Quand un homme ou une
femme s'implique ou tend à s'impliquer en amour, il rencontre très
souvent la peur, la souffrance et l'espérance. La peur, car il a
déjà connu des moments difficiles et douloureux, des déconvenues,
des déceptions, des grands désespoirs quand il a cherché l'amour
et parfois cru le rencontrer. La souffrance, car rien que ces
souvenirs et la crainte de nouvelles déceptions font horriblement
mal. Et on ne sait comment conjurer cette douleur. L'espérance n'est
guère plus supportable. Elle est si forte qu'elle amène à sortir
de la réalité. Une femme vous plaît ? La connaître serait le
bonheur assuré. Ne pas parvenir à l'approcher serait perdre le sens
de sa vie. Alors que deux semaines ou deux mois avant on ne la
connaissait pas. La femme convoitée devient une obsession, une idée
fixe qui vous poursuit et empêche de vivre tranquille.
Face à ces tourments, on
peut en avoir assez. Arrêter les tourments est difficile. Et
résoudre la situation en rencontrant quelqu'un est un rêve
inaccessible. Parfois on a l'impression que pour les autres c'est
tellement plus simple ! Qu'on n'a « pas de chance ».
Voire même que le sexe opposé serait stupide, méchant, ignorant.
Avec le temps on se dit :
« certes, je peux agir sur mon destin, il suffit de faire des
efforts. Mais là un élément m'échappe et je ne sais pas
l'influencer, il faut être deux... » Et puis, après des
années, voire des dizaines d'années de souffrances immondes, on en
vient à rêver : « ah ! Si seulement je pouvais
trouver la sérénité, quitte à oublier cette quête impossible de
l'amour ! »
Il est possible de faire
face et trouver la sérénité. Pour cela plusieurs décisions
s'imposent. La première sape les fondations de la plupart des
souffrances rencontrées. Il faut renoncer à l'amour
masturbationnel. Qui consiste à décider de « faire l'amour »
et ce faisant se retrouver à se masturber dans un orifice naturel
d'une ou un partenaire. L'amour dit « physique »,
c'est-à-dire l'acte sexuel, s'il est authentique et véritable ne se
décide jamais. Il vient et il arrive à un moment-donné. On
ne le fait pas venir par un raisonnement du genre : « c'est
bien et c'est possible de le faire, alors faisons-le ! »
Renoncer à l'acte sexuel
artificiellement amené en l'absence d'un désir réciproque et réel
de le pratiquer, c'est progresser significativement. Se débarrasser
d'une très large part du terrain ou poussent d'innombrables
fantasmes aux conséquences douloureuses.
La recherche de l'amour
masturbationnel peut prendre le caractère tragique du viol. Ses
conséquences sont dramatiques et ravageuses. Quantité de femmes
dans un premier temps vont vers une nouvelle connaissance masculine
et paraissent s'y intéresser. Puis font brutalement et sans
explication machine arrière et fuient. Elles peuvent fuir notamment
en se plongeant dans leur travail. Ce qui explique une part des
performances scolaires féminines. Dans le domaine des amours, suite
aux agressions vécues, la peur règne souvent en maître.
En avril 2017, Abigail Breslin, actrice qui a joué notamment dans le film « Little Miss Sunshine », a rendu public son viol. Elle indique parmi les graves séquelles de celui-ci : « je sursaute toujours quand quelqu'un me touche lorsque je ne m'y attends pas, même quand il s'agit de ma meilleure amie qui me tape sur l'épaule. »
D'après une étude
réalisée en France par l'Office national de la délinquance et des
réponses pénales (ONDRP), citée par le huffingtonpost du 8 février
2017 : « le viol est l'agression sexuelle la plus grave et
probablement la plus traumatisante pour la victime » et est
aussi « l'une des infractions les moins signalées à la
police ».
N'est pas comptabilisé
comme viol, ni considéré comme tel le viol par abus de confiance,
où par le mensonge on obtient ce qu'on obtient aussi très souvent
par la violence ou la pression psychologique. J'ai pu relever que les
victimes de viols qui se sont confiées à moi n'osaient pas employer
le mot « viol » et ses dérivés. Le mot par lui-même
fait peur. Alors que dire de l'acte subi ? Les récits butent et
s'arrêtent à un moment-donné. Ainsi par exemple ma mère m'a
raconté plusieurs fois qu'elle a été poursuivie, quand elle avait
dix ans, par un garçon âgé de quinze ans, armé d'un couteau, qui
l'insultait. Mais son récit s'arrêtait là. Dire ou écrire « j'ai
été violé » n'est pas évident. Il m'a fallu attendre ces
jours derniers pour évoquer ainsi une série d'agressions que j'ai
subi alors que j'avais huit ans.
L'isolement entraîné
par la peur, qu'elle vienne de soi ou qu'elle se manifeste chez les
autres, il faut le reconnaître sans savoir ni quand, ni avec qui il
sera possible de le rompre. Cet isolement n'est heureusement pas
absolu. L'amitié, la fête, peuvent cohabiter avec l'absence d'amour
dans le sens romantique du mot. Plutôt que se dire qu'on rate
quelque chose qu'on ne va pas vivre avec les autres, il est plus
positif de se dire que ce sont les autres qui ratent quelque chose
qu'ils ne vivront pas avec vous.
Enfin, il faut se méfier
de l'expression individuelle du problème de la famine amoureuse
généralisée. Cette famine conduit à deux troubles classiques.
Le premier consiste en la
plus délirante idéalisation d'un ou une partenaire éventuel en
amour. On a si faim d'amour, que l'autre, qui n'est jamais ni plus ni
moins qu'un homme ou une femme, est perçu comme une créature de
rêve, un être unique, exceptionnel, prodigieux, merveilleux,
adorable... stop ! C'est juste un homme ou une femme qui vous
plaît et que votre faim dévorante d'amour transforme en mirage
séducteur. Le prince charmant, la princesse charmante n'existe pas.
Ou plutôt : il existe autant de princes charmants ou de
princesses charmantes que d'hommes ou de femmes qui vous plaisent.
L'autre expression
individuelle du problème de la famine amoureuse généralisée c'est
la jalousie. Un poison terrible qui peut détruire les plus belles
relations. Il faut savoir y résister en soi et résister aux
manifestations de ce phénomène chez les autres.
J'ai assisté à des
manifestations de jalousie chez des femmes qui vivent enfermées dans
une sorte de « cage de peur » suite à un viol. Ainsi,
sans aucune attitude séductrice elles souffrent de voir de bonnes
relations s'établir entre un homme qu'elles aiment bien et qui n'est
pas leur amant, moi, et des jolies filles. Ces bonnes relations
pouvant se résumer à une conversation aimable ou une fleur offerte.
Ces femmes enfermées lancent à ces occasions des regards noirs qui
sont comme des appels au secours, des cris de souffrance muette. Mais
le plus souvent les enfermées vont feindre l'indifférence.
Quelqu'un m'a dit un jour
que le monde ressemblait à un immense hôpital psychiatrique. Il
avait raison.
Cependant, si on arrive à corriger certaines divagations de notre esprit et renoncer à de fausses directions, on peut parvenir à une certaine sérénité. Peut-on ainsi parvenir également à s'acoquiner avec ce sacré Cupidon ? Je l'ignore, mais en tous les cas ne prétend pas m'en éloigner. Tout en ne souffrant plus de la blessure de ses flèches, ce qui est déjà beaucoup.
Cependant, si on arrive à corriger certaines divagations de notre esprit et renoncer à de fausses directions, on peut parvenir à une certaine sérénité. Peut-on ainsi parvenir également à s'acoquiner avec ce sacré Cupidon ? Je l'ignore, mais en tous les cas ne prétend pas m'en éloigner. Tout en ne souffrant plus de la blessure de ses flèches, ce qui est déjà beaucoup.
Il existe des personnes
heureuses en amour, elles sont extrêmement rares. D'autres vivent un
amour passable. Enfin, un grand nombre d'autres personnes vivent dans
des souffrances plus ou moins grandes. Comme cette dame que j'ai
connu et qui justifiait son célibat et sa vie solitaire teintée de
saphisme caché, en me disant : « les hommes, j'en ai fait
le tour ».
Basile, philosophe
naïf, Paris le 28 avril 2017
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire