Je lisais récemment le
passage d'un discours moralisateur. Il y était dit que dans un
certain nombre de cas l'homme et la femme devaient « vivre
comme frère et sœur ». Prononcer de tels propos est
doublement faux.
Tout d'abord parce que
des centaines de millions de frères et sœurs ont des relations pas
du tout « catholiques ». Qui vont jusqu'à l'accouplement
et la vie conjugale. Mais de ceci, motus, il ne faut rien dire. C'est
un des « secrets de Polichinelle » les mieux gardés dans
notre société. Quelquefois tout le monde sait parfaitement bien
qu'un frère et une sœur couchent ensemble, ou un père, une mère,
avec son fils ou sa fille. Mais on fait comme si personne ne savait
ni voyait ce qui se passe.
Personne n'a le droit
d'en parler. Verriez-vous un député dire en public qu'il couche
avec sa sœur ? J'ai connu un exemple. Un député qui vivait
maritalement avec sa sœur. Tout l'entourage était au courant. Et la
loi du silence régnait.
La règle est que
personne ne doit dire ce qu'il sait. Moi-même ayant eu des pensées
« coupables » envers ma sœur, durant bien des années
j'en ai ressenti une culpabilité terrible. Personne ne devait
savoir... C'est seulement arrivé presque à la quarantaine que j'ai
« avoué » mon crime de jeunesse à une sympathique
voisine. Apprenant ma peur que ça se sache, qu'un soignant en
particulier l'apprenne, elle a éclaté de rire, me disant que
c'était une affaire commune. C'est seulement alors que j'ai commencé
à « décomplexer » et cessé de culpabiliser à mort.
Ensuite, l'autre raison
qui fait que ce discours sur le vivre comme frère et sœur est faux,
est qu'il implique qu'à côté des frères et sœurs qui ne baisent
pas existent les maris et femmes, amants et amantes. Qui baisent,
doivent baiser obligatoirement. Et ceci est une prétention
parfaitement odieuse et stupide. Car personne ne doit
faire l'amour. Ou bien on peut. On a envie de le faire. Et on le
fait. Ou bien on ne le fait pas. Car les conditions rencontrées sont
différentes. Et alors, quand bien-même serait-on proches, mariés
et tutti quanti on ne met pas le chat dans la corbeille.
Prétendre qu'il existe
des situations, des types de relations qui impliquent qu'on doive
faire l'amour est une des pires erreurs que commet notre société.
Elle ruine l'amour. Et ruine l'Humanité. Tant que cette prétention
persistera, la mésentente entre les humains régnera.
La pudeur et l'obscénité
sont l'avers et le revers d'une même médaille. La pudeur prétend
qu'on ne doit pas faire l'amour, l'obscénité qu'on doit le faire.
Alors qu'on ne doit pas avoir d'obligation. Quand j'ai eu 22 ans,
vierge, on voulut et réussit à me faire faire la chose avec une
demoiselle. Ce fut l'œuvre du médecin de famille et de ma famille.
Et une des pires stupidités qu'on me convainquit de faire. On m'a
ainsi fait passer sous les fourches caudines de l'amour, du sexe,
obligatoire. Ce qui fait que quand peu de mois après, je croisais
une jeune fille. Tout inclinait à ce que nous nous retrouvions en
amour. Sauf que, traumatisé par mon aventure concocté par mon
entourage, j'ai rejeté cette jeune fille. La vie est ainsi faite.
Elle n'aime pas être bousculée par des plans bizarres et plein de
très bonnes volontés très mal placées. Autre dommage majeur causé
par mon déniaisage organisé, je tombais dans l'ornière de la
pensée unique qui veut qu'il faille absolument trouver chaussure
sexuelle à son pied : avoir sa partenaire attitrée sur abonnement.
Que de centaines d'heures perdues, que de souffrances résultants
ensuite de ma recherche fébrile et infructueuse de ma moitié
d'orange qui n'existe pas ! J'ai mis quarante-et-un ans à me
débarrasser de ce lourd parasitage et retrouver la liberté de
penser et voir la réalité. Non, l'homme n'est pas une sex
machine qui a tout le temps envie de « faire l'amour ».
On le lui fait croire. Et avec cette croyance il dérange sa vie et
celle des autres, en particulier des femmes. Il n'y a pas que
« l'amour » dans la vie, il y a aussi la vie.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 27 juillet 2015
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire