Maltraitance signifie
mal traiter. Curieusement on ne relève comme actes de maltraitance
sexuelle que les viols, agressions physiques ou verbales, gestes
déplacés, qui sont effectivement des mauvais traitements. Mais
pourquoi n'évoque-t-on jamais la maltraitance représentée par la
démission parentale ? Mes parents m'ont enseigné beaucoup de
choses dans beaucoup de domaines. Mais s'agissant de la sexualité
ils ont été aux abonnés absents.
Quand j'ai eu mes
premières érections, j'ai été surpris par ce phénomène étrange,
bizarre, incompréhensible. J'ai pensé que j'étais malade. Malade
d'une maladie honteuse, ce qui fait que je n'en ai parlé à
personne. J'ai durant un certain temps eu honte de bander.
Par la suite, un jour,
j'ai fini par comprendre que ce phénomène avait pour rôle de
permettre la pénétration de l'organe sexuel féminin. On ne m'avait
jamais parlé de l'acte sexuel. Pour moi, le sexe, masculin comme
féminin avait pour unique utilité la miction. Les réunir ainsi
revenait à mettre en contact intime deux organes destinés à
pisser. C'était sale. Durant des années, je suis resté marqué par
cette conviction de la saleté de l'acte.
Mes parents ne pouvaient
pas ne pas savoir qu'un jour j'aurais des érections. Ils
n'ignoraient pas non plus l'existence de l'acte sexuel. Ils ne m’ont
parlé de rien. Ils m'ont caché ce qu'ils savaient. Agissant ainsi
ils ont nui à ma vie sexuelle et ma vie en général. Il s'agit bel
et bien d'actes de maltraitance sexuelle.
Quand j'ai eu vingt-et-un
ans, je me souviens m'être posé la question : « que
faut-il penser de l'acte sexuel ? » et comme réponse
m'être dit : « il faudrait essayer ». Puis je n'y
ai plus pensé. Quand j'ai eu vingt-deux ans, ma mère, ma famille et
notre médecin de famille m'ont manipulé pour me jeter dans les bras
d'une vague copine. Alors que je ne recherchais nullement l'acte
sexuel on s'est chargé de me « déniaiser ».
Résultat de ces
manœuvres, je suis devenu « comme tout le monde ». A la
recherche de ma moitié d'orange, de ma « partenaire sexuelle
attitrée ». Ce qui fait que durant plus de quarante ans j'ai
été parasité par cette recherche insensée. Il n'y a pas lieu de
chercher une partenaire sexuelle attitrée. Ou bien il arrive que
deux individus se rapprochent sexuellement. Ou bien il n'y a pas lieu
de s'inventer une attirance réciproque inexistante pour « faire
comme tout le monde ». Depuis que je me suis débarrassé de
cette pensée parasite qu'on m'avait mise dans le crâne, je me sens
libre et tranquille. Je peux rencontrer toutes les plus jolies filles
du monde sans me préoccuper de sexualité. Si je les trouve très
jolies, je me dis : « elles sont très jolies » et
ma pensée s'arrête là. Je ne commence pas à fantasmer et chercher
à résoudre d'insolubles problèmes de séduction qui ne
correspondent en rien à la réalité. Comme je ne suit pas le
troupeau commun, je dois rendre perplexe certaines personnes autour
de moi.
Que je ne cherche plus à
tous prix l'acte sexuel, soit. Mais alors, me dira-t-on, pourquoi ne
pas chercher la simple tendresse ? Tout simplement parce que la
plupart des humains sont des analphabètes en câlins. Ils sont
« analcâlins ». Ils savent caresser leur chat ou leur
chien, mais pas un être humain. Ça ne vaut même pas la peine
d'essayer quoi que ce soit de tendre avec eux. Ils sont empêtrés
dans leur sexualité malade et confondent aussi l'amour avec la
jalousie. Pour des êtres libres comme moi, leur compagnie trop
proche est insupportable. J'aime les humains, j'adore les femmes...
de loin. De près c'est une histoire souvent glauque. Je laisse cette
histoire à d'autres. Qui dépriment et se sentent seuls. Mais ne
parviennent pas à se remettre en question et abandonner leurs
mirages et contes de fées amoureux. Ils ont peur de la réalité.
Alors la réalité se venge d'eux.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 28 janvier 2018
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