dimanche 22 septembre 2013

152 A propos de la « fracture tactile »

Quand arrive le sevrage tactile, le petit singe humain subit un traumatisme très grave et profond. Au point qu'on peut parler d'un avant et un après ce sevrage. C'est comme une fracture. La fracture tactile est une cause majeure, sinon la cause majeure, des troubles sociétaux chez les humains.

Au moment de la fracture et suite immédiate de celle-ci, le petit singe humain ressent une intense souffrance, une sensation d'abandon, d'incompréhension complète, ou presque, de ce qui lui arrive. La blessure ouverte ne se referme jamais. Et se cicatrise très mal. Prête à se rouvrir.

Le sentiment de mort vient de ce moment-là : négation de soi, solitude, absence d'avenir. La violence du choc génère à plus ou moins long terme des envies de violences contre les autres ou contre soi : suicide, automutilation, agressions, crimes passionnels, incompréhension de la vie.

Son malaise, le petit singe humain est dans l'incapacité de l'exprimer clairement. Car autour de lui, ses modèles adultes sont déjà et bien avant lui castrés tactilement. S'il veut devenir « grand », plaire aux « grandes personnes », il doit se couler dans le moule de tortures de la vie non tactile.

Privé de câlins, le petit singe humain va idéaliser l'« amour », le « mariage », le « sexe ». Croyant trouver dans ces fétiches la réponse positive à ses angoisses causées par la castration tactile. Il en vient à refuser les caresses pour « ne plus être un bébé ». Un peu comme l'enfant en colère qui refuse de manger son dessert pour punir ses parents. Et en fait se punit lui-même.

Le singe humain cherchant le « sésame ouvre-toi » d'une vie supportable pourra se réfugier dans l'accumulation de l'argent. L'argent, ce produit magique avec lequel les grandes personnes donnent l'illusion de pouvoir rigoureusement tout se procurer y compris le « bonheur ». Il pourra aussi se réfugier dans des illusions comme suivre « la mode ». En espérant que par une mystérieuse magie, cette agitation vide, d'origine et à but commercial, permettra d'accéder au bonheur rêvé.

La scission intérieure causée par la castration tactile a conduit à l'invention de la séparation artificielle entre la chair et l'esprit, le corps et l'âme. Alors que l'être humain vivant est un, uni.

La sexualité a été hypertrophiée. On a été jusqu'à inventer des théories qui font du « sexe », c'est-à-dire de la copulation, la base de tout le comportement humain. Alors qu'à sa base on trouve en fait la recherche de câlins, sans finalité sexuelle, c'est-à-dire d'accouplements. Le besoin d'accouplements existant aussi. Mais lui étant totalement subordonné.

Le souvenir vague de l'avant castration tactile a amené la naissance de mythes tels que celui de « l'âge d'or », de « la société idéale », du « paradis sur terre » ou « au ciel ». Ce qui ne signifie pas que l'on ne peut pas améliorer la société. Ni que le paradis existe ou non.

La tactilité subit un pourrissement causé par l’hyper-sexualisation. Par exemple quand une jeune fille rêve de câlins. Et ne rencontre que des jeunes gens qui veulent d'emblée se masturber dans sa bouche, son vagin ou son anus. Elle en ressentira un malaise et un désir de refuser bien compréhensible. Et si un jeune homme ressent l'envie d'échanger des caresses avec un autre jeune homme, il pourra s'interroger s'il est homosexuel. Et s'il est homophobe il rejettera ce désir avec violence. En cas de décompression tactile, de la privation brusque de caresses, causée par exemple par un divorce, un deuil, la souffrance sera intense. Ce sera une souffrance bavarde. On n'arrêtera pas de se plaindre. Bouleversé, on commettra des oublis. On recherchera la compagnie d'animaux familiers. Et loin de chercher des câlins, la souffrance à eux associée, fera même qu'on les refusera.

Basile, philosophe naïf, Paris le 22 septembre 2013

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