Le
domaine relationnel entre les hommes et les femmes, en tous cas en
France et à Paris, est dominé par le double phénomène de la
faillite du langage et du langage de la faillite. De quoi s'agit-il ?
De la subordination du langage écrit, parlé, pensé, gestuel,
attitudaire, vestimentaire au harcèlement sexuel permanent des femmes
par les hommes. Quoi qu'on dise ou qu'on fasse on se retrouve
étiquetté harcelée ou harceleur.
Un
Parisien affirmait devant moi il y a quelques décennies :
« même si tu n'en a pas envie, il faut faire comme si tu
draguais la femme devant toi, sinon elle se sentira vexée. »
Un cavaleur s'exclamait un jour devant moi, parlant des femmes qu'il
cortisait : « de toutes façons, elles n'ont jamais
envie ! »
Une
vieille sagesse populaire dit : « l'homme propose, la
femme dispose. »
Tout
ceci confirme la situation de harcèlement sexuel permanent des femmes
par les hommes. Harcèlement qui implique aussi l'existence de son
contraire : le contre-harcèlement sexuel. C'est-à-dire des
mots, gestes, attitudes, qui affichent un refus, un rejet de la
sexualité.
Le
grand perdant de tout cela, c'est la tendresse et la sincérité.
Dans
un lieu public je parle un peu à tout le monde, notamment du
Carnaval que j'organise. Pratiquement à chaque fois que je m'adresse
à une jeune fille parmi les autres personnes, j'ai droit au même
type de commentaires : « tu dragues ! » « les
jeunes filles t'intéressent ? » etc. Si je m'adresse par
exemple à un homme vieux gros et chauve, je ne m'attirerais jamais
la remarque : « ah ! Tu t'intéresse aux hommes vieux
gros et chauves ! »
Un
dragueur de ma connaissance, chaque fois qu'il me voit en compagnie
d'une femme qui l’intéresse, va faire une plaisanteruie à mon sujet.
Qui n'en est pas une. Elle sous-entend qu'il me connaît comme un
cavaleur patenté. Histoire de faire peur à la femme près de moi en
l'avertissant indirectement qu'il faut qu'elle se méfie de moi.
Cette attitude de ce cavaleur illustre le fait qu'il se considère en
concurrence permanente avec tous les hommes pour harceler les femmes.
La
faillite du langage va s'opposer à l'expression poétique. Quand
j'écris un poème adressé à une femme, elle pourra chercher à
lire entre les lignes des choses que je n'y ai pas mis. Il m'est
arrivé de mettre mal à l'aise une femme riien que parce que j'avais
vanté la beauté de ses yeux. Le commentaire acide que je me suis vu
attirer était : « tu n'écrirais pas la même chose à un
homme ! » Sous-entendu : « tu me dragues, bas
les mots ! » Quand il n'y a aucun sous-entendus de ma part
on va en imaginer. C'est le langage de la faillite. Que reste-t-il
alors à faire ? Se taire, ou s'exprimer, mais comment ?
Les obsessions sociétales ont abimé, affaibli l'expression
linguistique.
Basile
philosophe naïf, Paris le 27 mars 2019
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