Que diriez-vous de
quelqu'un qui porterait en permanence, jour et nuit, des gants ?
Qu'il n'est pas raisonnable et que sa manie n'est pas saine pour ses
mains. Pourtant, ce comportement malsain est courant chez plein de
gens s'agissant des pieds et plus encore du sexe et du cul. Combien
de gens emballent en permanence leurs pieds dans des chaussettes, des
chaussures ou des pantoufles, et leur sexe et leur cul dans un slip,
un caleçon et par dessus un pantalon ? Mais, laissez donc les pieds,
le sexe et le cul respirer et voir la lumière du jour !
En été, à Paris,
nombre de femmes et de jeunes filles portent des sandales. La plupart
des hommes, eux, de leur côté, font fermenter leurs nougats dans
des conteneurs plus ou moins étanches, comme les malsaines
chaussures de basket. Au point que je surnomme ces hommes : « les
pieds qui puent ».
Le sexe et le cul, quand
sont-ils à l'air libre et pas à étouffer, serrés dans un tissu
fleurant la sueur, la merde et l'urine ? Ils ont droit de sortir
juste pour la miction et défécation, la toilette et l'acte sexuel.
Pauvre sexe et pauvre cul maltraités ! Eux aussi veulent vivre au
grand air et ont besoin de respirer !
On a décrété le sexe
et le cul voués... au sexe et au cul. Soi-disant spécialisés pour
la pratique de cette caricature de la relation humaine qu'on a
baptisé : « l'amour physique ». Comme s'il existait un
coupable, sale et délectable amour à caractère « physique »,
qui formerait une activité bien distincte de l'amour tout court,
immaculé, pur et blanc. Selon nos lois en vigueur, laisser voir sexe
ou cul est par définition une « exhibition sexuelle » et
un délit. Au Québec la loi parle d'« exposition des parties
génitales ». Par définition une partie de l'être humain est
à cacher. Même encore il n'y a pas si longtemps, pour « faire
l'amour », certains requéraient l'obscurité totale ! Autre
bizarrerie que j'ai connu dans les années 1980 avec une petite amie
née en 1939 : que je l'aperçoive nue était sans problèmes. En
revanche, il ne fallait en aucun cas que je l'aperçoive en
train de se déshabiller !
Porter des vêtements en
permanence vingt-quatre heures sur vingt-quatre est malsain et
anti-hygiénique. Notre personne toute entière a besoin du contact
tranquille de l'air libre au minimum une heure par jour. Être
habillé en permanence favorise la maladie et les désordres
psychologiques.
Je connais quelqu'un qui
est habillé en permanence jour et nuit et se lave rarement. Sa santé
n'est pas fameuse. Il ne s'interroge pas sur son hygiène en
particulier vestimentaire. Il préfère se cacher dans ses vêtements,
y compris à son propre regard. Chose d'autant plus aisée que la
morale dominant notre société a fait également de la « nudité »
une catégorie esthétique. Ne peuvent envisager de se « montrer »
nu que ceux qui « ont quelque chose à montrer »,
c'est-à-dire qui sont jugés « beaux » selon les
critères esthétiques à la mode. Sinon, aux autres, il ne reste
plus qu'à se cacher. On avait déjà l'équation nudité égale
orgie. On a de plus l'autre équation : soyez nu seulement si vous
êtes beau. La nudité, qui n'est pas autre chose que notre état
naturel, est élevée au rang de drame. Seule la beauté la
justifierait éventuellement.
Les interdits visuels
liés à la nudité ont un caractère machiste. En France, depuis
1914, les hommes ont le droit de se trouver torse nu à la vue des
autres, les femmes non. Elles sont donc ici une fois encore traitées
en inférieures des hommes, privées d'un droit réservé aux hommes.
Ce qui est étrange et cocasse, c'est de constater que la nudité est
présentement et depuis longtemps légale sur les plages d'Allemagne
du nord et de Scandinavie. Et qu'en France c'est un délit passible
de peines sévères. Je me souviens d'un documentaire passé à la
télévision française il y a plus de vingt ans. On y interviewait
en Suède une respectable grand mère suédoise. Et à un
moment-donné on la voyait descendre une échelle pour aller se
baigner dans la mer. Le cameraman français avait fait des prodiges
d'angles bizarres de prises de vue afin qu'on ne voit pas simplement
qu'elle était nue !
Basile, philosophe
naïf, Paris le 4 décembre 2015
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