L'orientation idéologique des zones dites
« érogènes » est un produit de la Culture et non une
fatalité naturelle. Ainsi, par exemple, quantité de femmes et
jeunes filles apprécient le fait de voir l'organe sexuel masculin,
tout au moins celui d'hommes qu'elles aiment bien. Et, à l'occasion,
aimeraient bien le toucher, jouer avec, sans pour autant souhaiter
automatiquement le coït.
Mais, l'interprétation idéologique de cette zone
anatomique fait croire aux femmes et aux hommes que cette vue, ces
gestes, impliquent l'acte sexuel. Un journal féminin écrivait même,
il y a quelques années, que le sexe masculin « était une
bombe ». Il suffirait qu'une femme le touche, pour que l'homme
concerné, automatiquement se jette sur elle pour « faire
l'amour ».
Or, le mécanisme du désir est plus délicat et
complexe que ça. Une femme et un homme n'ont pas automatiquement et
réciproquement envie du coït simplement parce qu'on fait du touche
zizi. Mais, abusé par leur stupide culture, bien des personnes des
deux sexes croient qu'il en est ainsi. Sans éprouver de désir réel,
elles s'appliquent alors à faire une chose dont elles n'ont pas
vraiment envie. Elles galvaudent l'acte sexuel. D'autant plus
facilement que, même si elles n'en ont pas envie, elles se disent
qu'il faut le faire pour l'autre, qui en aurait envie.
Finalement, sans l'avouer et souvent se l'avouer,
elles trainent les pieds, rechignent à une activité
artificiellement programmée. Pour cette raison quantité de femmes
et jeunes filles éviteront de chercher à voir, toucher, jouer avec
l'organe sexuel masculin. Y compris d'hommes qu'elles connaissent et
apprécient. Même si elles en ont envie. Elles renonceront à leur
désir et plaisir pour avoir la paix. Et ne pas être dérangé par
un acte sexuel mal venu.
L'organe sexuel masculin n'est pas le seul organe
ainsi délaissé, victime de l'orientation idéologique qui lui est
accordée dans notre Culture. Ce problème concerne toutes les zones
anatomiques classées "zones érogènes". Car elles aussi
prétendument liées à la réalisation automatique de l'acte sexuel.
Ainsi, dans le monde actuel, il est quasiment impossible de caresser
les seins d'une copine proche, simplement pour les caresser et rien
de plus. C'est-à-dire pour le plaisir de caresser pour l'un. Et être
caressée pour l'autre. D'où vient cette impossibilité ? De ce que
la société a abusivement codifié ce geste en un annexe de l'acte
sexuel. Ou bien, il est refusé par la volonté de refuser l'acte
sexuel. Ou bien, il est accepté comme prologue, accompagnement ou
suite à celui-ci.
Certains hommes machos refusent d'ailleurs de
s'occuper des seins de leur petite amie et préfèrent ne s'occuper
que d'autres endroits. Pour eux, s'attarder sur les seins représente
une perte de temps. Ils préfèrent aller à l'essentiel pour eux :
le coït. De plus, s'occuper des seins leur apparaît comme un geste
infantilisant car rappelant la tétée.
Il existe des vidéos pornos où on ne touche
pratiquement pas les seins des dames, y compris quand ils sont
superbes. C'est dire la médiocrité sensuelle de ce genre de
productions.
J'ai connu une dame jolie qui avait eu pas mal
d'amants. Aucun ne s'était occupé à lui caresser les seins,
m'a-t-elle dit. Ils étaient très petits. Il semblerait que les
seins très petits sont nettement plus sensibles aux caresses que les
gros seins. Mais, pour bénéficier de cet avantage sensuel, encore
faut-il avoir l'occasion de vivre ces caresses, ce qui n'est pas
toujours le cas.
Les seins ne sont pas les seuls perdants en matière
de câlins. Quantité de femmes n'ont jamais reçus de caresses sur
le dos, par exemple. J'en ai rencontré. Et elles avaient déjà eu
plusieurs amants dans leur vie.
Un autre grand perdant dans le domaine des caresses
est le bisou entre adultes, singulièrement celui sur la bouche,
ainsi que la caresse linguale qui peut aller avec. Ce baiser est
considéré comme impérativement lié à l'acceptation de l'acte
sexuel. Il est ainsi ritualisé. Or, il est fort agréable. Et n'est
en fait aucunement liée à l'acte sexuel par un lien mécanique.
Le fait est d'évidence. Si en France s'embrasser
sur la bouche entre adultes est considéré ainsi comme « sexuel »,
dans d'autres pays, comme la Russie, on ne pense pas pareil. Et il
existe aussi, aujourd'hui en France, quantité de gens qui embrassent
leurs petits enfants sur la bouche sans accorder à ce geste une
quelconque connotation sexuelle.
L'aberration de sexualiser le baiser sur la bouche
fait que dès que deux amants officiellement se séparent,
c'est-à-dire ne baisent plus ensemble, l'arrêt des bisous sur la
bouche intervient comme une sorte d'impératif automatique.
Quand bien-même l'un des deux ou les deux auraient
la nostalgie de ces bisous. Ils croient juste et inévitable de se
plier à l'orientation idéologique des zones érogènes : pas de
baise, pas de bisous sur la bouche. Les règles culturelles établies
prétendant « régler » notre sexualité sont frustrantes
et stupides. Elles prétendent obliger à faire des choses qu'on n'a
pas envie de faire et qu'on peut éviter. Et interdire des choses
qu'on a envie de faire et qu'il est possible de faire.Mais ces règles
sont rarement remises en question, car relevant soi-disant de la
« Nature ». Un mot en six lettres qui prétend ici
remplacer la réflexion, l'intelligence, la sensibilité, le plaisir,
la tendresse, la douceur, la compréhension, le toucher, le respect
de soi et de l'autre.
L'hypocrisie, les règles et codes établis et les
non dits interdisant généralement de proposer quelques
modifications que ce soit aux dites règles. Vous vous voyez
prétendre embrasser sur la bouche avec la langue. Ou caresser les
seins d'une jeune fille ou une femme que vous appréciez, et qui vous
apprécie, en avançant que ça n'est pas une proposition d'acte
sexuel ? Vous risquez très largement de passer pour un fou, un
imbécile, un rêveur irréaliste, un obsédé sexuel ou un dragueur
hypocrite.
La bêtise et le manque de respect de soi et de
l'autre polluant les relations humaines sont des phénomènes très
anciens. Qui n'ont pas toujours existé. Dans les temps premiers de
l'Humanité, l'homme vivait en conformité avec sa nature et sa
réalité. Cette réalité vit toujours en nous. Il appartient à
chacun de nous de la chercher et la trouver. On peut, on doit
résister. Quand c'est possible, il faut remettre en question ce qui
s'oppose au respect de soi et de son prochain. De cette remise en
question dépend notre accomplissement, source de notre joie et notre
liberté.
Basile, philosophe naïf, Paris le 31 mai 2014
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