Il s'agit de la notion
« d'être humain ». En théorie elle est omniprésente.
Dans les faits, le plus fréquemment, absolument pas. Nous voyons des
groupes qui se reconnaissent une qualité supérieure aux autres.
Ainsi, par exemple, il est très fréquent que des hommes se
considèrent « naturellement » supérieurs aux femmes.
Alors qu'ils sont juste différents d'elles. Bien rares sont les
hommes aujourd'hui, y compris en France et à Paris, qui considèrent
les femmes effectivement comme des êtres humains au même titre
qu'eux.
Les qualités des hommes
et des femmes sont différentes. Ainsi, les hommes sont souvent et
pas toujours, plus forts physiquement que les femmes. En revanche,
les femmes sont souvent plus résistantes que les hommes. Le style
d'humour, d'écriture, de réalisation de films d'une femme diffère
du style masculin dans des activités créatives similaires. L'homme
est souvent plus violent que la femme. La quantité d'accidents
graves de voitures faits par des hommes est beaucoup plus importante
que celle causée par les femmes. Même chose, même large différence
de pourcentages, s'agissant des crimes de sang et du nombre des
emprisonnés.
Les riches et les
pauvres, les cultivés et les incultes, les alphabétisés et les
analphabètes... Autant de clivages où vient se glisser en douce le
mépris de son prochain.
J'ai longtemps travaillé
comme balayeur. Le jour où je devais quitter cet emploi, un brave
homme qui me saluait aimablement chaque fois qu'il me voyait, m'a
honnêtement avoué que, me voyant balayer, il était persuadé que
j'étais un débile bénéficiant d'un emploi réservé.
Quand on vous observe, on
vous classe. Et on classe plus facilement « en bas » que
« en haut ».
« Aimer son
prochain », principe primordial et fondateur. Souvent invoqué,
mais combien de personnes l'appliquent effectivement et sans
discussion ? Leur manière de penser est : « j'aime mon
prochain, mais... » Il est en théorie mon prochain, mais en
fait, il n'est pas, n'est plus, n'a jamais été à mes yeux mon
prochain. C'est ainsi qu'énormement de gens fonctionnent.
La société française,
comme les autres sociétés, est de facto morcelée en castes qui
s'opposent. Les jeunes méprisent les vieux. Les anciens, autrement
dit : « les vieux », méprisent les jeunes. Les diplômés
méprisent les « incultes », c'est-à-dire, les non
diplômés... etc.
Nulle part ou presque est
envisagée la stricte et simple égalité, qui n'exclue pas la
variété, les différences. Il faut soi-disant absolument être
supérieur ou inférieur, jamais égal et différent. Telle est la
règle presque toujours suivie.
Qu'on ne s'étonne pas
ensuite si rien ne fonctionne vraiment bien dans notre monde divisé.
Tant qu'on ne respecte pas son prochain on ne peut le comprendre, ni
bien sûr l'aimer.
Dans un poème russe on
voit un chevalier qui court pour rattraper un homme qui marche d'un
pas pesant. Il a beau courir, il n'arrive pas à le rattraper. A la
fin, il apostrophe l'homme : « Qui es-tu ? » « Je
suis le peuple », réponds l'homme qui marche et qu'il n'arrive
pas à rattraper en courant.
Telle est la réalité.
La puissance de la masse, du « peuple », est
inimaginable. A nous de savoir la respecter. Ça ne peut que nous
profiter. Il vaut toujours mieux voir la réalité que des fantasmes
plaqués sur elle. Le plus haut degré de la philosophie, a dit
Angelo Fortunato Formiiggini, c'est le rire. J'ajoute que le plus
haut niveau d'organisation humaine et réelle, c'est la fête.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 16 janvier 2015
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