De nos jours, le divorce
est une pandémie. Et les couples non déclarés en mairie qui se
séparent sont innombrables. Avant, les enfants de parents divorcés
détonnaient au milieu d'une classe. Aujourd'hui on serait presque
tenté d'affirmer le contraire. On remarquerait plus les enfants de
couples toujours mariés. Une dame née en 1913 me répétait souvent
il y a une dizaine d'années : « je ne comprends pas pourquoi
les gens se séparent tant ». En fait, s'il est vrai que
l'indépendance morale et matérielle des femmes plus fréquente
aujourd'hui qu'hier y est pour quelque chose, il existe une autre
raison. Ceux qui, en apparence, se « séparent » ainsi
n'ont en fait jamais été vraiment ensemble. Et les vieux couples
qui durent ou les nouveaux appelés à durer n'ont pas vraiment
souvent compris exactement la nature de leur relation, au point de
savoir l'expliquer à d'autres.
Dans les années 1980,
une dame née vers 1930 me disait : « je ne comprends pas les
jeunes qui se séparent pour un oui ou pour un non. Nous, avec mon
mari, on avait des objectifs communs. Par exemple : acheter une salle
à manger. »
Ce propos m'avait
intérieurement fait rire. Je me disais que cette vision de la
relation de couple était vénale, matérielle, sordide et pas
sentimentale. Moi, je mettais l'amour en avant. Je l'ai tant et si
bien mis en avant qu'un jour de 1992 j'ai dû réviser ma façon de
faire et penser. Sinon, jouet de dames qui s'amusaient de ma personne
à la façon du gentil chat avec la malheureuse souris, j'étais
arrivé au bout de mes peines. Seule me restait la souffrance avec la
perspective du suicide. J'ai préféré mettre dans le vin du
sentiment l'eau du raisonnement et rester en vie. La dame à la salle
à manger n'avait pas forcément tort. En ce sens que son mari et
elle n'étaient probablement pas liés simplement par des objectifs
matériels. Mais comment aurait-elle pu m'expliquer une chose
qu'aucun livre n'explique jusqu'à présent ?
La base de la société
humaine, la relation fondamentale, c'est le binôme. Le plus connu
est le binôme mère-enfant. Il existe aussi entre les adultes.
Quand on cherche à
expliquer à un malheureux solitaire comment rencontrer l'amour, on
est amené à lui dire de prendre son temps. Cesser de chercher.
Connaître l'autre... en fait, laisser le temps que s'établisse
éventuellement une relation binomale. Relation souvent dissimulée à
la vue par nos idées toutes faites sur « le couple »,
« l'amour », « le sexe », « la
fidélité », « le mariage ».
Une amie très jolie vit
seule avec sa fille. Très tôt, s'établit un binôme très solide
entre elles deux. Par exemple, quand la mère un jour pleure, sa
fille, qui n'a alors que trois ans, lui dit : « t'en fais pas,
maman, ça va s'arranger. » La mère cherche l'amour. Et croit
que c'est en couchant qu'elle va identifier la perle rare. Autour
d'elle tournent des parasites masculins qui voient une jolie femme
pauvre qui cherche un mari. Alors, ils lui chantent des chansons. Lui
promettent du travail. Et la traitent comme une pute gratuite. Elle
vit un binôme très réussi avec sa fille. De ce fait, elle ne peut
pas confondre ceux qui profitent d'elle avec ce qu'elle cherche : un
binôme avec un homme. Alors elle souffre sans comprendre. Et
continue dans l'impasse en rêvant au prince charmant.
Un homme vit mal sa vie
de famille. Il a deux enfants. Le second est de lui. Le premier non,
il a épousé une femme enceinte de quelqu'un d'autre. Et il a cru
bien faire de cacher son origine au premier enfant. Il fait comme
s'il était le père. C'est une grave erreur. Car il sait la vérité.
Elle l'empêche d'établir un binôme avec l'enfant qui n'est pas de
lui. Et celui-ci sent que quelque chose cloche. Résultat : le père
et son fils adoptif sont tous les deux malheureux.
Le binôme est
omniprésent dans notre société. Comme présence, ou absence et
besoin.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 26 janvier 2013
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