Au début des années
1960 mon père travaillait à Paris, au Centre national de la
recherche scientifique. Il avait des collègues féminines. Une
d'entre elles avait mauvais genre, me disait ma mère. Elle fumait !
A l'époque c'était mal vu et considéré comme vulgaire. À
présent, des millions de femmes fument sans se cacher et rattrappent
ainsi les hommes dans le domaine des maladies mortelles causées par
le tabac. Elles ont voulut marquer leur émancipation en fumant. Le
moyen utilisé était mauvais.
Une
jeune femme parisienne amie me confiait en 1983 qu'elle désirait un
homme. Mais ne pouvait en aucun cas le lui dire ouvertement ou
directement, car ça ferait pute. Dix années auparavant, en visite
chez un ami de mon père, ses deux filles adolescente ou jeune fille
nous montraient les photos souvenirs de leurs vacances à la mer.
Elles nos montraient toutes leurs dizaines de photos exceptées
celles où elles figuraient en maillot de bain. Elles les ôtaient
soigneusement au fur et à mesure de la pile de plusieurs centimètres
de photos qu'elles nous montraient. Et c'était à l'époque
absolument normal. Nous montrer leurs photos en maillot de bain
aurait été vulgaire et provocateur sexuellement. Puis est venu
soixante-huit et d'autres événements et le monde a bien changé.
Aujourd'hui
la méthode pour obtenir le meilleur orgasme féminin fait facilement
le titre de magazines féminins. Et les sites de rencontres sexuelles
sur Internet abondent et vantent y compris les rencontres adultères.
Mais derrière cette « libération » apparente, qu'en
est-il exactement ?
Comme
pour le tabac, les femmes ont suivi le modèle masculin en voulant
s'émanciper. Et le résultat est que loin de voir l'amour fleurir,
on n'a jamais eu autant de personnes seules des deux sexes. Nous
vivons à présent l'époque de la femme tabagique et
post-soixante-huitarde qui s'est par deux fois trompée de moyen
d'émancipation. Elle a imité l'homme dans sa bêtise. En fumant et
en pratiquant le sexe comme un produit de consommation ou
d'affirmation ou une sorte de sport. Or l'amour c'est autre chose
qu'un sport ou un produit de consommation. Il serait grand temps de
remettre à plat le problème. Sans refuser la sexualité il faudrait
chercher dans les câlins le modèle d'amour entre adultes. Je sais,
on va me rire au nez, mais les câlins sont aujourd'hui les grands
sacrifiés des amours adultes. On va « droit au but » et
d'emblée ou à la longue on s'emmerde. Ou alors on prétend faire
des câlins les « préliminaires » des affaires
« sérieuses ». Un travail de réflexion et
d'expérimentation s'impose entre adultes pour trouver un amour
authentique émancipé des vieilles conventions ou du refus des
vieilles conventions.
Renoncer
aux erreurs est le prix à payer pour avancer vers une vraie vie
amoureuse qui ne s'oppose pas à la sexualité mais n'y est pas non
plus subordonnée. Il est triste et pitoyable de voir hommes ou
femmes cherchant des trucs pour arriver à la « conclusion »,
c'est-à-dire au coït. Il n'existe pas de conclusion en amour, pas
plus qu'ailleurs. Le chemin de la vie est vaste et long, les
« trucs » pour « y arriver » n'existent pas.
Le problème qui conduit à la solitude de millions de gens n'est pas
la sexualité mal comprise mais l'absence d'amour entraîné par une
sexualité caricaturale et hypertrophiée.
L'amour
mérite mieux que des « trucs » et des recettes magiques
pour obtenir de l'autre ce dont il n'a pas envie.Il est plus juste de
partir de la réalité et non des fantasmes fruits du conditionnement
et de la culture subie. La poésie peut être un moyen pour parvenir
à mieux nous comprendre et comprendre les autres, chose
indispensable pour avancer. Il faut arrêter de croire au mirage
sexuel de la « sexualité épanouie », qui n'existe que
dans l'imagination et au cinéma. Ce qu'il faut, ce sont des femmes
et des hommes épanouis qui font aussi quelquefois l'amour, mais
surtout d'abord s'aiment et aiment les autres.
Basile
philosophe naïf, Paris le 20 novembre 2018
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