lundi 20 janvier 2014

209 Échelle des importances et malentendus

A un moment-donné, le jeune humain commence à franchir la clôture des adultes qui lui dissimulait bien des choses. Il commence alors à établir son échelle des importances personnelle. Pour cela, il lui est tentant de chercher un guide. 

Soit de suivre l'exemple de certaines personnes de son entourage. Soit de chercher à se déterminer par rapports aux règles établies. Ces deux manières d'agir pouvant n'en faire qu'une. Si on suit l'exemple de personnes proches qui cherchent à se déterminer par rapport aux règles établies.

Un exemple est donné par la "pudeur corporelle". Le jeune humain peut adopter la croyance comme quoi il est essentiel de cacher certaines parties de son épiderme à la vue d'autrui. Il existe pourtant des peuples qui vivent nus. Et nos ancêtres également se sont certainement promenés durant de nombreux millénaires en ne portant aucun vêtements sur eux.

Parfois, j'ai rencontré des personnes qui, étrangement, ignoraient totalement ces préjugés concernant la nudité. Ils baignaient pourtant dans une société qui en est imprégné.

Je me souviens en particulier de deux cas. Vers le début des années 1980, j'étais avec ma mère et une amie en visite chez une dame qui vivait avec son compagnon et ses deux grands enfants. Le plus jeune, une fille d'environ quatorze ans, au moment d'aller se coucher, se baladait allégrement, vêtue juste d'un haut assez court. Le cul parfaitement nu, elle ne paraissait y accorder aucune importance particulière.

L'autre cas similaire concerne une étudiante iranienne de Paris. Elle m'avait invité à assister à un cours de capoeira où elle était élève. Il n'y avait pas de vestiaire. Au moment de se changer pour pratiquer son sport, cette grande jeune fille brune ôte divers vêtements. Exhibe sans problème sa toison pubienne. Et fini de se changer comme si de rien n'était.

Il n'y avait aucune malice, aucun calcul exhibitionniste, à mon avis, dans ces deux exemples apparemment surprenants. En fait, l'échelle des importances de ces deux filles n'accordait aucune importance particulière à la nudité, fut-elle susceptible de laisser voir les organes génitaux.

L'échelle des importances s'applique exactement comme une sorte de loi originale propre à la personne qui l'adopte. Elle ne réalise pas du tout quand celle-ci se heurte, y compris violemment, aux règles établies suivies par d'autres.

Un exemple particulièrement surprenant dont je me souviens est celui d'une amie qui avait établi son échelle des importances divisant en deux sa personne par le milieu. Elle considérait que toutes les caresses au dessus de la ceinture ne la concernaient pas comme ayant des conséquences ou implications importantes. En dessous de la ceinture, c'était autre chose. Le résultat fut surprenant, traumatisant et imprévu pour moi. Ayant eu l'occasion de lui caresser, ô combien, la poitrine, y compris avec la langue et la bouche, je m'avisais un jour de lui caresser les fesses. Ce fut pris comme un véritable viol ! La sincérité parfaite de mon amie, mon ignorance totale à l'époque du fonctionnement de l'échelle des importances, m'amena à être profondément troublé.

Étais-je véritablement le monstre qu'elle m'accusait d'être ? La véhémence de cette amie finissait par me le faire croire. Je doutais de moi. Jusqu'à ce que deux amies proches, dont je connaissais le franc parler, et que j'interrogeais avec angoisse, me rendirent mon estime pour moi. Mais, il m'a fallu encore cinq années pour finir aujourd'hui d'analyser cet incident relationnel.

La volonté de chercher à établir son échelle des importances en conformité avec les idées de son entourage peut avoir de détestables conséquences.

J'ai connu le cas d'un petit garçon de sept ans qui adorait la danse. Ses parents, notamment son père, maître d'armes à la Garde républicaine, voulurent lui assurer sa vocation. Ils se renseignèrent pour le faire entrer à l'école de l'Opéra de Paris. Tout était prêt. Finalement ils renoncèrent, pourquoi ?

Parce que, entre-temps, tous les petits camarades du jeune garçon, apprenant sa vocation de danseur, se mirent à le traiter de "pédé". A leur âge, ils ne savaient probablement pas quel sens avait ce mot. Mais il était insultant pour eux et celui qu'ils maltraitaient ainsi. Choqué, le petit garçon doué et passionné par la danse ne voulu plus entendre parler de celle-ci.

L'échelle des importances esquissée ici dès un très jeune âge a ainsi brisé une belle vocation.

Basile, philosophe naïf, Paris le 20 janvier 2014


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