L'argent n'existe pas à
l'état naturel. Il n'existe pas d'arbre porteur de billets de
banque.
Quand j'étais petit, en
France l'argent se trouvait sous la forme d'un certain nombre de
pièces de monnaie et billets. Il y avait des pièces de un franc,
deux francs et cinq francs en aluminium. Les pièces de cinq francs
étaient très grandes. Les pièces de un et deux francs étaient de
deux modèles. L'un avec une tête de profil, peut-être la République, l'autre avec la
francisque de l’État français. On ne les avait pas retiré de
circulation à la Libération. Puis il y avait des pièces couleur
bronze de dix francs, vingt francs et cinquante francs. Ces dernières
étaient plus rares ainsi que la pièce de cent francs en métal
blanc. Les billets de banque, très colorés, étaient de cinq cent
francs, mille francs, cinq mille francs, dix mille et cinquante mille
francs. Je n'apercevais ce dernier que les jours de versements des
allocations familiales à mes parents.
Et un jour on annonça
que les pièces de un, deux et cinq francs étaient « démonétisées ».
Soudain elles n'avaient plus aucune valeur ! Je trouvais cela
très étrange.
En fait, l'argent, ce
compagnon peu pratique et exigeant de nos vies est juste et seulement
une invention humaine. Chose surprenante, de cette invention les
humains ont fait un dieu. Ils sont nombreux à l'adorer et lui obéir.
Aujourd'hui, par exemple,
on affame les Grecs pauvres et ils sont des millions. Pourquoi le
fait-on ? Pour les forcer à rembourser une dette colossale et
imaginaire qui remplira des coffres électroniques et ne servira à
rien. Les « créanciers » de cette pseudo-dette ne
mangent pas plus de trois fois par jour.
Quand on réclame quelque
chose de nécessaire et possible à nos gouvernants, la formule
magique pour ne pas nous satisfaire est : « il n'y a pas
d'argent ». Le débat est sensé se terminer là.
L'argent est un dieu. Ses
servants sont les banques, mais aussi les particuliers. Le paradoxe
est que tous ces gens-là, pour des motifs divers et parfois
contradictoires, adorent l'argent et obéissent à l'argent. L'argent qui, par
lui-même, n'a rigoureusement aucune valeur. Il ne se mange pas.
Des mesures aux
conséquences catastrophiques se font au nom de calculs financiers
opaques qui dissimulent la volonté de quelques-uns d'accumuler le
plus d'argent possible. Aujourd'hui, dans le monde entier, et
notamment chez nous, on liquide des hôpitaux et des maternités pour
faire « des économies » ou « parce qu'il n'y a pas
d'argent ». On préfère mettre la vie des gens, des mères et
des enfants en danger pour que brillent les tas d'or imaginaires de
quelques-uns. Un pour cent des habitants de l'Inde « possèdent »
cinquante-huit pour cent des « richesses » du pays. Selon
OXFAM France, il y a plusieurs mois déjà, soixante-deux individus
« possédaient » autant de « richesses » que
la moitié la plus pauvre du Genre humain, soit trois milliards
d'individus.
Il n'y a pas que l'argent
dont les humains ont fait un faux dieu. Trois autres faux dieux
règnent un peu partout : la gloire, chercher à être
« célèbre », « connu » de plein de gens. Le
pouvoir et « le sexe » sont aussi des inventions que les
humains très souvent idolâtrent et auxquelles ils obéissent. « Le sexe » consiste à faire d'une petite chose une
obligation valorisante. Il faudrait s'accoupler un très grand nombre
de fois, avec un très grand nombre de « partenaires »,
pour prétendre exister. C'est parfaitement absurde, idiot et source
d'ennuis et de solitude. Quand les humains
renoncent à adorer ces quatre faux dieux et leur obéir, ils
commencent à vivre vraiment. Et peuvent enfin, dans la mesure du
possible, être sereins et heureux.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 13 février 2017
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