mercredi 10 juin 2015

390 La sexualité infantile n'existe pas

La sexualité infantile n'existe pas. Existe simplement la curiosité infantile. L'enfant est naturellement curieux. Il peut ainsi à l'occasion s'intéresser, par exemple, aux guitares, aux chevaux, aux timbres-poste, aux zizis... Mais pas plus particulièrement ou extraordinairement aux zizis qu'aux guitares, aux chevaux, aux timbres-poste. Il le fait à sa façon. Mais n'existe pas un domaine particulier de sa vie : la « sexualité », pas plus que n'existe un « guitarisme », un « cavallisme », ou un « philatélisme » infantile.

Les adultes, qui font toute une pendule de leurs histoires et mythes liés aux queues et aux chattes s'évertuent à fabriquer une image fabuleuse des enfants. Qui seraient des sortes de mini-adultes rétrospectivement obsédés du cul comme eux. Or, justement, à la différence des adultes, les enfants ne font pas une pendule avec des histoires ou mythes de zizis et zezettes. Et ne sont pas du tout obsédés du cul comme la plupart des adultes. Ils sont bien plus tranquilles que les adultes qui sont souvent des enfants abimés, pourris mais pas matures.

Voyons trois exemples de cette soi-disant « sexualité infantile » :

Quand j'avais quatre ans au plus, je ne me souviens plus comment, ma sœur de trois ans plus âgée que moi m'a dit vouloir voir mon zizi. Elle me l'a demandé deux ou trois fois. Finalement, obligeamment j'ai accédé à sa demande. Nous sommes allés nous enfermer tous les deux dans la salle de bains. J'ai baissé ma culotte un instant. Elle, de son côté à fait pareil. J'ai entraperçu son sexe sans y attacher un intérêt particulier. Lui ai dit, parlant de mon zizi : « voilà, c'est comme ça », me suis empressé de me rhabiller. Et suis vite sorti de la salle de bains où nous avions préservé la discrétion de notre échange. Quel intérêt avais-je pour le sexe ? Aucun, mon sexe était aussi peu différentiable de mon poignet ou mon oreille. Une partie de moi qui n'avait pas d'usage particulier.

Il y a deux ou trois ans j'entendais une grand mère parler de son petit fils âgé de trois ans.

« Il m'a surpris. Il m'a dit qu'il veut me toucher les seins. Et coucher avec moi pour voir l'impression que ça fait. » S'esclaffait la dame. Qui ajoutait : « Je lui ai dit qu'il n'avait pas à me toucher les seins, que seul grand père avait le droit de toucher les seins de grand mère. Et que grand mère n'avait pas à coucher avec lui. Que plus tard il aurait une petite amie avec laquelle il pourrait coucher. »

Ces réponses de la grand mère, prétendument instructives et pédagogiques, sont d'une incommensurable sottise.

Que vient faire grand père dans cette histoire ? Et puis évoquer la petite amie future du petit garçon est une ânerie. S'il s'agit de la vie de cet enfant dans, disons douze ans, quand il aura quinze ans, autant évoquer la planète Mars. Une époque aussi éloignée ne signifie rien quand on a juste trois ans. Annoncer à ce petit garçon qu'il aura une petite amie et couchera avec est déjà normatif. Les seules réponses justes et des plus simples auraient dut être :

« Tu ne toucheras pas les seins de grand mère parce qu'elle ne trouve pas ça agréable » et « tu ne coucheras pas avec grand mère parce que ce projet ne lui fait pas plaisir ». Réponses archi-simples et facilissimes à comprendre par un petit garçon de trois ans !

Il y a vingt-cinq ans de ça, le comportement d'une fillette âgée de moins de deux ans m'a choqué. Elle s'était assise sur mes genoux. Voilà qu'elle se met très joyeusement à faire des sortes de petits bonds à califourchon sur une de mes jambes. Quand je réalise qu'en fait elle se frotte l'entre-jambes sur ma cuisse et que c'est ça qu'elle apprécie grandement ! Bien que nous étions habillés, j'ai eu le sentiment horrible et étrange d'avoir été violé par cette gamine. Qui prenait ainsi de moi un plaisir sexuel que je n'avais pas décidé de lui donner. Et qu'elle m'avait extorqué contre ma volonté.

J'en ai été choqué au point de m'en ouvrir ensuite au père de l'enfant. Il a rit et m'a répondu : « tu n'as jamais entendu parler de la sexualité enfantine ? »

Aujourd'hui, vingt-cinq ans plus tard, j'analyse cette histoire. Il ne s'agissait pas de « sexualité ». Ce presque bébé avait trouvé un moyen de se faire du bien. N'a pas insisté plus que ça pour continuer. N'a pas recommencé. Est ensuite passé à autre chose. Ne s'est aucunement intéressé à quoi que ce soit qui aurait pu paraître « sexuel » en plus. N'a pas cherché à se déshabiller. Ou me déshabiller. La sexualité n'était pas présente. Sauf dans ma tête, en étant horrifié par la pensée que ce quasi bébé profitait de ma cuisse pour s'y frotter à travers les vêtements ses parties intimes.

Imaginons des adultes à qui ce serait arrivé. Une jeune fille avec enthousiasme se frotte le sexe sur vous. Le plus probable est qu'elle finisse par « passer à la casserole ». Là, il n'y avait rien de tel. Ça n'était pas de la sexualité.

La confusion nait dans notre société de la prétention à l'existence d'une sorte de domaine particulier, réglé par des lois particulières : la sexualité. Auquel s'ajoute la contre-sexualité. Vous n'avez pas envie de baiser ? Oui, mais si vous seriez placé dans d'autres circonstances, vous en auriez forcément envie. Bel exemple de la contre-sexualité : les maillots de bains ; pourquoi utilisons-nous ces caches-zizis ? Parce que soi-disant si nos trésors étaient en vue nous aurions forcément envie de nous en servir ! Prétention ânesque mais admise par la société et plein de gens aussi.

La contre-sexualité amène scissions et rejets. Les très jeunes filles doivent être évitées car elles ne doivent pas être désirées. Les vieilles sont évitées car leur désir n'est pas apprécié. Mais si on s'écoutait, on réaliserait que la plupart du temps on ne désire effectivement personne. Et personne ne nous désire. L'être humain est bien plus tranquille à la base et au fond de lui-même que ce qu'il croit. Pour ne pas ou plus être obsédé du cul il suffit de prendre la peine de s'écouter. Et ne faire l'amour que quand nous en avons vraiment et réciproquement envie, ce qui est plutôt rare. La plupart des fois où nous bandons ça a une autre signification qu'un désir véritable.

Mais, allez l'expliquer à la plupart des gens ! Il y a une quinzaine d'années j'étais en vacances à la plage. J'observais avec ravissement la plastique adorable des jeunes filles de quinze ans. Je n'avais aucune intention de faire ou tenter de faire quoi que ce soit avec ces gamines que j'entendais discuter avec leurs copains et copines de leur âge sur des sujets aussi passionnants que : « vais-je ou ne vais-je pas fumer ma première cigarette ? » Ma copine de l'époque m'a fait des scènes de jalousie terrible. Soi-disant que si j'admirais la plastique de ces gamines de quinze ans j'avais nécessairement l'intention de coucher avec ! « Quelle incommensurable stupidité » lui fis-je remarquer. « Oui, mais il y en a qui le font », fut la réponse que je m'attirais.

La sexualité enfantine ou infantile n'existe pas. Mais des parents imbéciles déguisent leurs fillettes de huit ans en petites nymphettes : collants, minijupes, rouge à lèvres et bijoux. Quand j'étais enfant, on ne voyait pas ça. Qu'est-ce qui passe par la tête des parents qui déguisent ainsi leurs filles en vamps ? Il y a deux jours je voyais un bout de chou de deux ans à peine, ni féminin, ni masculin. Ah si ! Féminin, il avait déjà les lobes des oreilles percés et portait des boucles d'oreilles.

Est-ce que ça s'appelle respecter les enfants que vouloir leur inventer une sexualité qu'ils n'ont pas ? Quand ils sont neutres en faire absolument des filles ou des garçons, alors que ce sont juste des enfants ?

Basile, philosophe naïf, Paris le 10 juin 2015

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