dimanche 3 février 2013

85 Un nouvel esclavage : le bénévolat « forcé »


A Paris, de nos jours, il est courant d'entendre cette plainte : « de moins en moins de gens veulent faire du bénévolat ! » Et s'interroger : « pourquoi cette désaffection ? »

Une raison qui n'est pas invoquée, est la perversion du bénévolat, très courante aujourd'hui. On définit un but pour un regroupement associatif quelconque. Puis, avisant de préférence les adhérents les plus influençables, on va chercher à leur imposer diverses taches au détriment de leur vie personnelle, voire professionnelle.

« Comment ? Tu n'acceptes pas de faire ça ? Mais tu ne veut pas que notre groupe réussisse ce pourquoi tu y as adhéré ? » fera-t-on remarquer à l'adhérent rétif. Il a adhéré pour son plaisir. Voilà qu'on le somme de renoncer à d'autres activités étrangères auxquelles il tient. Cela au nom du « but » à atteindre auquel il a souscrit.

Et là on glisse du bénévolat, où on choisi librement une activité non rétribuée, au bénévolat « forcé » : le travail non payé. Celui-ci a un nom : l'esclavage.

Résultat de cette pratique extrêmement répandue : dès qu'on propose à des gens une activité quelconque et bénévole, ils ont tendance à prendre la fuite. Certes, la cause est belle et généreuse, mais je n'ai pas le temps. Voilà ce qu'on s'entendra très souvent répondre dans un monde empoisonné par la vulgarisation du bénévolat perverti.

Je le vois même dans un domaine particulièrement loin de la contrainte : la fête. Car dans ce domaine aussi on voit des comportements dirigistes et esclavagistes prospérer : « pour la réussite de la fête, c'est toi qui te lèveras tôt dimanche pour chercher les bières pour le bar de la fête ! »

Un responsable de société carnavalesque et philanthropique de Dunkerque disait il y a quelques années à mon amie Alexandra et moi : « un président de société de Carnaval, c'est comme un chef d'entreprise ! » Résultat, le lendemain de la fête, jour de repos pour lui, on le voyait retourner sur le site festif balayer, ramasser les canettes et emporter les poubelles.

Pour moi, le bénévolat doit rester le bénévolat. Le travail gratuit, c'est non !

Et pour ce qui est d'organiser une fête, cette activité doit rester agréable et festive. Sinon, à vouloir forcer les gens, on les fait fuir. Dans le pire des cas, habitués à la discipline de l'école et du travail, les bénévoles commencent par se soumettre. Et quelques temps après, on les cherchent. Ils ne sont plus là.

Dans une association festive une rivalité s'était manifesté entre deux groupes. Le groupe A insistait pour une lutte sans merci contre le groupe B, alors que je lui faisais remarquer qu'il y avait une solution beaucoup plus simple : s'en aller créer une autre association festive et laisser le groupe B seul. Rien n'y fit : la lutte déboucha sur la victoire du groupe A. Mais elle ne fut pas festive et ressemblait plus au pugilat interne à une organisation politique. Résultat, les A victorieux et bien fatigués s'éclipsèrent par la suite. Eux également avaient, dans ces circonstances particulières, oublié ce qu'était le bénévolat au service d'une agréable cause festive.

Quand on devient bénévole, avant d'être au service d'une cause si belle et enthousiasmante soit-elle, il ne faut jamais oublier que nous sommes d'abord et avant toutes choses au service de nous-mêmes. Se faire plaisir à soi est aussi notre devoir au même titre que faire plaisir aux autres.

Basile, philosophe naïf, Paris le 3 février 2013

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