J'ai avancé le schéma
historique suivant : au départ, quand ils sont à l'état natif, il y
a des dizaines de milliers d'années d'aujourd'hui, les humains
suivent leur instinct. C'est la seule source de leur comportement.
Ils n'ont aucun besoin d'une quelconque industrie, étant les
représentants d'une catégorie d'animaux qui n'ont pas de grands
prédateurs. Une troupe de singes solidaires et mordeurs est moins
attirante pour un lion ou un tigre qu'une antilope ou un lapin. Et,
en cas de danger, les petits humains courent très vite pour pouvoir
rejoindre le groupe des grands humains et se mettre sous leur
protection. Puis, les humains vont développer le jeu. Par jeu, ils
inventeront des choses. Ce qui va faire naître le savoir, le savoir
erroné ou erreur et l'absence de savoir, c'est-à-dire l'ignorance.
Et se développera alors un nouveau phénomène : la transmission du
savoir, du savoir erroné et de l'ignorance. L'ignorance ayant pour
particularité d'être transmise de manière passive. C'est parce
qu'on ne transmet pas quelque chose que les autres savent, qu'on
devient « ignorant ».
Le temps nécessaire pour
chacun à la transmission suscitera un trouble majeur chez les
humains : l'enfance prolongée. Alors qu'il est adulte vers l'âge de
quatre ans, moment à partir duquel il sait se nourrir seul, l'être
humain va être maintenu en dépendance morale, physique,
intellectuelle, psychologique, affective, matérielle. Sevré tactilement et classée
enfant pour de nombreuses années l'humain va connaître des
conditions de vie très hautement perturbantes pour son instinct. Et,
petit, les années, le temps, s'apprécie différemment. Une année
d'un « enfant » vaut plusieurs années d'une grande
personne . L'enfance prolongée entraînera la minorisation des
jeunes et la majoration des anciens. La sortie de l'enfance
prolongée, ai-je écrit, suscite la peur, la panique. Je dirais plus
exactement à présent : la terreur intérieure. Pour la fuir,
quantité de comportements naîtront.
Ils pourront faire appel
à des choses que seuls les grandes personnes connaissent en temps
normal, telles que les drogues, le coït, l'éjaculation, le pouvoir,
l'argent, les jeux d'argent. Quand on voit le volume financier généré
par la pornographie et la prostitution en direction des humains de
sexe mâle on est impressionné par l'importance délirante et
démesurée que notre société accorde à l'éjaculation. On dirait
que certains individus même ne vivent que pour elle. Ce dérangement
trouve sa source dans la fuite devant la terreur intérieure générée
par la sortie de l'enfance prolongée.
Certaines femmes suivent
ici le même chemin que nombre d'hommes. Il existe également une
forme étrange de négation de la terreur intérieure consistant à
faire des choix absurdes, adopter volontairement un comportement
irrationnel et visiblement contraire y compris à ses propres
intérêts. Ce comportement est d'autant plus éclatant quand il est
le fait de personnes occupant de très hautes responsabilités.
Commettre des actes absurdes, c'est d'une certaine façon nier
appartenir au monde des grandes personnes, rester enfant en faisant
l'âne avec énormément d'applications. Le choix des politiques
austéritaires en Europe témoigne aujourd'hui de cette fuite devant
la terreur intérieure chez nombre de politiques à très haute
responsabilité. Ces politiques sont des humains, partageant la
faiblesse de très nombreux autres humains.
Le choix de comportements
absurdes pour nier sa terreur s'observe aussi dans le quotidien à
très petite échelle. Je connais le cas de quelqu'un qui mange trop
et est systématiquement toujours en retard. Il sait nuire à sa
santé en mangeant trop. Mais trop manger et ne pas s'en faire, c'est
être un autre qu'une grande personne. Être systématiquement et
avec application en retard est aussi une manière de nier son
identité terrorisée. Enfin, cette personne voue une adoration
extrême à la consommation d'eau gazeuse. Cette adoration témoigne
d'avoir fait de cette boisson inoffensive, une drogue. Elle est
consommée ici avec autant de ferveur que pour d'autres de l'alcool.
Fuir sa terreur intérieure génère bien d'étranges comportements.
La terreur intérieure aux humains, fruit de leur sortie de l'enfance
prolongée est un phénomène très pesant et omniprésent.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 24 septembre 2015
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