vendredi 3 octobre 2014

286 « Naked party » ou essai sur les trois états de l'homme

Il existe trois états de l'homme : déshabillé, nu et nu refusant les vêtements.

A l'état naturel, l'homme ne porte pas de vêtements. L'habit le dénature. On prétend qu'il s'habille exclusivement par besoin de se protéger. C'est faux, car s'il est vrai que ses vêtements lui sont utiles pour se protéger de la pluie ou du froid, par exemple, il continue à en porter quand il n'en a aucun besoin. Pire, il s'habille quand ces habits au lieu de le protéger lui nuisent. Par exemple, il porte des habits qui le font suer, alors qu'il serait infiniment mieux nu, s'il fait très chaud.

Pour justifier ces habits superflus et nuisibles on invoque les convenances et « la pudeur ». Qu'est-ce que ici « la pudeur » ? C'est un mot en six lettres qui sert à justifier bien des choses, y compris absurde.

Je me souviens un jour, il y a une trentaine d'années, avoir été ausculté par une doctoresse flanquée de plusieurs assistantes, toutes jeunes et « appétissantes ». La doctoresse voulait voir et toucher mon service trois-pièces. Pour ce faire, on me pria d'ôter culotte et pantalon. J'obtempérais, puis déboutonnais ma chemise, seul vêtement qui me restait, quand on me pria de la conserver. Ce fut dans cette tenue parfaitement ridicule, vêtu de ma seule chemise ouverte, que je fus sur la table d'auscultation. Mais, pour ces dames, l'essentiel avait été évité : la complète nudité !

La doctoresse trouva mon zizi bizarre. Il faut dire qu'ayant une forte envie de pisser, il était, ce qui arrive en pareil cas, tout ratatiné. La jolie femme en question, avec ses dix années d'études, n'avait pas visiblement une connaissance approfondie des métamorphoses de l'appareil génital masculin.

La seule métamorphose dont on parle étant le passage de l'état flaccide à l'érection. La prohibition de la nudité viendrait de la prohibition de la visibilité de l'érection. J'avance cette hypothèse.

Une amie qui n'avait jamais mis les pieds dans un camp naturiste fut très étonnée d'apprendre qu'en ces lieux était interdit de bander en public.

Cette interdiction ajoutée à d'autres fait que les très jeunes hommes arrêtent souvent le naturisme, pour le reprendre plus tard, mais pas forcément. Motif : quand ils voient une créature appétissante, ils bandent très facilement. Et il faut se cacher, avoir honte de bander en public. On a le droit de se moucher, éternuer, mais pas bander en public... et pourquoi donc ?

Question hérétique, si on la pose, on se retrouve vite soupçonné de vouloir pratiquer l'exhibitionnisme, voire carrément baiser en public. Mais, la morale règne et la loi la défend. La société, elle, se porte bien avec ses dizaines de milliers de viols, ses agressions sexuelles innombrables, y compris sur des enfants et des vieilles personnes, ses milliers de suicides pour raisons « sentimentales », sa prostitution et sa pornographie florissantes et ses dizaines de millions d'individus de tous âges pleurant et hurlant à la mort de solitude. Bon, passons. On vous dira que sans les règles et lois « établies » ce serait bien pire.... N'ouvrons pas le débat.

Donc, existent trois états de l'homme. « Déshabillé » signifie que l'homme est nu et mal à l'aise. Il serait mieux habillé. Soit il veut se montrer, soit se cacher. Mais il ne se sent pas simplement lui-même, à l'état naturel. Pour voir des gens « déshabillés » et pas « nus », regardez les photos dites « de nus ». Les attitudes ne sont pas naturelles. Les modèles « prennent la pose ». Ils sont crispés, pas détendus. Si c'est porno, ils s'efforcent de montrer leur côté « sexuel ». Mais si, au lieu de regarder leur zizi ou leur zezette, vous étudiez leur physionomie, leur regard, vous verrez bien qu'ils ne sont pas à l'aise. Ou, au mieux, font semblant de l'être en arborant un joli sourire commercial.

Poser pour du porno, ça peut aussi être vécu comme un boulot. La fille qui se fait pénétrer par tous les trous, fini souvent à la fin de la séance photos par prendre un sourire détendu. Pourquoi ? Parce qu'elle se dit que la séance est finie. Elle va pouvoir se doucher, s'habiller, toucher son chèque et aller déjeuner. Quand on a compris ça, les photos dites « pornographiques » et destinées à vous exciter, vous excitent beaucoup moins, voire pas du tout.

Les hommes et les femmes qui font des cabrioles sur les sites porno du net sont la plupart du temps parfaitement frigides. La mécanique marche, mais sentiments et sensations voluptueuses ne suivent pas. Observez bien leurs visages, leur expression, quand ils sont « en plein boulot »...

Une actrice porno dont j'ai lu l'interview disait qu'en cours de séance de tournage elle était tellement préoccupée de réussir à tenir les poses les plus acrobatiques possibles pour assurer le meilleur angle de prise de vue à la caméra, qu'elle n'avait pas le temps de se préoccuper de ses sensations.

Les acteurs pornos se prennent tellement peu au sérieux, que ces derniers temps il arrive que les caméras restent volontairement à tourner à la fin de leurs prestations pour enregistrer les échanges avec les preneurs d'images, commentaires et rigolades générales. Je l'ai vu plusieurs fois sur des vidéos pornos diffusées sur le net depuis les États-Unis.

Au début des années 1970, un jeune homme me disait être très déçu que les photos pornographiques montraient souvent des prostituées... ce qui le faisait visiblement beaucoup moins rêver que si ça avait été des filles « honnêtes ».

Sur les plages naturistes, qui sont des sortes de ghettos ou réserves indiennes où on est autorisé à ôter son slip en public, on distingue bien les personnes déshabillées et les autres, qui elles sont nues.

Nues... c'est-à-dire qu'elles se sentent parfaitement à l'aise à l'état naturel. C'est le deuxième état de l'homme. En fait c'est ainsi qu'il est quand il échappe au poids de la dénaturation vestimentaire.

On ne devrait pas du reste préciser « nu ». On devrait, en toute logique, ne rien préciser. Et préciser seulement quand l'homme porte des vêtements qu'il est habillé.

Enfin, existe un troisième état de l'homme : nu et refusant les vêtements. Car il a compris que ceux-ci le désorganisent moralement, le dénaturent, l'abiment, l'abrutissent, l'abêtissent, l'affaiblissent, l'égarent, égarent les autres, le rendent malade, l'hypersexualisent, l'enlaidissent... Mais si chez soi seul c'est facile de refuser de s'habiller, en collectivité ça n'est pas la même chose.

Vous vous voyez proposer à vos amis une « naked party » ? On va tous se mettre à poil et faire comme si de rien n'était et vaquer à nos occupations habituelles ? Vous passerez pour un fou, un illuminé, un provocateur, un dragueur très maladroit. Mais il paraît que ça marche aux États-Unis.

Dans notre société française et parisienne « civilisée » qui sait si bien encourager la guerre et décourager l'amour, la nudité partagée, collective, est forcément « sexuelle », si elle s'exerce ailleurs que dans un ghetto naturiste. Ailleurs, si on se mets nu à plusieurs, c'est forcément pour baiser.

Il n'y a pas pour l'instant d'issue. Tout est soigneusement verrouillé.

La situation est bloquée. Comme elle est bloquée pour l'amour, la caresse, les câlins, les bisous, les léchages affectueux à la façon des chats qui s'entre-nettoient affectueusement. En revanche, elle n'est pas du tout bloquée pour décider de tenter de « réussir » une « belle » guerre...

Basile, philosophe naïf, Paris le 3 octobre 2014

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