L'élitisme négateur de
l'Humanité, comme bien d'autres, j'y ai été confronté. Il prend
des aspects particuliers selon les groupes, les milieux. Mais il a
toujours la même signification : « au fond, l'Humanité, le
Genre humain n'existe pas. Il y a les vrais gens valables : nous et
les autres membres de notre groupe, les autres représentants de
notre milieu. Et ceux qui se prétendent des êtres humains en dehors
de ce cercle étroit, ne sont en fait rien. »
Une triste et regrettable
conséquence de cette situation est un catastrophique appauvrissement
de l'Humanité. En effet, si vous avez une excellente idée pratique
mais n'appartenez pas à la branche, au groupe concerné, il sera
impossible d'en faire profiter. Si vous êtes par exemple un
agriculteur et avez une idée absolument génial pour améliorer la
construction des digues contre les inondations, personne ne daignera
vous écouter. Et surtout pas les constructeurs de digues, et encore
moins les techniciens et ingénieurs concepteurs de digues. Il n'y
aura rien à faire. Et si, inversement, un ingénieur constructeur de
digues fait une trouvaille absolument génial pour améliorer la
culture des champs, il n'y a autant dire aucune possibilité que son
invention soit mise en application. Les agriculteurs ne voudront pas
l'écouter. Et tout le reste partout est ainsi fait. En tous cas chez
nous, en France et à Paris, mais sans doute pas qu'en France et à
Paris. L'intelligence humaine, la créativité humaine est bridée.
Et, au sein de chaque groupe, il y a également une hiérarchie. Dans
le milieu hospitalier soignant, par exemple, il y a en bas, les
agents de services hospitaliers, puis au dessus : les aides
soignants, les infirmières, les infirmières chefs, les internes,
les médecins, les chefs de cliniques, les professeurs... si un
membre de cette hiérarchie s'avise à empiéter sur les prérogatives
de la couche supérieure, malheur à lui ! Un médecin de base qui
découvre un traitement efficace mais que seuls ses « supérieurs »
sont « en droit » de trouver, ne sera pas écouté. La
masse de découvertes utiles dans tous les domaines qui part à la
poubelle chaque année est phénoménale.
J'ai été confronté à
l'élitisme des « artistes ». Fréquentant l'École des
Beaux-Arts, je me souviens du mépris affiché par un élève
vis-à-vis des « peintres du dimanche », qui « peignent
des bouquets de fleurs ». Ce sont pourtant de vrais artistes.
Mais, ceux qui fréquentent une grande école d'art, et se proclament
« artistes », vont souvent témoigner d'un mépris
agressif pour les artistes du dimanche. J'ai aussi vu ce mépris
affiché par des enseignants de la même école.
Quand j'ai eu 33 ans,
j'ai élaboré une théorie sur l'univers, fruit de vingt-six années
de réflexion. Considérant cette théorie comme très valable, très
intéressante et nouvelle, j'ai voulu la communiquer à des
scientifiques. La soumettre à leur avis. Je ne savais pas que mon
ambition était déplacée dans notre société. Quand on ne fait pas
partie de la caste des scientifiques, on n'est pas en droit de
prétendre émettre une théorie dont la prérogative d'émission est
réservée aux « savants ».
J'ai envoyé des courriers, la plupart restèrent sans réponses, exceptées deux aimables accusés de réception. L'un venant d'Angleterre, l'autre, de la Société française d'astronomie, qui regroupe des amateurs d'astronomie. Enfin, j'arrivais à obtenir un rendez-vous. C'était avec un vulgarisateur du Palais de la Découverte. Là où il travaillait, au contact du public, il ne pouvait pas m'esquiver.
J'ai envoyé des courriers, la plupart restèrent sans réponses, exceptées deux aimables accusés de réception. L'un venant d'Angleterre, l'autre, de la Société française d'astronomie, qui regroupe des amateurs d'astronomie. Enfin, j'arrivais à obtenir un rendez-vous. C'était avec un vulgarisateur du Palais de la Découverte. Là où il travaillait, au contact du public, il ne pouvait pas m'esquiver.
Je me rendis au
rendez-vous qu'il m'avait fixé au Palais de la Découverte. Le
vulgarisateur m'avait promis m'inviter ensuite à la séance du
planétarium, qu'il commentait. Précieuse invitation ! Ma bourse
plutôt plate me privant du plaisir de me rendre dans ce lieu très
apprécié par moi. J'apportai mes trois pages de réflexions.
L'homme les parcouru et me tint le discours suivant : « Vous
savez, quand des scientifiques élaborent une théorie, ils
réfléchissent çà la virgule près... » Sous-entendu que mon
texte, très longuement travaillé, ce qui je pense, se voyait,
aurait été bâclé et rédigé à la va-vite, ce qui n'était
nullement le cas.
Et, s'agissant de mon
argument essentiel, la réponse fut : « ça n'est pas comme ça
que les scientifiques se posent la question ! » Sous-entendu :
« il existe une façon de se poser la question et elle
appartient aux scientifiques, pas à vous. Fermez-là ! »
Voilà. A mon interrogation on me répondait en brandissant
l'autorité de « ceux qui savent ». Au lieu de discuter,
répondre à mon propos, on me répondait : « ta gueule ! »
Mon estime pour « les
scientifiques » s'est alors effondré. Et, me quittant, le
vulgarisateur, oubliant sa promesse de m'inviter au planétarium, m'a
planté là. Bravo !
Exceptée une correction
de mon texte qu'il m'avait indiqué, pour le reste, mon cher
vulgarisateur ne m'avait pas répondu. Et m'avait en même temps donné
l'explication du silence de ses chers collègues. Ils ne me
répondaient pas, tout simplement parce qu'ils me crachaient dessus.
Je n'étais pas un des leurs. J'ai compris aussi à cet instant-là
que la théorie du « Big Bang » c'est de la merde. Et
j'en suis resté depuis à cette conviction.
Je m'étais coltiné ici
les physiciens, astronomes, astrophysiciens. Je devais par la suite
me confronter à une autre catégorie d'élitistes méprisants : les
élitistes méprisants membres du « corps médical ».
Voilà comment j'ai eu
affaire à ces méprisants-là. Un jour, dans les années 1980,
j'avise en occasion dans une librairie un livre au nom énigmatique :
« Les microbes sont-ils nos ennemis ? » L'auteur : un
certain docteur Marc Emily, que je ne connais pas. L'édition remonte
à 1966. Je l'achète.
En lisant cet ouvrage
j'ai eu le sentiment qu'il se composait de deux parties. Une longue
introduction formée de comptes-rendus de soins médicaux utilisant
un médicament particulier. Et ensuite, une longue digression ayant
pour prétention de donner une preuve médicale et scientifique de
l'existence de Dieu à travers la controverse entre les travaux de
deux scientifiques français : Bechamp et Pasteur.
Je laisse de côté la
deuxième partie du livre et m'intéresse plus à la première. Il y
est question d'une substance biologique particulière extraite en
1903 du bacille de Koch par le professeur de médecine français André
Jousset. Il l'a étudié durant trente années. Emily rapporte que le
produit en question, que Jousset a baptisé « l'allergine »,
est d'un intérêt médical très grand et qu'il a cessé d'être
fabriqué en 1958. Il accuse les laboratoires pharmaceutiques d'avoir
été à l'origine de cette décision selon lui révoltante et
totalement injustifiée. Il me semble aussi que Jousset a été un
catholique extrêmement pratiquant, fait qui lui aurait valu
l'hostilité de ses confrères, étendue à ses travaux de
recherches.
Je ne suis ni médecin,
ni pharmacien, mais cette histoire d'allergine m'a intrigué et a
attiré mon attention. Par la suite, durant des années, j'ai cherché
à intéresser des médecins ou pharmaciens à cette fameuse et
intrigante allergine dont l'action universelle rapportée par Emily
tendait à faire penser à un renforcement des défenses immunitaires
du malade par un mode d'action mystérieux.
Je n'ai jamais prétendu
« savoir » ce que c'était que l'allergine, mais juste
voulu attirer l'attention de médecins ou chercheurs éventuels en
pharmacie pour qu'ils se penchent sur ce produit oublié.
Que ce soit des inconnus,
des voisins ou des proches, j'ai été systématiquement accueilli
par un immense et aimable éclat de rire. Quoi ! Ce Basile, diplômé
des Beaux-Arts qui prétend s'occuper de médecine ! En fait d'éclat
de rire, c'était un « éclat de rire » discret. J'ai
bien senti que, sans me le dire ouvertement, tous mes interlocuteurs
n'avaient strictement rien à foutre de mes propos.
Je leur disais : « vous
pourriez vous intéresser à cette substance ? Peut-être même pour
la tester contre une maladie apparue bien après le retrait de
l'allergine du codex.... » Autant pisser dans un violon.
En désespoir de causes,
après bien des années, je me suis dis : « Bon, je ne suis ni
médecin, ni pharmacien.... mais comme les médecins ou pharmaciens
ou étudiants en pharmacie auxquels je me suis adressé n'en ont rien
à foutre, je vais aller faire mes recherches quand-même et moi-même
! »
Je me suis rendu à la
bibliothèque de la faculté de pharmacie de Paris V. J'ai reçu
l'accueil le plus aimable possible. C'était en 1997. J'ai cherché
des écrits sur l'allergine. J'en ai trouvé et photocopié. Par la
suite, j'ai envoyé ce dossier à diverses personnes. Ça n'a servi à
strictement rien.
Cette allergine
présente-t-elle de l'intérêt ? Nous ne le saurons que le jour où
une personne habilitée à en parler en fera un sujet d'études. Pour
l'instant, en tant qu'artiste peintre et poète, j'ai compris qu'il
ne me reste plus qu'à fermer ma gueule. En attendant qu'un autre
peut-être découvre un usage curatif intéressant pour l'allergine.
Comme me le disait il y a
des années mon médecin traitant de l'époque : « en France,
quand quelqu'un dit quelque chose, on ne s'intéresse pas d'abord à
ce qu'il dit, mais à savoir qui il est. S'il n'est pas considéré
comme une voix légitime pour s'intéresser au sujet dont il parle,
on n'attache aucune importance à son propos. Quel que soit l'intérêt
de celui-ci. C'est différent aux États-Unis et au Canada. »
J'ai ainsi été
confronté avec l'allergine à l'élitisme médical. Une autre
variété d'élitisme est celui du milieu de la presse. Et précisément
des journalistes, dont certains « se la pète », comme on
dit vulgairement.
C'était en 1994. Je commençais à peine à rendre public mon initiative pour la renaissance du Carnaval de Paris. Je souhaitais faire connaître non moi, mais le projet. Par la presse notamment, et c'est pourquoi je me suis rendu au siège d'un grand journal quotidien. Là, je sympathise avec le planton au rez-de-chaussée. Nous avons presque travaillé avec le même supérieur. Lui comme garde républicain, moi comme civil employé au nettoyage d'une caserne de la garde républicaine. Le planton apprenant ma démarche cherche à m'aider. Il appelle de son poste un journaliste et me passe le combiné. Là, c'est la déception. Alors que je suis venu parler du Carnaval de Paris, de sa renaissance, mon interlocuteur me prend de très haut. Je sens que pour lui je suis quelqu'un qui l'implore de bien vouloir parler de moi et lui il refuse. Dialogue de sourds, où le journaliste joue à la vedette sollicitée par un admirateur importun. C'est fini. Il n'y a rien à obtenir pour le Carnaval de Paris. Je termine la conversation. Ça n'est pas aujourd'hui que ce journal va parler de la renaissance du Carnaval de Paris.
C'était en 1994. Je commençais à peine à rendre public mon initiative pour la renaissance du Carnaval de Paris. Je souhaitais faire connaître non moi, mais le projet. Par la presse notamment, et c'est pourquoi je me suis rendu au siège d'un grand journal quotidien. Là, je sympathise avec le planton au rez-de-chaussée. Nous avons presque travaillé avec le même supérieur. Lui comme garde républicain, moi comme civil employé au nettoyage d'une caserne de la garde républicaine. Le planton apprenant ma démarche cherche à m'aider. Il appelle de son poste un journaliste et me passe le combiné. Là, c'est la déception. Alors que je suis venu parler du Carnaval de Paris, de sa renaissance, mon interlocuteur me prend de très haut. Je sens que pour lui je suis quelqu'un qui l'implore de bien vouloir parler de moi et lui il refuse. Dialogue de sourds, où le journaliste joue à la vedette sollicitée par un admirateur importun. C'est fini. Il n'y a rien à obtenir pour le Carnaval de Paris. Je termine la conversation. Ça n'est pas aujourd'hui que ce journal va parler de la renaissance du Carnaval de Paris.
M'occupant toujours et à
la même époque du développement du projet de renaissance du
Carnaval de Paris dont j'avais pris l'initiative, j'ai été
confronté à un autre élitisme : celui des politiques.
Toujours en 1994, j'écris
un courrier assez volumineux à l'adjointe au maire de Paris chargée
de la Culture. Comme je n'ai pas le sou, plutôt qu'acheter des
timbres, je prends la grande enveloppe et la porte à l'Hôtel de
ville. J'arrive jusqu'à l'entrée du secrétariat de la dame en
question. J'aperçois là un couloir derrière une paroi vitrée où
s'ouvre une porte vitrée également. Mais, il y a visiblement
plusieurs bureaux. Auquel remettre ma missive ? Pas de problème ! Il
y a deux dames qui conversent sur le pas de porte de la porte vitrée.
Je leur demande où porter le courrier. Elles me l'indiquent. Mais
j'ai aussi perçu dans leur regard, leur ton, le plus parfait mépris
envers moi. Pourquoi ? Parce que, avec mon enveloppe à la main, je
leur faisais penser à un simple coursier. Autant dire rien. C'est
ainsi partout, le mépris est redondant. Comment voulez-vous
envisager une société juste, harmonieuse, égalitaire, quand
partout on rencontre de tels comportements ? C'est impossible tant
que ça durera. Et ça paraît plutôt parti pour durer encore très
longtemps.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 19 janvier 2015
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