invitait les baigneurs "par respect pour nos enfants" à respecter la pudeur. Enfants qui, eux-mêmes, ignorent ce concept invoqué pour porter des morceaux de tissus ridicules qui soulignent ce qu'ils prétendent cacher !

Mais qu'est-ce que "la pudeur" ? Un concept fourre-tout où on trouve de tout, du bon, du mauvais, du justifié, de l'injustifié, du juste et du ridicule. Introduit dans le Code pénal français en 1810, le concept d'"attentat à la pudeur" peut-être assimilé à une multitude de choses répréhensibles ou non. Et, selon les interprétations, peut servir aussi bien à défendre les gens qu'à leur causer un préjudice. A l'époque où il a été inventé, en France, les épouses infidèles risquaient la prison. Le divorce n'existait pas. Et les pères de famille avaient la possibilité de faire emprisonner leurs enfants sans autre justificatif que leur pouvoir de décision. Au nom de "la pudeur" on évite surtout, encore aujourd'hui, le débat. Et de parler d'une façon critique de la réalité des mœurs. On peut critiquer le comportement des uns ou des autres dans tous les domaines, excepté "en dessous de la ceinture" ! Au nom de cette manière de considérer les choses, on peut être quelqu'un de bien, tout en étant un parfait salaud dans le domaine de "la vie privée" ! On voit à qui cela profite ! Dès qu'on critique un parfait salaud dans le domaine des mœurs, ou on se pose simplement des questions pour comprendre, c'est souvent une levée de boucliers : "ah non ! on ne parle pas de ces choses-là, elles relèvent de la vie privée !" Eh bien, justement, oui ! parlons-en !

Pour dire ce qui est mal, parlons de ce qui est bien, ou incertain. De nos tâtonnements pour arriver à comprendre les choses. J'ai été confronté pour rédiger ce blog au problème posé par la censure de "la pudeur". Dois-je, puis-je parler de domaines que l'on dit "intimes". Et qui concernent tout le monde et causent des dizaines de milliers de suicides par an ?

Oui, il faut en parler. Ne sont honteux que les comportements de ceux qui cherchent à faire mal les choses, mentir, manipuler et profiter des autres.

Basile, philosophe naïf, Paris le 18 janvier 2014

mercredi 15 janvier 2014

206 Fait divers stupide, dramatique et laid

Dans une petite ville de province, deux très jeunes gens, âgés de juste treize ans, ont un béguin l’un pour l’autre. Comme leurs familles respectives sont en mauvais termes, ils se donnent la mort. Fait divers tragique et stupide. A treize ans, que connait-on de la vie ? Croire qu’une amourette contrariée rend la vie indigne d’être vécue, c’est faire preuve d’immaturité imbécile.

Pourtant, si on remplace le lieu géographique par la cité de Vérone en Italie. Qu’on nomme les familles Capulet et Montégu. Et que les deux idiots tragiques se prénomment Juliette et Roméo, tout un tas de gens bavent d’admiration devant cette histoire. Ce serait même là « l'amour » par excellence ! Mais d’où peut provenir une telle prodigieuse stupidité ? Et elle a court depuis plusieurs siècles !

Comme je l’ai écrit, les enfants au début de leur vie sont libres et sans interdits. Puis, ils se heurtent à la « clôture des adultes ». Derrière laquelle les grandes personnes font quantité de choses qu’ils dérobent à leur vue. Arrivés à un certain âge, les enfants vont franchir cette clôture. Confrontés à des phénomènes nouveaux, ils devront déterminer la conduite à tenir sans y avoir été préparé.

Résultat, par exemple, ils vont accorder une importance capitale à un petit béguin de rien du tout. Cette incapacité à évaluer l’importance des choses, à gérer leur « échelle des importances », conduira à bien des drames. L’histoire imaginaire de Roméo et Juliette en est une illustration. Le fait que des générations de gens s’extasient devant ce fait divers montre bien que nombreuses sont les personnes dont l’échelle des importances est parfaitement déréglée.

Elle peut l’être dans divers domaines. J’ai connu un homme qui a manqué de se suicider parce que sa femme ne voulait plus « faire l’amour » avec lui. Quelle ânerie ! Si c’était vital à ce point, il n’avait qu’à aller voir ailleurs ! En fait, son échelle des importances était mal réglée au point qu’il avait l’impression que sans pouvoir coucher avec sa femme, il n’avait plus de raisons valables de vivre !

Cette incapacité très répandue à parvenir à régler son échelle des importances ne se retrouve pas que dans le domaine dit « du sexe ». Les personnes qui voient dans la vie l’occasion d’accumuler des biens, de la « propriété », en sont un autre exemple. J'ai lu il y a des années un article dans le journal Le Monde à propos d’une ville antique et abandonnée de Mésopotamie. Habitée durant six ou sept cents ans, elle est à présent envahie par une couche épaisse de sable du désert. Des personnes se sont senties là les propriétaires. On y retrouve même des empreintes de pieds et mains d’esclaves sur de l’argile cuite, servant de pièces d’enregistrements de ces esclaves. Et à présent que trouve-t-on là ? Du sable et des maisons vides.

Le drame est que l’Histoire n’a rien appris à ceux qui se proclament les « grands de ce monde ». Si on lit les propos de grands patrons actuels, ils ne rêvent que d’accumuler des milliards d’euros et encore des milliards d’euros, qui ne leur serviront à rien. Et priver des moyens élémentaires de subsistance des millions de gens. L’échelle des importances de ces grands patrons est affreusement déréglée.
 
Clôture des adultes, franchissement de cette clôture, échelle des importances, gestion de cette échelle : il faut bien avoir conscience de ces phénomènes. Les étudier. Et peut-être un jour, aussi grâce à ça, parvenir à régler les grands problèmes qui se posent à l’Humanité.

Basile, philosophe naïf, Paris le 15 janvier 2014

mardi 14 janvier 2014

205 A propos du dérèglement de « l'échelle des importances »

L'enfant apprend en écoutant les adultes. Et surtout en les imitant. Or, il se trouve que de larges et importantes parties de la vie adulte sont dissimulées, cachées à sa connaissance au nom de la « pudeur ». Les conséquences de ce phénomène peuvent être minimes, importantes, voire catastrophiques.

Quand j'étais petit on ne parlait pas de « ça » autour de moi dans la famille où je grandissais. J'ignorais tout de la sexualité. L'organe nommé « sexe », chez les filles comme chez les garçons, servait à uriner, point. Je me souviens un jour, quand j'avais douze ans, avoir ouvert par hasard un ouvrage de photos accompagnées de poèmes de Paul Éluard. Chaque page de texte faisait face à une grande photo en noir et blanc montrant en gros plan le bas-ventre nu d'une jeune fille. J'ai regardé quelques pages. C'était toujours des bas-ventres nus de jeunes filles différentes. J'ai trouvé le choix du sujet étrange. Pas intéressant et même sentant un peu l'urine au sens figuré.

Un jour, en rapprochant des informations fragmentaires et des observations, j'ai découvert l'existence de l'acte sexuel à l'origine de la conception des enfants. Chose qui m'avait été soigneusement caché par mes parents. Une pensée m'est venue aussitôt : « ils ne pouvaient pas ne pas savoir comment on fait les enfants, puisque je suis là, ainsi que mes frères et ma sœur ».

Donc, mes parents m'avaient caché quelque chose. Je découvrais ainsi sans l'analyser la « clôture des adultes », derrière laquelle les adultes dissimulent quantité de choses aux enfants.

Cette dissimulation a des conséquences redoutables. En effet, arrivé à un certain âge, on découvre forcément la sexualité adulte. Mais on est dépourvu de points de repères. Car il y a un gigantesque hiatus dans notre éducation. C'est un peu comme si on découvrait la nourriture sans jamais avoir vu qui que ce soit amener des ingrédients, les préparer, servir les plats et manger. On ne risque pas de se retrouver très à l'aise et habile pour gérer les achats, cuisiner et tenir une fourchette !

Le problème se pose de la gestion des besoins sexuels. Et de quels besoins s'agit-il exactement ?

Vers 12 ou 13 ans, seul, j''ai découvert la masturbation, pensé au coït sans nullement l'envisager, ai été fasciné par la beauté de certaines jeunes filles de mon âge aperçues au passage, ai eu peur de tomber amoureux... Que d'émois, et nuls carte, boussole ou conseil pour savoir où me diriger ! Certes, on pourrait croire qu'il suffit de suivre « nos besoins ». Mais nous ne les connaissons pas.

Il est très facile d'adopter alors des conduites qui en fait ne nous conviennent pas. De s'embrouiller et d'être incapable de gérer « l'échelle des importances ». Qu'est-ce qui compte ? L'« amour », la « fidélité », le « sexe », les caresses, la beauté, la durée, l'expérience ? On ne sait pas.

Les humains peuvent dès l'enfance se suggérer des besoins et ressentis. L'exemple est donné par le petit enfant qui tombe et se fait un peu mal. Dites-lui : « relèves-toi, ce n'est rien ! » Il se relève et continue à jouer. Précipitez-vous pour le ramasser en vous exclamant : « oh ! Le pauvre petit, comme il a mal ! » Résultat, l'enfant pleure, braille et a vraiment mal !

Quand on commence à se poser la question du sexe pratique partagé, il suffit de régler son échelle des importances en dépit du bon sens pour se rendre très malheureux.

La première impression donnée par une jeune fille a un jeune homme peut être très agréable. J'en avais fait à une époque la condition sinéquanone de ce que je considérais comme le départ du super important et indispensable « amour ». Résultat, je m'attachais à des femmes qui m'avaient frappé par leur beauté, qui ne signifie en fait rigoureusement rien. Et cherchais ensuite à les séduire intellectuellement avec des poèmes d'amour. Inutile de dire que le résultat était nul. Je restais seul. D'autant plus que toutes approches « physiques » tentées par une jeune fille à laquelle je plaisais me révulsait, car ne correspondait pas à mon échelle des importances. J'avais fait de mes poèmes d'amour une sorte de mécanisme fantasmatique qui devait me conduire à « l'amour », le jour où j'aurais la chance de rencontrer « la bonne personne ». On nage dans la parfaite imbécillité.

J'ai pratiqué cette démarche durant plus de trois ans. Finalement, en août 1984, en recopiant des poèmes que j'avais écrit à l'intention de la énième créature de rêve inaccessible, j'ai pris conscience de mon délire. « Mais, comment ai-je pu écrire de telles choses à une personne que je ne connais pratiquement pas ? » me suis-je dit. Ce qui fait que j'ai arrêté ce délire poétique.

Autre délire causé par le dérèglement de l'échelle des importances : accorder une importance primordiale à « l'acte sexuel ». Une femme me plaisant, je me retrouvais obsédé par l'idée de parvenir à « faire l'amour » avec elle. Il ne s'agissait aucunement d'un besoin, mais d'une idée fixe. D'autant plus étrange que je réalisais fort bien que la pratique du coït, exceptée une fois, ne m'avait jamais passionné.

Je troquais un jour ce dérèglement de l'échelle des importances par le refus du coït. J'inventais une vaste théorie de « l'amour sans sexe ».

Puis, un jour, rencontrant apparemment une femme que j'aimais et qui m'aimait, j'ai initié un nouveau dérèglement de mon échelle des importances : les sentiments devaient primer tout. J'idolâtrais ma nouvelle compagne, et, au nom des sentiments, acceptais tout ce qu'elle voulait. Ma vie devenais entièrement dévouée à son service. Problème : quelqu'un qui fait tout pour vous est plaisant un temps. A la longue ça devient pesant et insupportable.

Je me suis retrouvé expulsé de la vie de « la femme de ma vie ». Elle a très bien fait. Et j'ai réussi à ne pas me suicider après cette séparation très pénible à laquelle j'avais involontairement contribué.

Le dérèglement réciproque de l'échelle des importances nous avait également conduit à « faire l'amour » sans en avoir jamais eu envie, car il fallait bien, si nous voulions un enfant. C'était une belle sottise que j'avais accepté avec le projet familial de ma compagne. Elle m'aurait demandé n'importe quoi, y compris de danser sur la table, j'aurais accepté.

C'est dire où le dérèglement de l'échelle des importances peut nous conduire.

La conséquence directe possible la plus tragique de ce dérèglement est de nous conduire au suicide. Et aussi, par insatisfaction, amener à pratiquer des comportements compensatoires dévastateurs. La chrématistique en est un. On va accumuler de l'argent pour l'argent pour compenser son insatisfaction ailleurs. On pourra aussi chercher la célébrité, le pouvoir, avec toutes les conséquences dramatiques que ces quêtes peuvent entraîner.

Les bâtisseurs d'empires politiques ou financiers provoquent des désastres pour arriver à posséder le plus gros possible des hochets de pouvoir. Et leurs empires finissent toujours par s'écrouler.

Prenons bien garde aux dérèglements de notre échelle des importances, fruits des déficiences de notre éducation avant l'entrée dans l'âge « adulte ». Analysons bien nos « passions » ! Et sachons nous détourner des impasses que la masse des humains adorent fréquenter avant de se lamenter sur « la dureté de la vie » qu'ils organisent eux-mêmes. C'est ainsi seulement que nous parviendrons à améliorer la qualité de nos vies.

Basile, philosophe naïf, Paris le 14 janvier 2014