Il existe une expression
française dont le sens a évolué. A l'origine elle signifiait
« être en caresses avec une femme ». A présent elle a
pour sens être légèrement saoul. Cette expression c'est « être
en goguette ». On parle souvent dans le domaine de l'amour de
« la première fois », comme si c'était l'étape la plus
importante. En fait, la première étape importante dans la vie
amoureuse c'est la première fois que nous nous retrouvons « en
goguette » dans le sens premier du terme.
Je me souviens très bien
de ma première « goguette ». J'avais dix-huit ans et
était très peu au fait des choses de l'amour. Ma seule éducation
était celle donnée parcimonieusement par de rares lectures et
images réservées aux « adultes ».
Quand j'ai trouvé à la
maison un exemplaire de « J'irai cracher sur vos tombes »
de Boris Vian, les quelques passages qui valurent à cet ouvrage
l'interdiction, devinrent mes préférés. On y voyait le héros du
livre pénétrer sexuellement des jeunes filles, leur caresser leur
intimité, et sucer leur sexe. J'en fis ma lecture secrète,
conservant le livre caché. Et en faisait la lecture enfermé dans la
salle de bain et accompagnée de ma main pour arriver à en jouir.
Un autre ouvrage m'avait
frappé. C'était le catalogue d'une exposition pornographique au
Danemark que mon frère aîné avait rapporté à la maison. Une
image en particulier m'avait impressionné. On y voyait de près une
large main masculine velue, le majeur replié enfoncé dans un sexe
féminin.
Quand je suis arrivé en
vacances quand j'avais dix-huit ans, c'était une location. Il n'y
avait pas assez de lits individuels pour tout le monde. Alors, qu'à
cela ne tienne, on me mis dans un très grand lit avec... une jeune
fille. Les décideurs n'y voyaient aucune malice. Je paraissais
l'être le plus innocent du monde. Je ne l'étais pas complètement.
J'avais déjà connu quelques caresses intimes pratiqués sur ladite
jeune fille, qui de son côté avait semble-t-il dormi pendant
celles-ci.
En fait, ce soir-là, en
y repensant avant de nous coucher dans le même lit, une certitude
m'est apparut : « en fait, quand je lui fais ces caresses elle
ne dort pas, mais fait semblant. Donc des choses très audacieuses
sont possible ! »
C'était l'été. J'étais
très surexcité à cette perspective. Mon sexe en large érection.
Mes glandes de Cowper à fond émettaient leur substance gluante et
mouillaient largement mon slip. J'ôtais celui-ci, pensant dormir nu
avec la jeune fille. Puis, à la réflexion, le remis. « Sinon,
me dis-je, je risque d'aller trop loin et la mettre enceinte ».
C'était là une sorte de « barrière de sécurité ».
Une fois allongés tous
les deux dans ce très vaste lit, la lumière éteinte et dans
l'obscurité complète, les opérations pouvaient commencer. Je
savais ma partenaire consentante et ouverte à mon toucher.
Je mis ma main vers elle
sous les draps et arrivais juste sur son ventre nu. J'avais noté
qu'elle était allé au lit juste vêtue d'un slip blanc et un léger
tee shirt turquoise. Celui-ci s'étant relevé un peu, ma main se
retrouva posé sur son ventre nu. C'était la première fois que
j'avais un tel franc contact sensuel avec une jeune fille. Et là
survint un incident inattendu. Je ressentis un plaisir inimaginable à
ce contact. Et, effrayé, retirais ma main.
Ce plaisir m'avait fait
peur ! Je restais un instant à me demander ce que j'allais faire. Me
revins en tête l'image du catalogue de l'exposition pornographique
danoise. Je propageais ma main, cette fois-ci vers le bas-ventre de
la jeune fille. Me voilà arrivé à son slip. Je rentre ma main.
Sens au toucher sa toison pubienne, puis arrive plus bas. Et là,
comme dans l'image, j'enfonce mon doigt le plus long dans la fente
ainsi offerte. Je n'ai ressenti en faisant cela aucun plaisir
particulier.
L'orifice était
légèrement humide. La jeune fille ne bougeait pas. Je savais
qu'elle faisait semblant de dormir. Que faire de plus ?
Ma main était dans son
slip. Le baisser. J'entrepris de le faire. Un moment elle fit,
toujours en silence, mine de se « réveiller » et le
remonta. Finalement, à force d'insister une deuxième fois, je fini
par baisser son slip à mi-cuisses. Et après, que faire de plus à
part enfoncer mon doigt ?
Je me rappelais le livre
de Boris Vian. Dedans, le héros à un moment-donné suçait le sexe
d'une de ses conquêtes féminines. Je pensais un instant faire de
même. Et, avec horreur, chassais aussitôt cette idée : « Ah
non ! Mettre ainsi un sexe dans ma bouche, c'est contraire à
l'hygiène ! »
Mais alors que faire de
plus de nouveau et agréable ? J'y suis ! Je peux m'intéresser aux
seins. Je partis donc vers mon nouveau terrain d'expérimentation.
Je remontais ma main vers
la zone mammaire.
Passant sous le tee
shirt, je trouvais un sein. Arrivé au bout mou et tendre de celui-ci
arriva un autre événement stupéfiant et totalement imprévu. Au
contact de mes doigts, le bout du sein s'est subitement métamorphosé
: il a durci, prenant la forme d'une sorte de très gros bouton !
Comme c'était étrange et imprévu !
Après cela, une chose
nouvelle était encore possible : sucer le bout du sein. Là, ce
n'était pas comme le sexe. C'était propre.
Oui, mais pour cela,
problème technique : il fallait relever le tee shirt. J'entrepris
cette nouvelle opération. Ma partenaire, qui continuait à
« dormir » se réveilla opportunément juste pour le
redescendre. Pudeur ou froid, pour quelle raison agissait-elle ainsi
? Je n'en savais rien. Mais j'insistais et fini par aboutir. Les
seins étaient dénudés, dégagés du tee shirt. Je me redressais et
allais prendre un instant le mamelon durci dans ma bouche.
La mienne du fait de
l'émotion était tout à fait sèche. Et, j'ai bien senti le mamelon
durci, cet espèce de bouton entre mes lèvres. Mais n'ai ressenti
aucun plaisir particulier.
Qu'avais-je à
entreprendre de plus ? C'est là qu'un ultime incident est arrivé.
Ma « dormeuse » a brusquement chuchoté : « Maintenant,
tu peux y aller. »
Elle voulait
manifestement dire par là : « à présent mets-y ton sexe,
pénètre-moi sexuellement. »
Là, j'ai paniqué. Ah
non ! Je ne vais pas la mettre enceinte !
J'ai tout arrêté pour
m'éloigner un peu d'elle et dormir.
Le lendemain matin, j'ai
cherché à toucher à nouveau son sexe, elle s'est rebiffé, sans
parler. Je n'ai pas insisté.
Mais j'avais eu peur.
Pour éviter de risquer de la mettre enceinte, j'ai demandé la nuit
suivante de ne plus dormir en compagnie de ladite jeune fille. Un lit
de camp avait été apporté, j'ai demandé à dormir dessus. Quand
la jeune fille a appris ma décision, elle n'a rien dit, mais parue
surprise. Chose étrange : la nuit qui suivie j'ai été tourmenté
par une envie terrible que je n'avais jamais ressenti jusqu'alors,
celle qu'on me caresse le sexe. Mais, bien sûr, j'étais seul dans
mon lit.
La jeune fille ne m'a
jamais parlé de cette nuit-là, sauf pour me dire quelques jours
plus tard : « j'ai été très fatiguée après... » Elle
a fini sa phrase par un petit rire nerveux. J'ai fait comme si je
n'avais pas compris de quoi il s'agissait.
Cette expérience apprend
beaucoup de choses :
L'irresponsabilité des
adultes qui croient que leur cher et pur enfant n'a pas d'appétit
sexuelle.
L'absence totale de
câlins qui conduit à prendre grand plaisir à toucher un ventre nu,
mais ensuite avoir peur et arrêter ce qui vous fait plaisir.
Et surtout l'abominable
ignorance des choses de la vie, produite par la « pudeur »
des adultes. Combinée à l'éducation faite par la pornographie. Qui
est très nulle et détestable.
On croit protéger « la
pureté et l'innocence » des enfants en ne leur parlant pas des
choses du sexe. Mais la Nature, elle, ne se gêne pas pour réveiller
en eux toutes sortes de choses dont on croit malin de ne pas parler.
Et si on s'occupe des enfants pour leur assurer sécurité, bonheur,
tranquillité, on ne s'inquiète pas de ce tête-à-tête solitaire
et redoutable entre l'enfant et la Nature en lui.
Les enfants ne sont
jamais complètement dupes. Ma mère me disait : « quand tu
étais petit, tu riais tout le temps, et un jour ça s'est arrêté. » Je me souviens qu'une petite fille de mon entourage, quand elle avait sept ans m'a dit
un jour : « j'étais joyeuse avant... »
Je me suis longtemps
interrogé. Avant quoi ? Qu'est-ce qui cause l'arrêt de cette joie
enfantine ? J'ai supposé une agression sexuelle oubliée, la
découverte de la mort à travers la disparition d'un proche. J'ai
fini aujourd'hui par trouver une autre explication.
Les enfants ont une
immense confiance dans les adultes. Ils apprennent une foule de
choses. Et c'est auprès des adultes qu'ils trouvent les réponses
aux questions. Les adultes sont là pour ça.
Mais arrive un jour où
les enfants se heurtent à un mur invisible : la clôture des
adultes. Ils découvrent qu'un très vaste domaine leur est
volontairement caché par les adultes. Et cette découverte les
déstabilise.
Une scène à laquelle
j'ai assisté incidemment m'a beaucoup frappé. Une fillette sortie
du bain est assise nue. D'un doigt bien précis elle commence à se
chatouiller le clitoris. Le père fait une expression réprobatrice
et ennuyé. La fillette arrête aussitôt. Oui, mais, cette
réprimande silencieuse ne connait là aucun sens visible, aucune
explication. C'est du domaine réservé. C'est « tu comprendras
plus tard, mais ça n'est pas bien ». Alors que, enfant, on a
terriblement besoin de l'aide, des explications des adultes, qui nous
guident partout et en tout, s'élève ici une clôture. Et, à chaque
enfant de se débrouiller. Trouver les réponses à ses
interrogations. Réponses qu'il ira chercher là où il n'y en a pas
nécessairement des bonnes. En particulier dans la pornographie qui
propage des stupidités horriblement machistes et des comportements
prostitués, absurdes et stéréotypés.
Non, ça n'est pas vrai
que l'acte sexuel est une nécessité. On peut très bien s'en passer
durant des années. Ceux qui diront le contraire. Invoqueront « la
Nature ». Oui, mais, si nous prenons les lions, par exemple.
Quantité de lions n'ont pas une troupe de femelles à leur
disposition. Une fois adulte, ils sont chassés de la famille formée
par un mâle et plusieurs femelles avec leurs petits. Et si le jeune
lion n'arrive pas à combattre un mâle et le chasser pour prendre sa
place auprès d'un groupe de lionnes, il reste seul. Et un mâle
chassé aussi. Comme quoi l'abstinence sexuelle existe aussi dans la
Nature. En fait on a surtout besoin de tendresse, d'amour. Le sexe
partagé on s'en passe très bien.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 8 janvier 2014
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