samedi 22 février 2014

227 Le drame de l'amour au XXIème siècle

Je suis né en 1951. Quand j'étais enfant, l'amour était une chose dramatique. Une femme ou une jeune fille digne aux yeux de la pensée unique de l'époque ne devait pas témoigner d'intérêt pour le sexe. A moins d'être une créature méprisable et sulfureuse.

Il n'était guère possible qu'elle « passe à l'acte » sur la seule base de son désir « coupable ». La réprobation sociale la guettait. Le rejet de sa famille la menaçait aussi. Comme disait un père à sa fille, que j'ai connu : « si tu reviens à la maison avec un Polichinelle dans le tiroir, je te mets sur le palier ! » Les jeunes filles étaient particulièrement surveillées. Il était courant d'entendre dire à Paris, par les parents d'une jeune fille : « le soir, elle doit être de retour à 18 heures ! » Les jeunes hommes étaient beaucoup plus libres. Ils pouvaient, par exemple, sans problèmes aller seuls au café. Les femmes le pouvaient également, mais c'était très mal vu par beaucoup de gens. A la plage ou à la piscine elles pouvaient se mettre en maillot de bain. En revanche, montrer à des étrangers à la famille leur photo en cette tenue était considéré comme vulgaire et indécent.

J'ai lu, mais n'ai pas vu, que les très jeunes filles enceintes se retrouvaient dans des sortes de foyers à l'écart des autres. Où on les initiait aux taches domestiques, telle que le repassage de chemises d'homme.

Et, surtout, la terreur de tomber enceinte servait de barrière à l'expression libre du désir et de l'amour en général. La contraception était inexistante. Et l'avortement interdit risquait de conduire la jeune fille ou la femme enceinte dans les mains d'une « faiseuse d'anges ». Les accidents causés par des avortements bricolés étaient nombreux et pouvaient être mortels.

Quand la pilule est arrivée, un nombre considérable de femmes a saisi là l'occasion de vivre sa vie, se réaliser dans quantité de domaines en mettant entre parenthèses la maternité. Ce projet se retrouvant remis à plus tard un certain nombre de fois. Ce qui a entraîné finalement de facto la renonciation à avoir des enfants. Cette situation n'a pas toujours été bien vécue. Il y a aujourd'hui des dizaines de milliers de femmes âgées d'au moins une soixantaine d'années qui regrettent d'être passée à côté de cet aspect de la vie. J'en ai rencontré plusieurs. De ce phénomène je n'ai jamais vu parler dans les livres ou journaux que j'ai pu consulter. La pilule a été une libération. Ces femmes en ont également été victimes d'une certaine façon.

Aujourd'hui un autre problème nouveau est apparu, conséquence de la contraception. Croyant bien faire, bien des femmes ont voulu prendre pour modèle d'émancipation la conduite masculine. C'était accorder aux hommes une supériorité qu'ils n'ont pas. Pourquoi seraient-ils les modèles à suivre pour toute l'Humanité, femmes comprises ? C'était aussi les imiter dans leurs erreurs et stupidité quand il s'est agit de l'alcool, du tabac et du sexe.

Jusque dans les années soixante du siècle dernier la majorité des femmes buvaient moins d'alcool que les hommes et fumaient très peu. Une femme saoule ou qui fume était très mal vue, de même qu'une femme qui témoigne d'un intérêt visible pour le plaisir sexuel. Une fois mariée, à moins d'être une princesse ou une vedette de cinéma, les femmes étaient également priées de mettre leur séduction en berne.

En imitant les hommes ces dernières décennies, les femmes les ont rattrapé dans le domaine des maladies mortelles causées par le tabagisme. Elles ont aussi cherché à suivre l'exemple masculin dans le domaine sexuel. Et à imaginer leur propre comportement de femme libérée de la menace permanente de la grossesse indésirée.

Les hommes, de leur côté, dans leur grande masse, n'ont hélas guère évolué. Hier, ils cherchaient à baiser des femmes qui très souvent se dérobaient par crainte du qu'en dira-t-on, de la grossesse malvenue, de l'avortement bricolé et dangereux ou encore des maladies vénériennes. A présent que la pilule est arrivée, ils se croient très souvent arrivés dans une sorte d'immense bordel gratuit. Où ils peuvent passer de femme en femme sans respect et sans problème.

Qu'il est dur aujourd'hui dans notre société d'être une femme jolie, séduisante et intelligente ! Le comportement masculin fréquent a de quoi la désespérer. On dirait le plus souvent qu'elle n'a pas affaire à des humains mâles, mais à des sortes de petits gamins profiteurs, égoïstes et irrespectueux ! J'en ai vu à l’œuvre, de ces jeunes hommes qui se croient malins. Et traitent les femmes à l'égal des mouchoirs jetables. Mais, un jour, la boîte de mouchoirs jetables sera vide pour eux. Ils seront vieux et réaliseront, trop tard, que quand ils sont malades, personne n'est là pour leur faire une tisane. Ils auront méprisé l'amour. Et l'amour se sera vengé d'eux.

Si nombre d'hommes stupides considèrent les femmes comme des prostituées gratuites, d'autres les traitent avec condescendance comme de petits animaux fragiles, à protéger. Et qui ont besoin de l'aile protectrice de leur seigneur et maître pour vivre et survivre. Cette attitude a de quoi énerver et irriter.

Je connais des hommes apparemment sympathiques à l'endroit des femmes qui témoignent de cette stupide conception de la femme. J'en ai moi-même fait partie. Ayant eu une amie malade je l'ai absolument étouffé en croyant bien faire pour la soutenir et protéger. J'avais des circonstances atténuantes, car la situation était très difficile. Et je n'étais pas le seul des deux à ne pas comprendre bien notre relation.

Une femme ne réclame pas autre chose qu'être traitée en être humain. C'est malheureusement rarement le cas aujourd'hui de la part des hommes. Surtout si elle est jeune et jolie.

On a tendance à entendre dire que la femme actuelle est émancipée, a acquit la plupart des droits qui établissent son égalité avec l'homme. Ce n'est pas vrai.

D'abord, il ne faut pas confondre le sort de la femme en France et à Paris avec celui de l'ensemble des femmes de la planète. Ensuite, même à Paris, la situation est très loin d'être aussi bonne que ça.

Phénomène toujours présent mais dont on entend peu parler, existe toujours la peur permanente du viol. Ensuite, à Paris et ailleurs, subsistent des îlots d'extrême barbarie. Et les femmes en sont parfois les actrices. Ainsi, rappelons-nous que, là où l'excision existe, ce sont souvent des femmes qui la pratiquent sur les fillettes.

Et, même sous nos latitudes, la barbarie, quand elle a reculé, n'a pas renoncé. Un projet de loi récent prévoit en Espagne d'interdire l'avortement. Ce qui entraînera non pas la disparition de celui-ci, mais la reparition du drame des avortements bricolés, dangereux et clandestins.

La manière de considérer la femme et son rôle de mère anime un débat étrange en France, celui de la procréation médicalement assistée, dite PMA.

On voit s'affronter partisans et adversaires de la procréation artificielle chez les femmes seules ou vivants en couples homosexuels. Doit-on ou non autoriser pour elles la PMA ? Vaste débat, mais la question est mal posée.

La procréation artificielle ne nécessite pas forcément l'aide de la médecine. Certes, si la fécondité du sperme concerné est réduite, la centrifugation de celui-ci est un acte médical. Mais la fécondation artificielle artisanale n'est soumis à aucune loi et ne nécessite aucun diplôme médical. Éjaculer dans un entonnoir relié à une éprouvette, recueillir le sperme avec une seringue ordinaire en plastique, dépourvue de son aiguille, pénétrer avec un vagin et appuyer sur le piston ne requiert aucun diplôme. C'est ainsi que cela se fait pour certains animaux d'élevage. Et que fait par exemple un citoyen hollandais qui se targue d'avoir aujourd'hui 200 enfants ! Il a pris l'habitude de donner ainsi de sa personne pour des lesbiennes souhaitant enfanter. J'ai lu son histoire dans un journal français, il y a une ou deux années de cela.

Sachant ces informations, faciles à trouver, on ne comprend pas le fond du débat sur la PMA. Ses partisans comme ses adversaires font comme s'il fallait avoir fait dix ans d'études médicales pour manier un entonnoir, une éprouvette et une seringue sans aiguille.

La manière de considérer les femmes reste surprenante dans notre société paraît-il évoluée. Lors de l'affaire du Sofitel de New York, un éminent journaliste évoquant le possible viol d'une femme de menage s'est exclamé : « il ne s'agit que d'un troussage de domestique ! » Et un ancien ministre a dit : « il n'y a pas mort d'homme ». Sous-entendu, quoiqu'il ai pu se passer effectivement, viol ou pas, ça n'est pas bien grave.

Pour ma part j'ai eu des fois l'occasion d'entendre des hommes dirent par exemple : « la femme est faite pour l'amour » ou bien encore : « quand une femme se fait violer, c'est qu'elle le veut bien ».

Ceux qui tenaient ces propos n'étaient pas visiblement des grosses brutes, mais avaient l'apparence de gens aimables et civilisés.

Rencontrant une masse d'individus de ce genre, il devient très difficile pour une femme de se situer. Les regards qu'elle rencontre lui renvoient une image déformée de ce qu'elle est effectivement. Le mensonge fréquent, l'hypocrisie rencontrée déstabilise, égare, rend difficile de se faire des convictions, trouver de l'assurance, génère de l'agressivité.

Le manque de miroir objectif est un problème pour les femmes, tant est grand le nombre d'hommes stupides qui n'arrivent pas à considérer la femme comme un être humain. Il existe, de-ci, de-là, quelques hommes qui ne partagent pas cette stupidité répandue. Peut-être, pour remédier à cette carence de miroir, devrait-on imaginer la formation de cercles de taille réduite, moins de vingt personnes, composés de femmes clairvoyantes et de quelques-uns de ces très rares hommes ? La question mérite débat.

Basile, philosophe naïf, Paris le 22 février 2014

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