Une
amie comédienne me disait un jour : « si un spectacle a
un très grand succès et qu'une salle comble applaudit à tout
rompre la performance d'un acteur. Et qu'ensuite quelques rares
spectateurs viennent dans sa loge lui serrer la main et lui dire
qu'il a été très bien, ces rencontres sont très importantes. Et
une salle comble qui applaudit ne les remplace pas. »
Quand
j'écris une nouvelle poésie et l'envoie à une quinzaine de
personnes, j'attends leur retour avec impatience. Même si je suis
persuadé d'avoir été bon, il me manque quelque chose.
Quand
dans une conversation il est question d'un sujet qu'un des présents
ignore, il peut arriver qu'il s'empresse d'apporter une information
intéressante... qu'il vient d'inventer.
Certaines
personnes ne sont jamais d'accord avec vous et affirment
systématiquement le contraire, quel que soit le sujet.
Une
amie s'informe sur un sujet d'actualité dont je lui avais parlé.
Tombe d'accord avec mon opinion sur ce sujet. Mais s'énerve quand
elle m'expose son point de vu, alors que je lui dis que je suis
d'accord.
Au
Carnaval on cherche à se faire remarquer.
Toutes
ces reactions procèdent de comportements acquis durant la petite
enfance.
L'enfant,
c'est à dire y compris nous il y a bien des années, veut plaire, se
sentir intégré au monde des grands, des adultes, des « grandes
personnes », des aînés, des anciens, des parents, de « ceux
qui savent ». Alors, quand il agit, il observe la réaction de
ces personnages dominants et parfois incompréhensibles et
mystérieux.
Je
fais ci, je fais ça, se dit l'enfant. Est-ce bien ? Approuvé
par les grands ? Ils sourient, c'est bien. Ils applaudissent, me
récompensent, c'est merveilleux. Ils désapprouvent, se fâchent,
aïh aïh aïh !
Beaucoup
plus tard, ces comportements s'étant imprimés en nous, nous avons
besoin de plaire, de la reconnaissance des autres. Il est alors plus
facile de suivre le troupeau, hurler avec les loups que d'être un
pionnier solitaire, même convaincu de la justesse de sa démarche.
C'est
parce qu'il a été enfant, que l'acteur ou l'actrice apprécie tant
la poignée de main et les compliments de quelques-uns reçus dans sa
loge après le spectacle où il a y compris triomphé. Ça rentre en
écho avec lui ou elle enfant quêtant l'approbation des « grands ».
Même chose quand je suis impatient, avide de recevoir des réactions
à la lecture d'une nouvelle poésie.
Celui
ou celle qui invente une information sur le sujet qui passionne un
auditoire cherche aussi la reconnaissance, quitte à affabuler. Ce
comportement contribue à la diffusion de fables. Il est très
répandu.
Dire
systématiquement le contraire est une façon négative de
s'affirmer.
Une
façon caricaturale de s'affirmer, et pas si rare que ça, est de
témoigner par la véhémence de ses propos... d'un désaccord
imaginaire avec son interlocuteur ou interlocutrice.
Enfin,
pour s'affirmer, quoi de mieux qu'un fantastique costume et masque de
Carnaval ?
L'enfant
qui est en nous n'a pas toujours tort. Mais il faut savoir
quelquefois le dépasser. Ainsi, par exemple, je ne cherche plus
depuis des années à « briller en société ». Il n'y a
besoin ni d'excuse, ni d'alibi, ni de justificatif pour simplement
exister. Si on vous apprécie, tant mieux. Si on ne vous apprécie
pas, on ne peut pas plaire à tout le monde. Il y aura toujours des
gens qui ne vous apprécieront pas, quoi que vous fassiez, y compris
pour leur plaire.
Comme
disait Molière : « on ne peut pas plaire à tout le monde
et son père. » Essayons d'être nous-même. C'est déjà un
effort très satisfaisant, justifié, important, difficile, louable
et suffisant.
Basile
Paris,
le 28 mai 2020