La dépression est un
fléau qui touche des millions de gens chaque année et cause le
suicide de dizaines de milliers de personnes. Le suicide est la
première cause de décès dans la jeunesse. Pour soigner les états
dépressifs et prévenir les suicides qu'ils entraînent existent
deux formes de traitements combinés : la thérapie verbale et
la prise de médicaments.
Avec ces moyens les
thérapeutes soignent, guérissent et sauvent chaque année des
milliers de personnes. Je proposerai ici un troisième type de
traitement : la thérapie manuelle de la dépression.
Ce type de traitement est
issu de mon expérience de la vie et de ma réflexion
philosophique. J'espère contribuer par ce texte à alimenter la
réflexion des spécialistes et partant apporter un soulagement aux
souffrance de personnes dépressives.
Préambule : les
débuts de notre vie
Qu'est-ce que la psyché
humaine ? A la naissance nous sommes à l'état originel. Notre
mentalité est celle de l'animal sans industries ni culture transmise
et élaborée dans le temps. Le nouveau-né humain n'a pas lu un
manuel de puériculture quand il rampe d'instinct vers le sein de sa
mère !
Cet « état de
nature » paraît ne pas durer. Nous allons être l'objet d'une
acculturation plus ou moins complexe. Par exemple : nous allons
être habillés avec des vêtements, lavés avec de l'eau purifiée
par des filtres et réchauffée, et du savon, etc.
Il faut bien comprendre
et se pénétrer du fait que à notre naissance nous sommes
entièrement et uniquement à l'état humain originel, quand
n'existaient aucune industrie, règles établies, traditions,
habitudes culturelles. Par exemple, au moment de déféquer et uriner
le petit humain ressent du plaisir et n'attends pas pour satisfaire
ces besoins naturels. Il fait ce qu'il a à faire n'importe où et
n'importe quand et sans chercher à s'isoler. Alors que plus grands
nous nous retenons, le temps de trouver un coin isolé et tranquille
si nous sommes en pleine nature ou des toilettes si nous sommes dans
un cadre urbanisé. Et absolument toutes nos activités originelles
sont traitées de la même façon au début de notre vie. Elles vont
ensuite être perturbées par la culture inculquée.
Cependant notre
conscience originelle ne s'efface pas. Elle reste présente quelque
part en nous et continue à nous structurer. Ainsi nous n'apprenons
pas la convivialité ou le plaisir du vivre ensemble. Ces besoins
sont dès le départ présents en nous.
Mais ils peuvent être
occultés, contrariés, perturbées par notre culture. Au point que
l'état naturel nous apparaît comme une forme de désordre et la
nature en nous désordonnée par notre culture nous apparaît comme
une forme d'ordre. Ainsi l'état naturel devient « la nudité »
et nous nous sentons à l'aise seulement une fois habillés. C'est un
phénomène courant produit de notre culture.
Cette culture est le
produit de dizaines de milliers d'années et de nombreuses
générations humaines.
La question de
l'ovulation
Un fait historique
négligé joue un rôle majeur dans nos civilisations.
Les humains ont inventé
l'agriculture et l'élevage il y a vingt mille ans. Ils connaissaient
donc la portée de l'acte reproducteur, autrement dit « l'acte
sexuel », le coït.
Mais ils ne comprenaient
absolument rien à l'ovulation. C'est un fait majeur.
Ils avaient des réactions
superstitieuses et effrayées face au sang menstruel. Et ils
croyaient que les mâles seuls jouaient un rôle actif dans la
reproduction. Déposant leur semence dans la terre passive femelle
pour les animaux et féminine pour les femmes.
Cette interprétation
ignorante de la réalité conduira les hommes à se croire supérieurs
aux femmes. Et comme la terre appartient à qui la travaille, à
s'imaginer avoir pour rôle d'être « propriétaires »
des femmes.
L'ignorance à la source
de cette odieuse aberration durera vingt mille ans, jusque vers 1845.
A cette époque, deux médecins français, Félix-Archimède Pouchet
et Charles Négrier, vont décrire pour la première fois le
fonctionnement de l'ovulation. Mais ce grand progrès de la
Civilisation ne va pas faire tomber le produit de vingt mille années
de patriarcat ! Il reste encore énormément à nettoyer !
Les conséquences nocives
de cette croyance stupide de l'homme dans sa supériorité sur la
femme vont être en particulier flagrantes dans le domaine sexuel.
Les hommes vont développer une recherche frénétique, permanente et
obsessionnelle de ce qu'ils croient être l'acte sexuel. Et qui ne
sera dans la très grande majorité des cas qu'une masturbation
réalisée dans un orifice naturel d'un tiers.
Aspect dramatique qui va
nous intéresser ici : la prohibition du toucher assimilé à
une « avance sexuelle ». La croyance dans le caractère
systématiquement pré-coïtal de la caresse entre adultes, surtout
si elle provoque une érection, va créer une bulle d'isolement
autour des individus. Combien d'entre eux ne sont plus touchés ?
Je n'échappe pas à la
règle. Avant de prendre tout dernièrement un cours de danse de
couples je n'ai plus touché ou été touché par une femme durant
cinq années ! Une amie tout à fait séduisante et très
féminine qui vit très loin de Paris m'a dit avoir connu une
expérience identique. Elle n'a pas été touchée par un homme ou
touché un homme durant des années. Elle est sortie de son isolement
tactile grâce à des cours de tango.
Quand un individu est
victime de la dépression, que se passe-t-il ?
Son sentiment d'isolement
tactile est exacerbé. Mais va-t-il pour autant chercher à en
sortir ?
La tactilité,
tendresse, caresses, contacts... zone sinistrée des rapports humains
Face au conditionnement
acquis, nous nous sentons sans forces, désarmés, paralysés,
piégés.
Si la caresse entre
adultes nous tente, instantanément une lampe rouge d'alerte
s'allume : « c'esr sexuel ! Danger :
préliminaires ! » ou, au contraire : « ce sont
des préliminaires, il faut foncer vers la réalisation de l'acte
sexuel ! »
Comme l'acte sexuel est
régi par des règles morales, des interdits et des obligations
divers, tout toucher devient suspect, interdit. L'être humain adulte
se déplace cerné de murs invisibles truffés de sonneries d'alarme.
Les hommes n'osent pas
être tendres entre eux. Pourquoi ? Parce que la tendresse entre
hommes est assimilée à l'homosexualité et au viol possible.
La tendresse entre homme
et femme est assimilée à de la drague. Même simplement regarder
une femme avec admiration est considéré comme de la drague. On ne
peut même pas regarder une femme sans que cela apparaisse suspect.
La condition de la femme
est régie par des règles qui en font une créature soi-disant
inférieure à l'homme et dominée par lui. La peur du viol est
entretenue et omniprésente.
Le drame est que quand
viol il y a, la thérapie tactile est rendue impossible par les
règles établies.
Mais qu'est-ce que la
thérapie tactile ?
Ce qu'est la thérapie
tactile
J'écrivais plus haut que
la conscience originelle continuait à être présente en nous. Elle
fait que nous avons besoin de toucher, caresses, câlins. C'est un
besoin ô combien sinistré.
Imaginons un cas
classique : un homme agressif sexuellement s'introduit dans un
établissement scolaire. Il parvient à s'attaquer à une très jeune
fille, l'entraîne dans un local isolé et la viole. Comment va-t-on
la soigner ?
Avec des mots et des
drogues médicamenteuses. Soigner un viol avec des mots c'est comme
soigner une fracture avec des chansons. A la longue, s'il y a
amélioration, c'est surtout indépendant des mots ou des chansons.
Il y a une blessure, il
faut la soigner, comment ? Tactilement. Ce qui n'interdit ni les
mots ni les drogues médicamenteuses.
Il faut réapprivoiser la
victime du viol au toucher. Celui-ci a été dévoyé sous la forme
du viol. Il faut rétablir la relation pacifique et chaleureuse entre
la victime et le toucher, comment ?
En donnant à vivre le
toucher pacifique et originel.
Le protocole de soins
J'imagine une séance de
thérapie tactile et ses suites.
Au patient, il faut
redonner goût au toucher pacifique. Pour cela il faut extraire le
toucher de l'ultimatum sexuel ambiant qui proclame que tous toucher
chaleureux entre adultes est un préliminaire ou un parent proche de
l'acte sexuel. Donc, pour éviter cette confusion on évitera :
le tête-à-tête soignant-soigné, les zones dites « érogènes »
et la lumière tamisée.
Le toucher tendre se
pratiquera seulement avec l'accord du soigné et s'interrompra en cas
de mal vécu par le soignant ou le soigné, sans explications ou
justifications nécessaires. La séance tactile aura lieu en présence
d'au moins un tiers, proche du soigné. Ce tiers par sa présence va
le rassurer. Il pourra, par exemple, tout le long de la séance lui
tenir la main.
Le toucher pratiqué par
le soignant devra éviter au maximum tout ce que notre culture a
l'habitude d'associer ou assimiler à « la sexualité ».
Ce toucher aura pour but de réapprivoiser ou apprivoiser le soigné
au contact tactile humain. Ce toucher, « toucher pour être
senti par l'autre » et non « toucher pour sentir
l'autre », j'ai mis des années à l'apprendre après l'avoir
incidemment rencontré. Comme le jeu de la vielle à roue il ne
s'explique pas avec des mots mais s'explique par l'exemple. Il
pourrait contribuer à sauver des dizaines de milliers de vies chaque
année.
Basile, philosophe
naïf, Paris les 10 et 15 mars 2018
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