De nos jours, certains croient qu'avec beaucoup d'argent on peut tout obtenir. Ce qui justifierait le fait de pouvoir faire n'importe quoi pour en posséder un maximum. Or, avec l'argent, en fait tout n'est pas possible. Essayez donc avec de l'argent de déplacer Noël en avril !
Il s'ensuit
également que certains croient que l'argent est une substance
magique qu'il est souhaitable d'accumuler sans fin. Or, l'argent qui
ne circule pas, n'a en fait pas de valeur. S'agissant de la volonté
d'accumuler l'argent absurdement et sans fin, il y a plus de 2300
ans, le célèbre savant grec Aristote a parlé de
« chrématistique ». Phénomène auquel j'ai pensé en
parlant du « hamstérisme ».
Aristote défini d'abord ainsi la « chrématistique naturelle » ou « nécessaire » :
Aristote défini d'abord ainsi la « chrématistique naturelle » ou « nécessaire » :
Elle est liée à la nécessité de
l'approvisionnement de l'oïkos, c'est-à-dire de la famille
élargie au sens de communauté. On ne peut pas la dénigrer, car
elle est nécessaire à la survie. On distingue dans cette
chrématistique naturelle l'art naturel au sens propre — celui
relié à la prise de possession directe ou à l'utilisation du
travail des esclaves pour s'autosuffire — de l'art naturel par
l'échange nécessaire. Ce dernier est indispensable puisque
l'autosuffisance reste difficile à maintenir. Aristote admet le troc
et l'échange pratiqué par la monnaie comme important, mais insiste
sur le fait que cette dernière ne doit pas être accumulée, qu'elle
ne doit être utilisée que pour réaliser l'échange.
Différente de la « chrématistique naturelle » ou « nécessaire » est la « chrématistique » proprement dite ou « commerciale », l'accumulation absurde de l'argent pour l'argent.
La seconde forme de chrématistique est radicalement
différente de la première et est liée au fait de « placer la
richesse dans la possession de monnaie en abondance ». C'est
l'accumulation de la monnaie pour la monnaie (la chrématistique dite
« commerciale ») qui, selon Aristote, est une activité
« contre nature » et qui déshumanise ceux qui s'y
livrent : en effet, toujours selon Aristote, l'homme est par
nature un « zoon politikon », animal politique
(politikos, citoyen, homme public). Et dans de nombreux
textes, Aristote précise bien qu'il est « fait pour vivre
ensemble » ou encore « en état de communauté ».
C'est de ce point de vue qu'Aristote se place lorsqu'il déclare que
la politique consiste avant tout à « organiser et maintenir
l'état d'amitié entre les citoyens ». Ainsi, suivant
l’exemple de Platon, il condamne le goût du profit et
l'accumulation de richesses. En effet, la chrématistique commerciale
substitue l’argent aux biens ; l’usure crée de l’argent à
partir de l’argent ; le marchand ne produit rien : en
l'absence de règles strictes visant leurs activités et d'un
contrôle de la communauté dans son ensemble, tous sont condamnables
d'un point de vue politique, éthique et philosophique.
Bien qu'Aristote traite la chrématistique comme un
ensemble de ruses et de stratégies d’acquisition des richesses
pour permettre un accroissement du pouvoir politique, il la condamne
toujours en tant que telle et donne une place beaucoup plus
importante à l’économie.
J.M. Keynes de son côté
écrit : « L'amour de l'argent comme objet de possession —
distinct de l'amour de l'argent comme moyen de goûter aux plaisirs
et aux réalités de la vie — sera reconnu pour ce qu'il est, une
passion morbide plutôt répugnante, une de ces inclinations à
moitié criminelles, à moitié pathologiques, dont on confie le soin
en frissonnant aux spécialistes des maladies mentales. » (J.
M. Keynes, Perspectives économiques pour nos petits enfants
in Essais de Persuasion, 1930, Les Classiques des Sciences
Sociales)
De nos jours, le monde
est malade d'être dominé par ces criminels malades dont parle
Keynes.
Basile, philosophe naïf
(aidé de l'article « chrématistique » de Wikipédia),
Paris le 9 juillet 2013.
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