Qu'est-ce que
« l'esbroufe patriarcale » ? C'est une pratique
consistant à prendre n'importe quel sujet et en tirer à chaque fois
la conclusion que la femme est un être méprisable, infect, ennemi
et inférieur de l'homme. Un exemple classique de cette esbroufe
consiste à affirmer que : « la femme est menteuse ».
Comme si l'homme souvent ne l'était pas également, singulièrement avec la
femme. Et que la violence patriarcale n'est pas un encouragement pour
la femme à mentir à l'homme pour se protéger. Par exemple en
expliquant à l'occasion qu'elle a « un fiancé », en
fait imaginaire, pour repousser le harcèlement sexuel d'un homme de
son entourage. Homme qui risquerait de prendre mal la simple réponse
à « ses avances » consistant à lui dire qu'on n'a pas
envie de lui.
L'esbroufe patriarcale
prend des formes sophistiquées. L'une d'elles consiste à insister
sur les agressions sexuelles masculines commises par des rôdeurs
dans l'espace public, alors que la très grande majorité des
agressions sexuelles masculines interviennent dans l'espace privé de
la famille et des proches. Ainsi on préserve le caractère réservé
aux hommes de l'espace public. Et le couvre-feu de facto régnant
pour les femmes se déplaçant seules la nuit dans l'espace public
des grandes villes, notamment Paris. En insistant sur les crimes
sexuels commis par des rôdeurs masculins, le message envoyé aux
femmes est clair : « vous voulez vous balader seule la
nuit dans les rues des grandes villes ? C'est à vos risques et
périls. Cet espace est réservé à ces heures-là aux hommes. Et aux
femmes à condition qu'elles soient accompagnées. » On rejoint
là sous nos latitudes la situation des pays où il est énoncé par
la loi qu'une femme n'a pas le droit d'évoluer dans l'espace public
sans être obligatoirement accompagnée par un homme de son
entourage. Et après ça on va se gausser des pays où ces lois
existent, en oubliant que chez nous elles sont à certaines heures
effectives de facto !
L’esbroufe patriarcale
envahit également des domaines qui se veulent relever de la
Nature-même et de la physiologie humaine. Le domaine où cette
esbroufe a triomphé durant des milliers d'années est celui de la
menstruation. Phénomène bizarre et très longtemps inexplicable :
la femme en état de procréer et n'étant pas enceinte perd du sang
par son sexe tous les vingt-huit jours. Quelle explication ont
fournit à ce phénomène les ignorants savants patriarcaux ?
Que la femme durant ses règles est « impure ». Que
signifie ici « impure » ? Que ce n'est pas « pure ».
Qui définit ce qui est « pure » ou « impure » ?
Les « spécialistes » patriarcaux. Le résultat ne sera
pas inattendu.
En particulier, le sang
menstruel sera traité comme un poison prodigieux. Il serait vénéneux
et produirait de terribles et très dévastateurs effets à distance.
Il aigrirait le lait. Ternirait l'étain. Ferait tourner les jambons
qu'on a mit à sécher, etc. Ces phénomènes sont établis !
Si ! Si ! Tout le monde le reconnaît. Ou plutôt, quantité
de gens y compris réputés « sérieux et compétents »
l'ont reconnu durant des siècles. Même toucher une femme qui a ses
règles ou s'asseoir là où elle s'est assise n'était pas
recommandé pour un homme. Ce délire patriarcal a prospéré durant
des siècles avec un autre délire patriarcal aujourd'hui bien
oublié : l'imprégnation. Si une vierge s’accouple avec un
homme, tous les enfants qu'elle aura tout le long de sa vie seront à
l'image de son premier partenaire sexuel. D'où l'importance
essentielle qu'elle arrive vierge au mariage. À
cette superbe ânerie aux conclusions bien patriarcales quantité de
gens « sérieux et compétents » ont souscrit, notamment
l'historien français Jules Michelet. Mais aussi en son temps, le
discours produit par l'esbroufe patriarcale a évolué et il s'y est
conformé.
La
Science a bousculé une très vieille croyance : celle du
caractère particulier, vénéneux et maléfique du sang menstruel.
Il a été analysé et on a conclut à ce que c'était du sang on ne
peut plus ordinaire. Alors, l'esbroufe patriarcale remise en question
a choisit un nouveau travestissement.
La
femme perd du sang ordinaire durant ses règles ? Mais, quand, à
quel moment perd-t-on du sang ordinaire ? Réponse : quand
on est blessé. Donc, quand la femme perd son sang menstruel chaque
mois, elle est blessée, donc affaiblie, donc inférieure à l'homme,
donc ayant besoin de sa protection, donc devant lui obéir. C'est
exactement à ce discours qu'en 1858 souscrit Jules Michelet.
Ce
discours pseudo-scientifique et pseudo-logique n'a visiblement pas
tenu la route. De nos jours l'appel à la Nature dans sa volonté
implacable qui serait de donner à la femme une place inférieure et
subordonnée à l'homme a pris une forme nouvelle et beaucoup plus
simpliste : « la femme est dominée par l'homme ?
Logique, normal et même inévitable : l'homme est en moyenne
plus fort physiquement que la femme. » Quantité de gens, y
compris des femmes, souscrivent de nos jours autour de moi à ce
discours. Qui représente le énième travestissement de l’esbroufe
patriarcale mise à mal par la Science et les progrès de la
connaissance scientifique.
La
femme qui a ses règles ne fait plus tourner le lait en l'approchant,
mais qu'elle ait ou non ses règles, tous les hommes ne rêvent que
de la violer. Voilà le nouveau tableau que nous offre de la réalité
le discours dominant notre société, en tous cas celle française et
parisienne que je fréquente. Comme c'est étrange ! Je me
souviens avoir des fois dormi dans le même lit qu'une femme jeune et
jolie, sans qu'on s'accouple, pour la simple raison qu'on ne se désirait
pas. Serais-je un mutant, un être à part ? La réponse
classique de nos jours est : « tu dois être homosexuel ».
Je connais des homosexuels. Je n'ai rien contre eux. Mais je n'ai
rien pour eux non plus. Alors, où est la réponse ?
Elle
est que faire de la force masculine l'origine et la fatalité du
patriarcat est absurde. C'est comme si on déclarait que la seule puissance de
l'Allemagne explique le déclenchement de la seconde guerre mondiale.
Il y a d'autres raisons pour expliquer ce phénomène. Ce n'est pas
parce qu'on est fort qu'on va nécessairement faire usage de la
force. Je croise dans la rue tous les jours des hommes ou des femmes
plus forts physiquement que moi. Ils ne m'agressent pas pour autant.
Le
patriarcat depuis des milliers d'années a commit un discours qui
tente de justifier la domination de l'homme sur la femme. C'est là
l'origine de bien des fadaises distillées tout au long des siècles
et encore de nos jours dans notre société, qui s'affirme
« évoluée » et « civilisée ».
Un
vieil argument de l'esbroufe patriarcale que nous voyons fleurir
tranquillement de nos jours est celui de « la femme
tentatrice ». Il est aussi vieux au moins que l'histoire de la
pomme que la première femme aurait incité le premier homme à
partager avec elle. Si une femme se fait agresser sexuellement par un
homme, ce serait de sa faute, car elle l'a « tenté »...
Je
renvois à ma simple expérience : j'ai passé au moins deux
années dans l'amphithéâtre de croquis de l’École des Beaux-Arts
de Paris a dessiner du matin jusqu'au soir des femmes nues. Je n'en
ai violé aucune, ni n'ai été tenté de le faire. Qu'on arrête de
nous bassiner avec ces âneries de la femme tentatrice et responsable
de son agression ! Si un homme agresse sexuellement une femme,
son geste criminel relève des tribunaux, pas d'un pseudo débat
philosophique sur « la tentation ».
Ce
discours sur « la tentation » a eu des conséquences
bizarres et risibles dans le domaine artistique. Nombre de femmes
nues figurées dans la peinture ou la sculpture ont été bouchées.
C'est-à-dire que leur sexe a été lissé et on a ôté sa forme
morphologique. Au musée du Louvre est exposée une belle statue en
bronze de Jean-Antoine Houdon figurant Diane
chasseresse. Quand
elle est entrée en 1829 dans les collections du musée elle avait un
sexe. Il a été martelé et bouché par des artisans obéissant aux
idiots puritains patriarcaux de l'époque. Il faudrait que cette
statue soit à présent restaurée, en prenant pour modèle de son
sexe la version intacte en marbre conservée à Lisbonne.
Dernière
précision : si les femmes ont leurs règles, les hommes ont
l'équivalent en plus discret. Les spermatozoïdes produits en
permanence, quand ils sont inutilisés, sont évacués avec l'urine.
Mais de ça on ne parle pas ou guère. Ce phénomène n'a jamais été
accusé de faire aigrir le lait.
Basile
philosophe naïf, Paris le 8 mai 2018
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