Connaissez-vous la blague
de « la conférence sur les poux » ? Elle est très
simple : on commence un discours sur ces petites bestioles en
expliquant comment elles nous attaquent redoutablement, en
particulier en venant infester notre cuir chevelu. Que nous viennent
d'intolérables démangeaisons, qu'on se gratte et se gratte et...
tous les auditeurs finissent par se gratter la tête ! Telle est
la force de l'autosuggestion.
Deux jeunes filles qui
conversaient près de moi dans le métro parisien m'ont fait un jour
le coup. J'ai fini par me gratter la tête suite à leurs propos. Elles ont bien ri en me voyant ainsi réagir.
Et l'envie de faire
pipi ? Si, systématiquement vous prenez l'habitude d'aller
faire pipi juste avant de sortir de chez vous... immanquablement vous
finirez par avoir toujours envie d'aller aux toilettes au moment de
sortir de chez vous, même pour trois gouttes !
Connaissez-vous ce genre
d'exercices ? Il consiste à s'imaginer porter un poids, un
effort, avec vos bras, par exemple. Le poids est imaginaire. Vous
faites comme s'il était là. En agissant ainsi vous finissez par...
vous muscler ! Imaginez à présent que vous pensez bien fort et
régulièrement que tout le monde vous déteste, même si ce n'est
pas vrai. Imaginez le résultat !
On n'en finirait pas
d'énumérer ainsi les conséquences visibles de l'autosuggestion. Il
en est de dramatiques, car elles amènent la naissance de vastes
faux besoins. En voici quelques exemples :
Avoir beaucoup d'argent,
le plus possible d'argent, que vous n'aurez jamais l'occasion
d'utiliser, ça peut être excitant. Vous n'en avez pas besoin. Mais
vous vous suggérez ce besoin.
Avoir le pouvoir, le plus
grand pouvoir possible... même si vous n'en avez aucun besoin, c'est
excitant. Vous n'en avez aucun besoin. Mais vous vous suggérez ce
besoin.
Copuler avec une femme,
ou un homme, ou des femmes, ou des hommes, ou des femmes et des
hommes, y penser, en rêver peut être fort excitant. Alors que vous
n'en avez le plus souvent rigoureusement pas besoin. Mais vous vous
suggérez ce besoin, surtout si vous êtes un homme.
Confondre excitation et
besoin est une des plus grandes erreurs qui se commet tous les jours
avec des conséquences incalculables et dévastatrices. Il faut
savoir la reconnaître, s'en méfier et l'éviter.
Les faux besoins, nous
croyons les voir venir de nous, alors qu'ils sont le produit de
l'idéologie dominante de la société. Idéologie qui connaît des
variantes régionales.
Certains Chinois croient
aux vertus aphrodisiaques de la poudre de corne de rhinocéros. Ils
ont ajouté à cette bizarre pharmacopée la poudre d'écailles de
pangolin. Résultat, quantité de rhinocéros et de pangolins sont
massacrés et braconnés tous les ans. La bêtise de ces croyances
éclate quand on sait que la corne de rhinocéros, les écailles de
pangolin sont faites de kératine, substance qui forme nos ongles et
nos cheveux. Plutôt que se procurer des cornes de rhinocéros ou
des écailles de pangolin, rongez-vous les ongles ! Et ne
protestez pas quand au restaurant vous trouvez dans votre soupe un
cheveu qui flotte. Félicitez-vous plutôt de votre chance et
avalez-le avec délice !
C'est facile de se moquer
des Chinois amateurs de kératine curative. Mais ne sommes-nous pas
aussi bête quand nous nous extasions devant la belle et abondante
chevelure d'une jolie fille... et déduisons de notre émoi
capillaire que cette superbe chevelue est faite pour faire notre
bonheur ?
Basile, philosophe
naïf, Paris le 26 décembre 2017
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