samedi 4 novembre 2017

870 La Révolution des écureuils joyeux

Hier je devais sortir tôt de mon domicile parisien. J'avais des démarches administratives à faire. C'était l'heure où les parents qui travaillent emmènent leur progéniture à la crèche, chez la nourrice, à l'école ou au centre aéré. J'ai croisé deux sympathiques jeunes papas qui paraissaient tout joyeux d'escorter ainsi leur bambin de deux ou trois ans. L'un des deux papas chantait même des chansons.

J'ai croisé également une mère de famille qui s'en allait accompagnant une fille d'environ huit ans et un garçon d'environ dix ans. Cette mère paraissait très fatiguée.

Plus loin, passant sous un échafaudage installé pour ravaler un immeuble de mon quartier, j'ai avisé un petit tas de gravas qui avait été rassemblé et attendait d'être enlevé. Je me suis dit : « balayer et ramasser ces détritus, c'est un travail reconnu et rémunéré. En revanche, mettre au monde et élever ces deux grands enfants n'est ni reconnu comme travail, ni rémunéré, ni ne donne droit à la très généreuse retraite correspondante. »

On parle beaucoup ces dernières années de la gestation pour autrui, en abrégé GPA. La gestation pour autrui est payée. Pas la gestation pour soi des enfants qu'on va élever. Pourquoi ? L'effort est différent ?

Ma mère a eu six enfants dont quatre qui ont vécu et qu'elle a élevé. Elle méritait une retraite en or massif pour ce qu'elle a ainsi fait pour toute la société. Elle n'a rien reçu de tel. Quand l'autre jour j'en parlais à une dame que je connais, elle s'est exclamé : « ma mère a eu dix enfants ! » Les femmes auxquelles je parle de cette injustice m'approuvent toutes.

Hier trois novembre, certains journaux titraient : « aujourd'hui à partir de 11 heures 44 les femmes qui travaillent le font bénévolement. » Il s'agit ici de l'écart entre les salaires masculins et féminins qui existe en France pour le même travail. Il revient à ce qu'à partir du 3 novembre à 11 heures 44 jusqu'au 31 décembre au soir les femmes ne sont plus payées pour leur travail effectué.

Mais le travail domestique et maternel ? Est-il reconnu, payé, donne-t-il droit à une retraite confortable et méritée ? Non. Les journaux en parlent-ils ? Pas plus.

Une dame que je connais a du faire durant des années des ménages en plus de son travail de bureau pour assurer le bien-être de sa famille. Elle a lu plusieurs de mes textes récents écrits à propos de la condition féminine. Et m'a dit tout à l'heure être tout à fait d'accord avec moi. Elle va donner mes textes à lire à un de ses fils.

Cette dame m'a dit qu'il faudrait une révolution pour que changent les relations homme-femme. Mais que cette révolution « on ne la verra pas ». Et pourquoi donc ? Elle doit se faire aujourd'hui et tout de suite avec un résultat significatif maintenant. Cela dépend de nous et d'abord des hommes. Ceux qui ont compris que la sexualité phallocratique et consumériste dominante n'apporte que peu d'agrément, beaucoup d'ennuis et un Niagara d'illusions peuvent s'ils le veulent y renoncer. Reconnaître le travail domestique et maternel des femmes. Et proclamer leurs choix. Comment appellerons-nous ces nouveaux hommes ? Je propose de les appeler des écureuils joyeux. Pourquoi des écureuils joyeux? Parce qu'il faut bien un nom et qu'un écureuil joyeux c'est très gracieux et joli. Cette révolution sera donc appelée : « la Révolution des écureuils joyeux. » Bien sûr, il y aura aussi un effet noisette, qui fera que par intérêts certains pourront pervertir le mot écureuil ou prétendre en être un sans l'être. Mais il nous faut des outils de langage pour avancer. Et s'ils sont utilisés à contre-sens, c'est à nous d'être capable d'identifier la situation et ne pas nous faire prendre et abuser.

Basile, philosophe naïf, Paris le 4 novembre 2017

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