samedi 30 juillet 2016

605 L'amour à la Romaine

Manger peut être un plaisir. On m'a un jour raconté que certains Romains de l'Antiquité avaient poussé cette recherche plus loin que tout ce que nous connaissons aujourd'hui comme plaisir culinaire. Ils buvaient un peu de vinaigre pour s'ouvrir l'appétit. Mangeaient. Puis se faisaient vomir. Reprenaient du vinaigre et recommençaient. Trouverions-nous cette pratique séduisante aujourd'hui ? Je crois bien que non. Pourtant, c'est exactement celle qui se trouve aujourd'hui très largement promue et glorifiée s'agissant de l'activité dite « sexuelle ».

Si on n'a pas faim, s'ouvrir artificiellement l'appétit, par exemple avec de la pornographie. Trouver un ou plusieurs partenaire mâles ou femelles. Les consommer sans liens avec la fonction relationnelle. Rejeter le ou les partenaires : on dira « ne pas s'attacher », ce qui revient au même. À nouveau s'ouvrir artificiellement l'appétit. Consommer un ou plusieurs nouveaux partenaires : on dira « avoir du succès », « faire de nouvelles conquêtes ». Puis recommencer l'opération.

Ce qui est assez étonnant, ce sont les étapes successives de l'envahissement progressif de la société par la pornographie. La pornographie va à contrario du puritanisme machiste obsédé par la condamnation virulente de la sexualité. Et par exemple montre très fréquemment les femmes et jeunes filles prenant des postures cuisses écartées pour montrer leur entre-cuisses. Ces derniers mois, ce genre de postures a gagné la publicité pour la lingerie féminine. Bien sûr, le sexe reste ici caché par l'étoffe de la culotte. Mais la posture « suggestive » est exactement la même que dans la pornographie. Après la lingerie, la mode de ces postures à commencé à s'étendre au grand public.

J'ai observé tout à l'heure dans un square parisien deux jeunes filles qui prenaient « innocemment » les postures correspondantes à celles ci-dessus mentionnées. Elles portaient toutes les deux des mini-shorts. L'une des deux était nettement plus audacieuse que l'autre et finissait par entraîner l'autre. Et son short la moulait judicieusement en telle sorte qu'il soulignait la raie de ses fesses et la fente de son sexe. Ces deux jeunes filles ont passé une bonne heure et demi à converser ensemble tout en prenant ces postures tout à fait par hasard bien entendu. Et absolument indépendamment du fait qu'elles se savaient regardées par au moins deux personnes de sexe opposé.

S'agissait-il d'avances sexuelles délibérées ou d'un simple jeu de séduction ? Le savaient-elles également ? Je n'en sais rien, étant donné que ni moi, ni l'autre homme qui était dans les parages de leur banc, et les apercevait, n'a cherché à en savoir plus.

Certaines jeunes filles d'aujourd'hui paraissent pratiquer la provocation sexuelle directe, imitant en cela des comportements masculins classiques. Ce n'est pas nécessairement la meilleure voie à choisir pour améliorer la qualité des rapports entre hommes et femmes.

J'en parlais à un ami retraité qui a connu depuis cinquante ans l'évolution de la société française dans le domaine sexuel. Il n'y relevait que le positif de la libération des mœurs du poids étouffant des traditions. Comme je lui faisais remarquer que de nos jours quantité de gens sont moralement paumés, il me répliqua que tel était et est le cas à toutes les époques.

Le discours sommaire et consumériste de la pornographie tend à servir à présent d'éducation sexuelle à une très large part de la population. Qui voit dans le sexe un objet de consommation délectable parmi d'autres. Et à consommer dans le même esprit où certains Romains stimulaient leur appétit, mangeaient, vomissaient et recommençaient. Il m'apparaît très difficile de parvenir à exposer un point de vue critique à nombre d'hommes. Il leur semble que la société est passée d'un état monacal à celui d'un immense bordel gratuit où tout ou presque serait possible et acceptable.

Basile, philosophe naïf, Paris le 30 juillet 2016

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