Au début de sa vie, le
petit humain vit quantité de choses comme des câlins : être
lavé avec un gant tiède, par exemple. Il peut aussi être caressé,
embrassé, câliné. C'est le premier temps de l'amour. Puis arrive
un jour le sevrage tactile. On décrète qu'il est un « grand ».
Plus de câlins ou presque. Croyant à un phénomène naturel, alors
qu'il s'agit d'un phénomène culturel, Freud a baptisé la fin de
cette période chaleureuse « début de la période de
latence ». C'est le second temps de l'amour.
Au bout d'un certain
nombre d'années, les petits humains cherchent à sortir de cette
« période de latence ». Mais celle-ci les a rendu
analphabètes tactiles, ignorants et maladroits pour donner,
recevoir, apprécier les caresses. Les jeunes garçons, tout
particulièrement, vont découvrir l'érection et l'éjaculation avec
la masturbation masculine adulte. Ils se polariseront avec une
intensité inouïe sur cette dernière. Quand bien-même leur
jouissance éjaculatoire serait médiocre, voire absente, voire
remplacée par de la douleur, ils vont pratiquer obsessionnellement
la masturbation. Et chercheront comme une idée fixe à se masturber
dans un orifice naturel d'un tiers, croyant ainsi « faire
l'amour ». Ils harcèleront leurs partenaires rêvés, qui se
retrouveront sur la défensive en permanence. C'est le troisième
temps de l'amour.
Phénomène qui
accentuera l'agressivité sexuelle des mâles : l'impatience à
se retrouver satisfait. Autre phénomène perturbant : la
projection dans le futur. C'est le quatrième temps de l'amour. Il se
situe dans l'imagination. En caricaturant à peine, on peut dire que
deux jeunes s'étant à peine rencontrés, voilà que l'un des deux
commence à s'interroger sur la couleur de la moquette de la chambre
des enfants.
Les inévitables coups
reçus au sens propre ou figuré vont amener la peur de l'autre. Or
rien n'est plus étranger à l'amour que la peur. L'avènement de la
peur marquera l'arrivée du cinquième temps de l'amour.
Derrière le brouillard
de l'ignorance et des conditionnements culturels, subsistera
péniblement le temps réel de l'amour. Il aura bien de la peine à
surgir et s'imposer. C'est le sixième et bien rare temps de l'amour.
Quand on cherche à
parvenir au sixième temps de l'amour, on peut craindre de se mettre
en danger. Troubler sa tranquillité, réveiller des souffrances
sentimentales vécues et passées. Il ne faut pas oublier que si
ainsi on se met en danger, l’autre aussi n'est pas à l'abri. C'est
une prise de risque réciproque. L'amour peut surgir à un moment
sans prévenir, comme un voleur dans la nuit. Sauf qu'il kidnappe les
cœurs.
Devant la menace des
douloureuses flèches de Cupidon, la fuite n'est pas toujours la
meilleure des solutions. Le problème qui rend la situation difficile
c'est le hiatus vécu du sevrage tactile. On a oublié d'apprendre à
aimer, durant des années on s'est tenu à distance de l'amour. Si ce
n'est, comme les vieux et les adultes solitaires, l'amour des
animaux. Et voilà qu'on se retrouve confronté à la rencontre et la
découverte de l'autre, qui avec le temps est devenu un étranger ou
une étrangère.
Les petits enfants sont plus proches les uns des autres que les adultes. Et devenu adulte on ne sait plus que faire de ses mains ! On a désappris la peinture, la danse, la poésie et... l'amour ! Et l'autre, l'inconnu, est aussi ignorant que vous. La maladresse apportera la souffrance et la souffrance amènera la peur. Il n'est pas très aisé de faire comme si on n'avait jamais pris de coups, quand commence une relation nouvelle. C'est pourtant ainsi qu'il faut faire, penser, agir. Ne pas chercher à aller trop vite. Ne pas se jeter sur son assiette et avaler quand la faim vous tenaille. Aimer.
Les petits enfants sont plus proches les uns des autres que les adultes. Et devenu adulte on ne sait plus que faire de ses mains ! On a désappris la peinture, la danse, la poésie et... l'amour ! Et l'autre, l'inconnu, est aussi ignorant que vous. La maladresse apportera la souffrance et la souffrance amènera la peur. Il n'est pas très aisé de faire comme si on n'avait jamais pris de coups, quand commence une relation nouvelle. C'est pourtant ainsi qu'il faut faire, penser, agir. Ne pas chercher à aller trop vite. Ne pas se jeter sur son assiette et avaler quand la faim vous tenaille. Aimer.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 13 avril 2017
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