La société humaine
depuis des millénaires est en partie dominée par la prétention
masculine à contrôler la vie et la liberté des femmes. Tous les
pouvoirs sont dominés par les hommes, et y compris le concept même
de pouvoir. Ce qui entraîne la volonté masculine de contrôler la
vie des femmes. En faire des êtres mineurs, dépendants, voire
terrorisés. Un puissant élément de contrôle est représenté par
le refus obstiné et délibéré de reconnaître le travail
domestique et maternel féminin et refuser de le rémunérer comme
cela se fait avec d'autres formes de travail. Une mère s'insurgeait
contre l'idée de reconnaître ce travail. Elle me disait qu'un
enfant se fait à deux... prenons cet exemple absolument. Pour faire
un enfant, l'homme prend cinq minutes de plaisir, la femme aussi dans
le meilleur des cas. Ensuite l'homme prend sa douche et dort. La
femme se tape elle neuf mois de grossesse, quatre heures
d'accouchement, plus la période douloureuse de remise en place des
organes et les séquelles éventuels de sa ou ses grossesses. Le
ventre d'une mère de cinq enfants ne ressemble pas à celui d'une
jeune fille nullipare, c'est-à-dire qui n'a pas eu d'enfants. Alors,
égaux le sort des femmes et des hommes ? Qu'on me permette de
rire... Il est bien évident que non. Quant à la suite, après
l'accouchement, le sort des femmes et des hommes est-il égal ?
Les pouvoirs dans la
société sont masculins. Le pouvoir politique, étatique,
partidaire, syndical, culturel est masculin. Le premier tour de
l'élection présidentielle s'est déroulé hier en France. Il y
avait neuf candidats et deux candidates... Qui a dénoncé ça ?
Apparemment personne, ou alors les médias en ont peu parlé. Ce
chiffre est éloquent. Je croyais qu'il y avait en France plus de
cinquante pour cent de femmes... Ce chiffre témoigne bien de ce que
« la parité » dans la politique française n'existe pas.
Et le silence assourdissant qui a accompagné cette situation est
révélateur de la réalité de notre pays, par delà les discours.
La présence d'une femme
à la tête d'un gouvernement ne signifie en rien que le pouvoir
cesse d'être masculin. L'Inde et le Pakistan ont connu une cheffe de
gouvernement... Ces pays sont-ils devenus pour autant plus égalitaire
s'agissant de la condition féminine comparée à celle masculine ?
Non.
Le Brésil et l'Argentine
ont eu chacun une cheffe de gouvernement. L'avortement est toujours
interdit dans ces deux pays...
Il n'y a pas que le
pouvoir politique. Le pouvoir religieux est également masculin
pratiquement partout. On voit l'église catholique donner son avis et
intervenir dans le domaine des mœurs. Par exemple, contribuer à
interdire la liberté d'avorter en Amérique latine, à Malte ou en
Pologne. Et cette église est dirigée par des hommes. Il n'existe
pas de papesse... C'est donc ici, encore une fois, le pouvoir
masculin qui s'exprime et s'impose aux femmes.
La guerre est le plus
grand des fléaux d'origine humaine. Qui conduit les guerres ?
Les militaires, et qui dirige les armées ? Encore et toujours
les hommes. Le pouvoir politique masculin initie et provoque les
guerres. Le pouvoir militaire masculin gère la suite... Et les
femmes en sont les premières victimes.
La prétention plus ou
moins réalisée effectivement du pouvoir masculin sur les femmes
conduit à d'innombrables violences. Quand en 1967 la loi Neuwirth
autorisa en France la contraception, qui était interdite depuis au
moins 1920, j'ai lu plusieurs fois des points de vue qui m'ont
intrigué. C'était des hommes qui s'insurgeaient et s'inquiétaient
car dorénavant, grâce à la contraception, les femmes allaient
prendre le contrôle de qui décide ou non d'avoir des enfants...
Quand en France le
Mouvement pour la Liberté de l'Avortement et de la Contraception
s'est mis à réaliser une foule d'avortements illégaux, le pouvoir
politique a fait une loi qui autorisait l'avortement rebaptisé
Interruption Volontaire de Grossesse ou IVG, sous le contrôle de
l’État et réalisé dans un cadre hospitalier. Ainsi le contrôle
et la conduite des avortements échappaient aux femmes organisées
pour et retournaient aux mains masculines du pouvoir étatique
masculin et du pouvoir médical masculin. On pense ce qu'on veut de
la liberté ou non d'interrompre une grossesse. Cependant il était
bon de rappeler l'enjeu essentiel de la loi Veil de 1974 :
remettre le contrôle masculin sur un domaine féminin qui commençait
à lui échapper. L'avortement tendait à se banaliser sous le
contrôle des femmes. L'IVG lui était substitué sous le contrôle
des hommes.
Quand on évoque la
condition féminine, deux propos s'élèvent fréquemment :
« oui, mais ça a changé en mieux depuis ces dernières
décennies » et « comparé à tel ou tel pays d'Orient,
en France la situation est très bonne. »
Ces deux arguments n'en
sont pas et sont fallacieux et dangereux. Le premier laisse supposer
que « le progrès » est irréversible et linéaire. Ça
ne fonctionne pas bien maintenant ? Attendez, ça va
s'arranger ! Il suffit d'attendre et tout s'arrangera comme
ça s'est déjà amélioré hier. »
Je disais à une mère
que je trouvais inadmissible qu'une jeune femme jolie et seule ne
puisse pas traverser Paris à pied entre minuit et demi et quatre
heures du matin sans craindre l'agression sexuelle. Elle me répondait
que ça finirait par s'arranger. Bien sûr, lui ai-je dit. Durant
encore 200 ans vos filles se feront violer, mais après ça
s'arrangera. Faut-il l'accepter ?
Le problème c'est qu'au
nom d'idées ou de raisonnements divers on accepte l'inacceptable.
C'est comme les « arguments » consistant à parler de
l'atroce condition féminine dans le pays X ou Y, pour dire qu'en
comparaison tout va bien chez nous en France. Ce ne sont pas des
arguments. L'inacceptable reste inacceptable quand bien-même la
situation serait pire ailleurs.
Il y a aussi la façon de
se rassurer consistant à confondre le monde entier avec la situation
confortable de gens vivants à Paris et ayant des manières
pacifiques de se comporter. Il y a 200 millions de femmes excisées
de par le monde. Et parmi elles certaines habitent y compris Paris.
La vérité est que la
prétention masculine à contrôler et dominer l'ensemble des femmes,
alors que nous avons besoin de respect réciproque et quelquefois
d'amour réciproque, conduit à rendre extrêmement violents les
rapports homme-femme.
L'homme a besoin de la
femme. La femme a besoin de l'homme. La violence règne, comment
faire pour arranger les relations ? Quand des relations bonnes
s'établissent, grâce à elles il se forme comme des oasis de paix
au milieu d'une zone de guerre.
Des femmes violentes
existent, de même qu'il existe des hommes non violents. La règle
étant que les femmes sont dominées et maltraitées et les hommes
dominateurs et mal-traiteurs. Et tout le monde le vit mal. Il faut
changer.
J'ai proposé pour cela
la naissance d'une représentation politique des femmes :
l'Assemblée féminine. On m'a dit qu'existe déjà la parité et son
« progrès » à venir. On voit bien tous les jours que
c'est très souvent une parfaite foutaise. Les ouvriers du livre font
des livres et s'organisent entre ouvriers du livre pour défendre
leurs intérêts. Et celles qui fabriquent des enfants (l'homme
fournit seulement quelques centilitres de sperme) ne devraient pas
s'organiser... et pourquoi donc ? Les femmes de ménage, les
puéricultrices s'organisent et pas les mères, pourquoi ? Ces
derniers temps on a fermé en France une multitude de maternités de
proximité. Résultat : les femmes doivent parfois faire une
heure et demi de route pour aller accoucher. En cas de problème,
elles et leurs bébés peuvent mourir. Si les femmes étaient plus
organisées on mettrait un terme à cette infamie.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 24 avril 2017
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