Des lionnes, en chassant
dans la brousse, abattent une girafe.
Le lion vient, les
éloigne.
Va se servir des
meilleurs morceaux.
Puis s'en va repu et
content, faire la sieste. Et digérer.
Ensuite, reviennent les
lionnes.
Qui mangent à leur faim.
Après, repues et
contentes, elles vont faire la sieste. Et digérer.
Puis arrivent les
lionceaux.
On leur a laissé de quoi
manger.
Ils mangent à leur faim.
Et se retirent près des
lionnes, repus et contents.
Faire la sieste, digérer
et jouer.
Enfin, c'est le tour des
charognards : lycaons, hyènes et vautours.
Il reste de la viande !
Ils se précipitent sur
la carcasse de girafe.
Mangent à leur faim.
Puis s'en vont, chacun de
son côté, repu et content.
Faire la sieste et
digérer.
Mais voici que l'histoire
se répète. Les animaux ont faim de nouveau. Les lionnes partent à
la chasse et abattent une girafe, ou un zèbre. Peu importe, voire
même un zébu... zébu, z'ai plus soif, hâhâhâ ! Mais voici
qu'arrive l'homme. Il s'installe près de la girafe prête à être
mangée. Arrive le lion.
- Ah ! C'est toi, le
lion, tu es le Roi des Animaux, fait l'homme. Tu as sûrement de quoi
payer ta pitance !
- Que nenni, Messire,
répond le lion. Je viens de faire des opérations financières
hasardeuses. Il ne me reste pas un sou. Je n'ai même pas de quoi
payer ce délicieux repas ! Puis-je manger quand même ?
- Pas question ! Fait
l'homme, tu n'as pas de quoi payer. Passes ton chemin !
Et le lion s'en va,
désespéré, le ventre vide. Part dans la brousse, on ne sais où.
Et disparaît.
Arrivent les lionnes.
Elles ont faim. Et avisent la carcasse en se léchant les babines.
L'homme les interpellent :
- Bonjour, Mesdames, que
vous êtes mignonnes... vous avez faim ? Vous avez de quoi payer
votre repas ?
- Nous sommes désolées,
répondent les lionnes. Nous avons travaillés et même chassés
cette girafe. Mais notre patron a fait faillite. Il ne nous a pas
payé nos salaires. Nous n'avons pas d'argent, sommes au chômage. Et
n'avons pas encore touché nos maigres indemnités. Pouvons-nous
manger quand-même ?
- Pas question ! Fait
l'homme. Non mais ! Qui ne travaille pas ne mange pas ! Passez votre
chemin !
Les lionnes s'en vont
désespérées et affamées dans la brousse. Et disparaissent on ne
sais où. Laissant la girafe qu'elles ont chassé sans pouvoir en
manger.
Arrivent les lionceaux.
- Bonjour les enfants !
Fait l'homme. Ça fait plaisir de voir une belle jeunesse comme vous
! Allons, il vous faut grandir ! Ce qui signifie qu'il vous faut
manger ! C'est essentiel ! Au fait, vos parents vous ont-ils donné
de quoi payer cette modeste cantine ?
- Nous sommes désolés,
répondent les lionceaux. Notre papa a perdu son travail. Notre maman
n'a pas d'argent. Il n'y a pas un sou à la maison. Nous avons très
faim. Pouvons-nous manger quand-même ?
- Comment ça ? Manger
sans payer ? Bande de petits saligots !! Je vais vous apprendre la
vie, moi !! Allez ! Dégagez, sinon j'appelle la police !
Les lionceaux s'en vont
désespérés, le ventre creux. Ils partent dans la brousse.
Disparaissent on ne sais où. Et voilà que soudain on entend un
terrible vacarme. C'est la troupe des hyènes, lycaons et vautours.
- Bonjour
Messieurs-Dames, fait l'homme. Vous voulez manger ? Avez-vous de quoi
payer ?
- Non, nous n'avons pas
d'argent, car c'est la crise, répondent en chœur hyènes, lycaons
et vautours. Mais nous ne sommes pas comme ce grand connard de riche
ruiné, le lion, ou ces classes moyennes affectées par la crise, qui
en temps normal votent socialiste, comme les lionnes. Nous sommes la
masse, nous sommes le peuple ! Quand bien-même on nous insulte et
donne mauvaise réputation ! Il est préférable d'être une honnête
hyène ou un honnête vautour qu'un immonde homme !
Et ils se jettent sur
l'homme, lui cassent la figure, le font fuir. Et puis font bombance.
Moralité : manger est un
droit. L'argent est une saloperie. Et la dette, qu'elle soit grecque,
française, italienne, espagnole, belge ou autre doit être annulée.
Enfin, une question :
quand il y a de quoi nourrir tout le monde sur terre, est-il normal,
inévitable, légitime, juste et nécessaire d'exiger de l'argent de
ceux qui ont faim, pour qu'ils soient autorisés à manger... quitte
à ce qu'ils soient affamés, désespérés et réduits à la
mendicité ?
Basile, philosophe
naïf, Paris le 3 juin 2015
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire