Il arrive que les pires
erreurs prennent l'apparence des évidences les plus justes et
éclatantes. Il en est ainsi du mirage de « l'efficacité »
consistant à se dire : « pour être efficace, il faut être
nombreux, forts et organisés ». C'est quelquefois l'inverse
qui est exactement obtenu.
Quelques exemples de ce
genre de catastrophes dans divers domaines illustrent cette erreur
fondamentale.
Ainsi il en est de la
catastrophe européenne. On réunit vingt-huit nations dans une nasse
baptisée « Europe ». Soi-disant, elles vont ainsi former
ensemble un super-état. Le résultat est un effondrement organisé,
un suicide collectif, une destruction de richesses humaines et
matérielles phénoménales. Qui promet de s'accentuer dramatiquement
avec les traités TAFTA et TISA sommets de la barbarie organisée en
cours de négociation. Les potentats européens politiques ou
financiers profitant de la démolition européenne en injectant dans
les veines des vingt-huit pays concernés le venin mortel du
libéralisme sans frein. L'argent devenant le seul but et moteur de
la société au détriment de la culture, de l'amour, de l'être
humain et de la prospérité réelle. Domine à présent le profit
aveugle, la recherche de l'accumulation effrénée et insatiable par
une minorité de l'argent qui soi-disant permet tout. Alors que,
comme tout ce que les humains font, imaginent, inventent, l'argent ne
permet pas tout.
Quelle que soit la
fortune dont vous disposez, essayez de déplacer Noël en avril et
Pâques en décembre. Vous n'y parviendrez pas. Si riche que vous
soyez, votre argent ne vous permettra pas d'y arriver.
Mais le mythe de
l'argent-roi est là. Au Moloch du profit tout doit être sacrifié,
y compris tout ce qui fait de la Civilisation les bienfaits. La haine
de l'humain a pris le pouvoir et détruit tout.
La prétention à
l'efficacité fruit du nombre, de la force et de l'organisation
montre également son caractère erroné et lamentable dans un
domaine essentiel : celui des hôpitaux. Des crétins criminels très
organisés et spéculant dans l'immobilier se sont spécialisés dans
la liquidation des hôpitaux et maternités de proximité. Pour ces
rapaces l'idéal consiste à créer des hôpitaux géants et des
usines à bébés en lieu et place d'hôpitaux plus nombreux et
petits et de maternités de tailles plus modestes.
Les assassins en blouse
blanche, costard cravate ou jupe tailleur qui promeuvent ce genre de
« solutions » dans de nombreux pays vont aujourd'hui à
l'encontre de travaux scientifiques qui établissent de façon
irréfutable que dans un immense hôpital la vie des patients est
plus menacée que dans un hôpital de taille plus réduite.
Eut égard aux juteux
profits immobiliers permis par la liquidation de nombreux
établissements hospitaliers situés en ville, les responsables de
cette politique calamiteuse ne sont pas prêts de renoncer à leur
nuisance. Ils savent très bien ce qu'ils font en agissant ainsi. Ils
tuent. Ils tuent des malades, des accidentés, des vieillards, des
blessés de guerre, des femmes enceintes, des nouveaux-nés, des
enfants... Ça ne les dérange nullement. Ces criminels aiment plus
l'argent que la vie de leur prochain. Quant à l'amour de leur pays,
de leur ville, leur village, leur Civilisation, leur quartier, leur
province, leur vallée, ils y sont étrangers. L'amour de tout ce qui
est vrai et juste n'existe plus pour eux. Seul leur importe
l'attachement passionnel à leur compte en banque personnel. Quant à
l'amour d'une femme, ils le remplacent par la fréquentation des
poules, jeunes, belles et rémunérées.
Dans un domaine
officiellement moins important que le devenir des vingt-huit
moribonds européens ou des hôpitaux et maternités, le mythe de
« l'efficacité » fait également obstacle et désordre.
Il s'agit du domaine de la fête et du Carnaval.
La prospérité de la
fête et du Carnaval repose sur une organisation multiple et à
échelle humain : la société festive et carnavalesque indépendante
comprend un petit nombre de membres, moins de vingt. Là où le
Carnaval prospérait jadis, à Paris, les sociétés en question,
souvent baptisées « goguettes » comprenaient dix-huit
membres. A Dunkerque et dans ses alentours, leur taille se limite le
plus souvent à douze membres. Du temps où des centaines de
goguettes existaient à Paris, le Carnaval était immense. A
Dunkerque et dans les villes alentours le Carnaval fait descendre
toute la population costumée et chantante dans la rue. Jadis,
partout en France existaient des petites sociétés et le Carnaval
prospérait. A partir du moment où on a pu et voulu faire plus
grand, efficace, organisé, on a tué la fête populaire.
Une joyeuse Dunkerquoise
rencontrée à Paris me disait tout dernièrement : « Quand
vient l'hiver, chez nous, à Dunkerque, on est heureux, on a le
sourire, car c'est le Carnaval. Tandis qu'à Lille, ils sont tout
tristes, parce que c'est l'hiver et le temps est mauvais ! »
Aujourd'hui, il faut
faire renaître les goguettes, à Paris et ailleurs. C'est un
mouvement des plus difficiles à démarrer, car le mythe de
« l'efficacité » aveugle le plus grand nombre. Qui croit
que pour que la fête revienne à grande échelle il faut de grandes
organisations riches et centralisées.
Renoncer à la vie
vivante au profit du mirage de « l'efficacité » et du
mythe de l'argent-roi a un coût. Il amène à renoncer à l'amour et
la tendresse. La vie de l'homme est un tout. Quand on en démolit un
morceau, le reste perd l'équilibre et s'effondre.
Par quoi remplace-t-on
l'amour et la tendresse ? Par la même prétention à la recherche de
la maudite « efficacité ». On peut, on doit
« profiter », mais qu'est-ce que ça amène au juste ?
Ça amène un des
phénomènes les plus ignobles et infects qui soit : « l'auto-viol ».
Quand il est possible techniquement de « faire l'amour »
et qu'on n'en a en fait pas envie, on passe à l'action. C'est le
moment de mettre le truc dans le machin, de pratiquer le sexe
théâtralisé où chacun remplit le rôle qui lui est reparti. Sans
éprouver un désir authentique et véritable.
On se viole soi-même. C'est pourquoi il
s'agit d'un « auto-viol ».
On fait « comme tout le monde » : on baise sans désir véritable. Et « tout le monde » fait comme vous : tout le monde baise. Et ruine la relation entre les parties concernées.
Les organes utilisés
ainsi abusivement protestent, se rebiffent. Souvent, à la longue, il
n'y a plus d'érection. On dit que « c'est l'âge ». Ou,
au contraire, l'éjaculation arrive trop vite. Et, avec ou sans elle,
le plaisir est absent. Un sondage révélateur récent indiquait que
nombreuse, très nombreuse étaient les femmes qui préféraient un
bon repas à une séance de baise.
On ne doit s'aviser de
« faire l'amour » que quand un désir véritable et
partagé existe. Pas parce que simplement c'est techniquement
possible. Et que des générations de crétins ont pratiqué la chose
dès que c'était techniquement possible. Alors qu'un désir
authentique et véritable n'était pas éprouvé par les parties
concernées.
Un autre phénomène
dévastateur de l'amour et la tendresse est la sexualisation abusive
de l'être humain nu. Soi-disant, être nu, est « sexuel ».
C'est faux.
Une conséquence
dramatique du désordre de la société humaine pourrie par le mirage
de « l'efficacité » et le mythe de l'argent-roi est
d'avoir interdit la tendresse la plus basique et élémentaire :
celle qui consiste à dormir ensemble.
Si je dors avec un homme,
c'est homosexuel. Si je dors avec une femme, c'est hétérosexuel. Si
je dors avec un couple, c'est bisexuel. Si je dors avec deux femmes,
c'est une orgie... et ainsi de suite, il n'est pas possible sans
baiser d'envisager la plus simple et élémentaire tendresse de base
consistant tout simplement à dormir avec quelqu'un. Il faut
soi-disant que ce soit sexuel. Et pourquoi donc ?
On n'a le choix
uniquement entre une relation de baise ou la solitude. La tendresse
avec le cul. Ou pas de tendresse. Si vous voulez quand-même malgré
tout de la tendresse, prenez un chien, adoptez un chat... C'est
triste et ridicule, sauf pour les chiens et les chats, qui en
profitent bien. L'amour est perverti, la nudité interdite, la
solitude et la détresse affective organisée. Si vous avez mal à
l'âme, prenez des tranquillisants ou allez consulter un psy. Mais,
si on a faim, il ne s'agit pas de prendre des médicaments, mais de
manger. Mais, manger est interdit. Il faut « l'amour »
avec le cul ou rien. Et, en général, bien souvent, c'est plutôt
rien. Nous vivons entourés de gens affamés de tendresse et d'amour,
comme nous. Et la plupart du temps impossible d'aller vers eux. Ou de
les laisser aller vers nous. Au nom de « l'amour » on
assassine l'amour en systématisant abusivement le cul.
« Oui, mais, me
diront certains, si tu vas nu dormir avec une jolie femme nue, tu vas
bander. »
« Oui, admettons
que ça arrive, répondrais-je, eh bien, ça n'a aucune importance
essentielle. Diverses raisons, comme le simple plaisir font bander. »
« Si tu bandes,
c'est que tu as envie de baiser. »
« C'est faux. »
« Mais, si tu
bandes et a envie de baiser ? »
« Aucun problème,
si l'autre en a aussi envie, alors on fait l'amour. »
« Et si l'autre
n'en a pas envie ? »
« Alors, dans ce
cas, on ne fait rien. »
« Et si l'autre en
a envie et pas toi ? »
« Alors, on ne fait
rien. »
« Et si l'autre
alors se fâche ? »
« Eh bien, qu'il se
fâche ! »
« Et si, fâché,
il ne veut plus te voir ? »
« Eh bien, qu'il
aille au diable. Je ne suis pas une machine sexuelle à son service
! »
« L'efficacité »
que soit pour l'Europe, les hôpitaux et maternités, la fête et le
Carnaval, ou au lit avec une charmante créature, ça n'existe pas.
Seul compte
l'authenticité.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 5 novembre 2014
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