samedi 26 août 2017

848 L'expérience est une lanterne qui n'éclaire que soi

La vraie philosophie est d'abord action puis réflexion. L'inverse est pauvre et limité. Si je déclare : « l'homme est un animal », ça reste une hypothèse. Si je vis une expérience qui me le démontre directement, naît ma conviction. Je vais prendre un exemple : la nudité est traitée dans la société où nous vivons comme érotique et sexuelle. En fait, l'état de nature, c'est-à-dire sans vêtements, n'est ni érotique, ni sexuel.

Nous pouvons nous répéter un million de fois : « l'état de nature n'est ni érotique ni sexuel ». Habitués au contraire par notre conditionnement, nous continuerons à ressentir le contraire. Il y a quatre ans j'ai décidé de prendre le taureau par les cornes. Aussi souvent que possible, sans choquer ni déranger personne, j'ai décidé que je serais à l'état de nature quand je suis seul. Durant trois années cet état m'induisait des pensées liées au sexe. Au bout de trois années ce fut terminé. J'en ai été délivré. On la voit, l'importance inestimable de l'expérience. En dépit des idées que je trouvais juste, j'ai mis trois années pour me débarrasser du conditionnement « nudité égal sexualité ». Il a fallut l'expérience et aussi la réflexion. Mais sans l'expérience vécue je n'y serais pas arrivé.

Depuis, une année a passé et n'a fait que renforcer ma conviction dans le sens de la complète neutralité de l'état de nature. Cependant je comprends très bien que les personnes qui m'entourent, elles, sont toujours conditionnées comme je l'ai été.

Elles ne risquent pas de me suivre si je témoigne de mon ressenti actuel. Elles n'ont pas passé comme moi trois années à se déconditionner. Ce déconditionnement a des effets intéressants. Se sentir à l'aise sans vêtements et sans être de ce fait envahi par des pensées « sexuelles » est un confort, un plaisir, une sérénité rares. Voir les jolies filles dans la rue comme autre chose que des objets sexuels, mais comme des êtres humains est certainement au moins en partie le résultat de cette pratique de l'état de nature.

La base première du succès de la pornographie est la sexualisation abusive de la nudité. Cette base enlevée, que reste-t-il ? Des comportements stéréotypés et mécaniques, des expressions et réactions remplies d'artificialité. Quand on s'est débarrassé de l'équation « nudité égal sexualité », la pornographie perd très largement son intérêt, tout effet excitant. Il apparaît absolument évident que les personnes qui se font filmer ou photographier s'ennuient et prennent la pose, parfois acrobatique. La seule chose qu'ils attendent et qui les motive, c'est leur chèque à l'issue de la séance photos ou vidéo. Par millions, les humains conditionnés consomment la pornographie en croyant y voir la sexualité. Il ne s'agit là que d'une caricature patriarcale à but lucratif. La base de la pornographie, c'est le patriarcat qui réduit les femmes à des domestiques dans lesquels l'homme se masturbe.

Se rapprocher de la Nature en nous n'est pas toujours très confortable. Aujourd'hui je me promenais dans Paris sous une chaleur très forte. J'ai souffert du fait de devoir porter des vêtements pour sortir de chez moi. A mon retour, remis en tenue naturelle et adaptée à la chaleur, il m'a fallut une heure au moins pour me retrouver à mon aise habituelle. En fait, quand on s'habitue à la tenue naturelle on se retrouve mal à l'aise habillé. La réaction inverse est beaucoup plus courante. Bien des gens ne se sentent à leur aise qu'une fois habillés. C'est le produit de leur conditionnement initié dès leur petite enfance. Je voyais récemment des petits enfants sur une plage. Tous étaient revêtus de leur tenue de bains. Ce qui signifie qu'à une époque de leur vie où ils ne connaissent pas grand chose de la vie on leur inculque d'office la honte de « leur corps ». Quand j'avais cinq ans, durant des vacances au bord d'un lac savoyard, je m'étonnais. Pourquoi existait pour moi l'obligation imposée par ma famille de porter une culotte de bains incommode mouillée et qui visiblement ne servait à rien ? La réponse hypocrite de ma mère fut : « c'est pour l'hygiène ».

Basile, philosophe naïf, Paris le 26 août 2017

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