mardi 8 mai 2018

979 Évolution du travestissement de l'esbroufe patriarcale

Qu'est-ce que « l'esbroufe patriarcale » ? C'est une pratique consistant à prendre n'importe quel sujet et en tirer à chaque fois la conclusion que la femme est un être méprisable, infect, ennemi et inférieur de l'homme. Un exemple classique de cette esbroufe consiste à affirmer que : « la femme est menteuse ». Comme si l'homme souvent ne l'était pas également, singulièrement avec la femme. Et que la violence patriarcale n'est pas un encouragement pour la femme à mentir à l'homme pour se protéger. Par exemple en expliquant à l'occasion qu'elle a « un fiancé », en fait imaginaire, pour repousser le harcèlement sexuel d'un homme de son entourage. Homme qui risquerait de prendre mal la simple réponse à « ses avances » consistant à lui dire qu'on n'a pas envie de lui.

L'esbroufe patriarcale prend des formes sophistiquées. L'une d'elles consiste à insister sur les agressions sexuelles masculines commises par des rôdeurs dans l'espace public, alors que la très grande majorité des agressions sexuelles masculines interviennent dans l'espace privé de la famille et des proches. Ainsi on préserve le caractère réservé aux hommes de l'espace public. Et le couvre-feu de facto régnant pour les femmes se déplaçant seules la nuit dans l'espace public des grandes villes, notamment Paris. En insistant sur les crimes sexuels commis par des rôdeurs masculins, le message envoyé aux femmes est clair : « vous voulez vous balader seule la nuit dans les rues des grandes villes ? C'est à vos risques et périls. Cet espace est réservé à ces heures-là aux hommes. Et aux femmes à condition qu'elles soient accompagnées. » On rejoint là sous nos latitudes la situation des pays où il est énoncé par la loi qu'une femme n'a pas le droit d'évoluer dans l'espace public sans être obligatoirement accompagnée par un homme de son entourage. Et après ça on va se gausser des pays où ces lois existent, en oubliant que chez nous elles sont à certaines heures effectives de facto !

L’esbroufe patriarcale envahit également des domaines qui se veulent relever de la Nature-même et de la physiologie humaine. Le domaine où cette esbroufe a triomphé durant des milliers d'années est celui de la menstruation. Phénomène bizarre et très longtemps inexplicable : la femme en état de procréer et n'étant pas enceinte perd du sang par son sexe tous les vingt-huit jours. Quelle explication ont fournit à ce phénomène les ignorants savants patriarcaux ? Que la femme durant ses règles est « impure ». Que signifie ici « impure » ? Que ce n'est pas « pure ». Qui définit ce qui est « pure » ou « impure » ? Les « spécialistes » patriarcaux. Le résultat ne sera pas inattendu.

En particulier, le sang menstruel sera traité comme un poison prodigieux. Il serait vénéneux et produirait de terribles et très dévastateurs effets à distance. Il aigrirait le lait. Ternirait l'étain. Ferait tourner les jambons qu'on a mit à sécher, etc. Ces phénomènes sont établis ! Si ! Si ! Tout le monde le reconnaît. Ou plutôt, quantité de gens y compris réputés « sérieux et compétents » l'ont reconnu durant des siècles. Même toucher une femme qui a ses règles ou s'asseoir là où elle s'est assise n'était pas recommandé pour un homme. Ce délire patriarcal a prospéré durant des siècles avec un autre délire patriarcal aujourd'hui bien oublié : l'imprégnation. Si une vierge s’accouple avec un homme, tous les enfants qu'elle aura tout le long de sa vie seront à l'image de son premier partenaire sexuel. D'où l'importance essentielle qu'elle arrive vierge au mariage. À cette superbe ânerie aux conclusions bien patriarcales quantité de gens « sérieux et compétents » ont souscrit, notamment l'historien français Jules Michelet. Mais aussi en son temps, le discours produit par l'esbroufe patriarcale a évolué et il s'y est conformé.

La Science a bousculé une très vieille croyance : celle du caractère particulier, vénéneux et maléfique du sang menstruel. Il a été analysé et on a conclut à ce que c'était du sang on ne peut plus ordinaire. Alors, l'esbroufe patriarcale remise en question a choisit un nouveau travestissement.

La femme perd du sang ordinaire durant ses règles ? Mais, quand, à quel moment perd-t-on du sang ordinaire ? Réponse : quand on est blessé. Donc, quand la femme perd son sang menstruel chaque mois, elle est blessée, donc affaiblie, donc inférieure à l'homme, donc ayant besoin de sa protection, donc devant lui obéir. C'est exactement à ce discours qu'en 1858 souscrit Jules Michelet.

Ce discours pseudo-scientifique et pseudo-logique n'a visiblement pas tenu la route. De nos jours l'appel à la Nature dans sa volonté implacable qui serait de donner à la femme une place inférieure et subordonnée à l'homme a pris une forme nouvelle et beaucoup plus simpliste : « la femme est dominée par l'homme ? Logique, normal et même inévitable : l'homme est en moyenne plus fort physiquement que la femme. » Quantité de gens, y compris des femmes, souscrivent de nos jours autour de moi à ce discours. Qui représente le énième travestissement de l’esbroufe patriarcale mise à mal par la Science et les progrès de la connaissance scientifique.

La femme qui a ses règles ne fait plus tourner le lait en l'approchant, mais qu'elle ait ou non ses règles, tous les hommes ne rêvent que de la violer. Voilà le nouveau tableau que nous offre de la réalité le discours dominant notre société, en tous cas celle française et parisienne que je fréquente. Comme c'est étrange ! Je me souviens avoir des fois dormi dans le même lit qu'une femme jeune et jolie, sans qu'on s'accouple, pour la simple raison qu'on ne se désirait pas. Serais-je un mutant, un être à part ? La réponse classique de nos jours est : « tu dois être homosexuel ». Je connais des homosexuels. Je n'ai rien contre eux. Mais je n'ai rien pour eux non plus. Alors, où est la réponse ?

Elle est que faire de la force masculine l'origine et la fatalité du patriarcat est absurde. C'est comme si on déclarait que la seule puissance de l'Allemagne explique le déclenchement de la seconde guerre mondiale. Il y a d'autres raisons pour expliquer ce phénomène. Ce n'est pas parce qu'on est fort qu'on va nécessairement faire usage de la force. Je croise dans la rue tous les jours des hommes ou des femmes plus forts physiquement que moi. Ils ne m'agressent pas pour autant.

Le patriarcat depuis des milliers d'années a commit un discours qui tente de justifier la domination de l'homme sur la femme. C'est là l'origine de bien des fadaises distillées tout au long des siècles et encore de nos jours dans notre société, qui s'affirme « évoluée » et « civilisée ».

Un vieil argument de l'esbroufe patriarcale que nous voyons fleurir tranquillement de nos jours est celui de « la femme tentatrice ». Il est aussi vieux au moins que l'histoire de la pomme que la première femme aurait incité le premier homme à partager avec elle. Si une femme se fait agresser sexuellement par un homme, ce serait de sa faute, car elle l'a « tenté »...

Je renvois à ma simple expérience : j'ai passé au moins deux années dans l'amphithéâtre de croquis de l’École des Beaux-Arts de Paris a dessiner du matin jusqu'au soir des femmes nues. Je n'en ai violé aucune, ni n'ai été tenté de le faire. Qu'on arrête de nous bassiner avec ces âneries de la femme tentatrice et responsable de son agression ! Si un homme agresse sexuellement une femme, son geste criminel relève des tribunaux, pas d'un pseudo débat philosophique sur « la tentation ».

Ce discours sur « la tentation » a eu des conséquences bizarres et risibles dans le domaine artistique. Nombre de femmes nues figurées dans la peinture ou la sculpture ont été bouchées. C'est-à-dire que leur sexe a été lissé et on a ôté sa forme morphologique. Au musée du Louvre est exposée une belle statue en bronze de Jean-Antoine Houdon figurant Diane chasseresse. Quand elle est entrée en 1829 dans les collections du musée elle avait un sexe. Il a été martelé et bouché par des artisans obéissant aux idiots puritains patriarcaux de l'époque. Il faudrait que cette statue soit à présent restaurée, en prenant pour modèle de son sexe la version intacte en marbre conservée à Lisbonne.

Dernière précision : si les femmes ont leurs règles, les hommes ont l'équivalent en plus discret. Les spermatozoïdes produits en permanence, quand ils sont inutilisés, sont évacués avec l'urine. Mais de ça on ne parle pas ou guère. Ce phénomène n'a jamais été accusé de faire aigrir le lait.

Basile philosophe naïf, Paris le 8 mai 2018

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